00043608

 

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Responsabilité du copropriétaire

Bris d’un garde-corps et chute du locataire

Garde-corps partie privative (oui)

 

Commentaires et observations pratiques

 

Cour d’appel de Paris Audience publique du 16 juin 2008

Tribunal de grande instance de Paris du 4 octobre 2005

N° de RG: 05/23235

 

 

 

APPELANTS

 

Monsieur Jean-Marie X...

 

Société MUTUELLE D’ASSURANCE DU CORPS DE SANTE FRANCAIS agissant en la personne de son Directeur

 

INTIMES

 

Monsieur Jérôme Z...

 

S.A. ARTOIS GESTION ABCIAS prise en la personne de ses représentants légaux

 

Syndicat des coprop. IMMEUBLE 11 RUE FENELON A PARIS 10EME représenté par son Syndic le Cabinet ROUMILHAC lui-même pris en la personne de ses représentants légaux

 

S.A. LA SUISSE ACCIDENTS prise en la personne de ses représentants légaux

 

Société MUTUALISTE DU PERSONNEL DE LA POLICE NATIONALE prise en la personne de ses représentants légaux

 

CPAM DE PARIS prise en la personne de ses représentants légaux

 

 

COMPOSITION DE LA COUR :

Non reproduite

 

 

ARRÊT :

- réputé contradictoire

 

*********

 

 

Le 07 septembre 2000, Monsieur Jérôme Z..., locataire d’un logement situé au quatrième étage d’un immeuble en copropriété édifié au numéro 10 de la rue Fénelon, dans le dixième arrondissement de Paris, qui lui a été donné à bail en novembre 1998 par Monsieur Jean-Marie X..., son propriétaire, a fait une chute alors qu’il rabattait les volets de ce logement et que le garde-corps métallique de la fenêtre a cédé.

 

Monsieur X... avait souscrit un contrat d’assurance auprès de la Société Mutuelle d’Assurance du Corps de Santé Français (MACSF).

 

Le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble qui avait, à l’époque des faits, pour syndic la Société Anonyme ARTOIS GESTION ABCIAS, avait, de son côté, souscrit un contrat d’assurance auprès de la Société Anonyme Suisse Accidents garantissant sa responsabilité civile.

 

Le 25 juillet 2003, Monsieur Benoît F..., expert architecte commis par ordonnance de référé pour donner son avis sur l’origine des désordres, a déposé son rapport.

 

Par jugement rendu le 04 octobre 2005, le tribunal de grande instance de Paris, à la fois saisi par Monsieur Z... d’une action en responsabilité dirigée à l’encontre du propriétaire, du syndicat des copropriétaires de l’immeuble et de leurs assureurs et d’une action en garantie dirigée par le propriétaire et son assureur à l’encontre de la personne du syndic, a, après jonction de ces procédures, avec exécution provisoire :

 

- déclaré Monsieur X... entièrement responsable des conséquences dommageables de l’accident,

- débouté Monsieur Z... de l’intégralité de ses demandes à l’encontre du syndicat des copropriétaires, de son assureur et du syndic,

- ordonné avant dire droit une expertise médicale aux frais avancés de la victime,

- condamné Monsieur X... et la Société MACSF à payer à Monsieur Z... une provision de 6.000 euros outre une somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

- sursis à statuer sur le surplus des demandes en réservant les dépens.

 

 

Monsieur Jean-Marie X... et la Mutuelle d’Assurance du Corps de Santé Français (MACSF) ont relevé appel de ce jugement et, par conclusions signifiées le 15 février 2008, ils demandent à la cour, au visa des articles 14 et 18 de la loi du 10 juillet 1965, 1384, 1382 et 1383 du code civil :

 

- de déclarer recevable leur appel et de réformer le jugement déféré ,

 

- à titre principal de débouter “les demandeurs” de l’ensemble de leurs prétentions à leur encontre en considérant que les garde-corps de l’immeuble constituent une partie commune ,

 

- s’il apparaissait qu’ils constituent une partie privative de chaque lot, de débouter “les demandeurs” de l’ensemble de leurs prétentions à leur encontre en considérant que Monsieur X... ne peut être tenu pour responsable de l’accident survenu ,

 

- à titre subsidiaire, s’il apparaissait que “la responsabilité du docteur X... et de son assureur” devait être retenue sur le fondement des articles 1719 et suivants du code civil, de limiter la responsabilité de Monsieur X... ,

 

- en toute hypothèse, de considérer que le Syndicat des copropriétaires, la Société SWISSLIFE et le Cabinet ARTOIS GESTION doivent les garantir solidairement de toutes condamnations pour quelque cause que ce soit liées à l’accident aux motifs que “le Syndicat des copropriétaires représenté par son syndic, le cabinet ROUMILHAC,” a manqué à son obligation d’entretien en ne réalisant pas les travaux de ravalement de la façade cour de l’immeuble conformément à l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965 et, par ailleurs, que le Cabinet ARTOIS GESTION a manqué à ses obligations de conseil et méconnu les dispositions de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 en n’attirant pas l’attention de la copropriété sur la nécessité de faire effectuer les travaux de ravalement de la façade côté cour de l’immeuble, en ne faisant pas appliquer les dispositions de l’assemblée générale de la copropriété qui s’est tenue le 06 juin 1990 et en ne mettant à l’ordre du jour d’aucune assemblée de copropriété le vote de ces travaux de ravalement,

 

- de débouter les parties du surplus de leurs demandes à leur encontre ,

 

- de condamner “solidairement” le Syndicat des copropriétaires, son assureur et le Cabinet ARTOIS GESTION au paiement d’une somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter tous les dépens.

 

 

Par dernières conclusions signifiées le 04 décembre 2006, Monsieur Jérôme Z... demande à la cour :

 

- de déclarer l’appel recevable mais de débouter les appelants de leurs entières demandes en confirmant la décision entreprise du chef du principe de responsabilité du bailleur, de l’expertise ordonnée, et du chef de l’indemnité allouée au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

 

- de le déclarer recevable et fondé en son appel incident en réformant le jugement sur le montant de la provision et en condamnant in solidum Monsieur X... et son assureur à lui verser une provision de 80.000 euros à valoir sur l’indemnisation de son préjudice,

 

- de condamner in solidum ces derniers à lui verser une somme supplémentaire de 2.000 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et à supporter les dépens d’appel.

 

 

Par dernières conclusions signifiées le 19 octobre 2006, le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé au numéro 11 de la rue Fénelon à Paris ( 10ème) pris en la personne de son Syndic en exercice, le Cabinet ROUMILHAC, demande à la cour :

 

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a mis hors de cause,

 

- infiniment subsidiairement, de condamner “solidairement” Monsieur X..., la MACSF et le Cabinet ARTOIS GESTION ABCIAS à le relever et garantir de toutes condamnations pécuniaires qui pourraient être prononcées à son encontre,

 

- en tout état de cause, de lui donner acte de ce qu’il sollicite le débouté de tous moyens et prétentions contraires à ses écritures et de toutes demandes additionnelles ultérieures,

 

- de condamner solidairement Monsieur X... et la MACSF à lui payer une somme de 3.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance et d’appel.

 

 

Par dernières conclusions signifiées le 25 septembre 2006, la Société Anonyme SWISSLIFE Assurance de Biens (nouvelle dénomination de la Société SUISSE Accidents) demande à la cour :

 

- de déclarer les appelants mal fondés en leur appel et de les en débouter en les déboutant de toutes demandes formées à son encontre et en prononçant sa mise hors de cause,

 

- de condamner les appelants à lui verser une somme de 5.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance et d’appel.

 

 

Par dernières conclusions signifiées le 20 septembre 2006, la Société Anonyme ARTOIS GESTION ABCIAS demande à la cour, sans développer un quelconque moyen, de :

 

- “ déclarer l’appel nul et de nul effet et subsidiairement non recevable,

- subsidiairement, d’adopter les motifs des premiers juges,

- mettre l’appellation à néant : ordonner que ce dont est appel sortira effet pour être exécuté,

- condamner les appelants aux entiers dépens de première instance et d’appel (...),

- sous toutes réserves, notamment de préciser et développer les moyens de nullité et fins de non- recevoir opposées à l’appel, ainsi que tous les moyens précédemment invoqués comme aussi d’appeler incidemment et éventuellement de la décision entreprise, de former une demande additionnelle reconventionnelle ou autre et de changer ou modifier ou compléter lesdites conclusions en tout état de cause “.

 

 

Par dernières conclusions signifiées le 30 avril 2007, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Paris demande à la cour :

 

- de débouter Monsieur X... et la MACSF de leur appel, de lui donner acte de ce qu’elle s’en rapporte sur l’appel incident de Monsieur Z... et de confirmer le jugement entrepris,

- de la recevoir en sa demande additionnelle,

- de condamner Monsieur X... et la MACSF à lui verser une provision de 97.882,81 euros,

- de les condamner à lui verser une somme de 1.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d’appel.

 

 

La Société Mutualiste du Personnel de la Police Nationale à qui le Syndicat des copropriétaires a dénoncé ( à personne habilitée) ses conclusions du 19 octobre 2006 , et, par ailleurs, assignée (à personne habilitée) par les appelants le 06 juin 2007, n’a pas constitué avoué.

 

L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 février 2008.

 

 

SUR CE, LA COUR :

 

 

Sur les demandes présentées par la Société Anonyme ARTOIS GESTION ABCSIAS :

 

Considérant que cette Société ne développe aucun moyen au soutien de ses demandes aux fins de nullité ou d’irrecevabilité de l’appel et ne s’explique pas sur les fins de non recevoir et moyens tels que présentés ;

Que, méconnaissant les dispositions de l’article 15 du code de procédure civile, elle ne met pas la cour à même d’en débattre ;

Qu’elle n’étaye d’ailleurs pas davantage, par la présentation de moyens de droit, sa demande subsidiaire de confirmation du jugement déféré ;

 

 

Sur les responsabilités encourues :

 

Considérant que dans son rapport clos le 25 juillet 2003, l’expert judiciairement commis pour rechercher l’origine du descellement affirme, sans être contesté, à partir de l’examen des attaches scellées et restées en place du garde-corps litigieux - lequel, conservé pour les besoins de l’enquête policière, se serait brisé en plusieurs morceaux - que les soudures de scellement étaient corrodées à cœur, avec des peintures successives sur les parties corrodées, et que la simple pression de Monsieur Z... sur ce garde-corps a provoqué son arrachement et l’accident ;

 

Considérant qu’au soutien de sa contestation du jugement qui a considéré que le garde-corps litigieux constituait une partie privative de l’immeuble et que sa responsabilité de gardien était pleinement engagée, Monsieur X..., propriétaire des lieux, ne peut valablement se prévaloir des usages, de décisions de justice étrangères au présent litige, de l’ambiguïté des termes du règlement de copropriété et de la présomption de communauté ressortant de l’article 3 de la loi du 10 juillet 1965 , dès lors qu’il s’évince de l’article 2 de ce règlement de copropriété, rédigé en des termes clairs et précis, que “ ... les fenêtres et porte-fenêtres, les persiennes et volets, les appuis de fenêtre...” sont expressément désignés comme étant des parties privatives et que l’article 13 de ce même règlement consacré aux charges générales et à l’entretien, la réparation et la reconstruction des bâtiments, vise “les frais de ravalement des façades auxquels s’ajouteront, mais seulement lorsqu’ils seront la conséquence d’un ravalement général, les frais de peinture et de réparation des extérieurs des fenêtres, des persiennes, des garde-corps et fenêtres de chaque appartement, bien que ces choses soient parties privatives” ;

 

Que Monsieur X... était tenu, en sa qualité de bailleur, de satisfaire aux obligations posées par les articles 1719 à 1721 du code civil et d’assurer l’entretien et la conservation du bien loué s’étendant, au cas particulier, aux garde-corps, ainsi que l’a jugé à bon droit le tribunal ;

 

Que, propriétaire de ce garde-corps dont il ne démontre ni n’affirme qu’il en avait transféré la garde, il ne peut se prévaloir du moyen inopérant tiré de son absence de faute pour échapper aux conséquences de la responsabilité de plein droit qui pèse sur le gardien d’une chose et découle de l’application de l’article 1384 alinéa 1er du code civil ;

 

Que le jugement qui a déclaré Monsieur X... responsable de l’accident et tenu d’en indemniser les conséquences dommageables sera, par conséquent, confirmé ;

 

Que les moyens que Monsieur X... développe cumulativement à titre subsidiaire ou “en toute hypothèse” pour voir limiter sa responsabilité ou voir le Syndicat des copropriétaires, son assureur et le syndic en exercice au moment de l’accident condamnés à le garantir des condamnations prononcées à son encontre ne sauraient prospérer ;

 

Que le syndic n’est, en effet, débiteur d’aucune obligation de conseil personnel à l’égard des propriétaires d’un immeuble en copropriété portant sur leurs parties privatives; que s’il entre dans la mission du syndic d’informer de la nécessité d’exécuter des travaux de réparation et d’entretien, ce devoir d’information et de mise en garde (auquel la Société ARTOIS GESTION ABCIAS avait, au demeurant, satisfait en soumettant au syndicat des copropriétaires une résolution, non suivie d’effet, portant sur le ravalement de l’immeuble) cette obligation n’a pour seul objet que les parties communes et pour seul créancier le Syndicat des copropriétaires ;

 

Que le caractère privatif de ce garde-corps dont le propriétaire devait assurer le bon entretien afin d’assurer la sécurité des personnes exclut l’engagement de la responsabilité du Syndicat des copropriétaires ; que le fait que le Syndicat des copropriétaires ait tardé à entreprendre le ravalement de la façade ne dispensait pas Monsieur X... de garantir son locataire du vice de la chose louée mis en évidence par l’expert ;

 

Que Monsieur X... sera donc débouté tant de ses prétentions subsidiaires que de sa demande de garantie ;

 

Que la demande subsidiaire de la Société SWISSLIFE Assurances de biens portant sur l’étendue de sa garantie devient, par voie de conséquence, sans objet ;

 

 

Sur les demandes de provision :

 

 

Considérant qu’il résulte du rapport d’expertise médical établi le 14 mars 2006 par le docteur G... commis par les premiers juges qu’à la suite de l’accident, Monsieur Jérôme Z..., fonctionnaire de police âgé de 25 ans au moment de l’accident, a présenté un pneumothorax complet droit et une volumineuse contusion pulmonaire droite, des fractures des corps vertébraux et des arcs postérieurs de D 12 et L 1, des fractures des apophyses transverses gauches de L1 et L2, des fractures des deux ailerons sacrés avec déplacement du sacrum, des fractures des branches ilio et ischio-pubiennes gauches, outre un hématome retro peritonéal et une entorse grave des deux chevilles ;

 

Que l’expert retient trois périodes d’ITT ou d’ITP jusqu’au 04 juillet 2004 et une consolidation de son état le 05 février 2005, décrit des séquelles justifiant un taux d’IPP de 25 %, cote à 5,5 / 7 les souffrances endurées, à 3 / 7 son préjudice esthétique et retient un préjudice d’agrément et un préjudice professionnel ;

 

Que ces éléments conduisent à considérer que Monsieur Z... est fondé en sa demande de provision et à lui allouer la somme complémentaire de 40.000 euros ;

 

Considérant, s’agissant de la demande de provision formée par l’organisme social, qu’en considération du relevé de ses prestations daté du 09 décembre 2005 et versé aux débats, il sera alloué à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Paris la somme de 97.755,95 euros ;

 

 

Sur les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile :

 

Considérant qu’il est conforme à l’équité de condamner sur ce fondement Monsieur X... et son assureur à verser à Monsieur Z... une somme complémentaire de 1.500 euros et à verser, par ailleurs, au Syndicat des copropriétaires, à son assureur et à la CPAM de Paris une somme de 1.000 euros au profit de chacun ;

 

Que l’équité conduit en revanche à débouter Monsieur X... et la MACSF de leurs prétentions de ce chef ;

Que Monsieur X... et la MACSF qui succombent supporteront les dépens d’appel ;

 

 

PAR CES MOTIFS :

 

 

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

 

Y ajoutant :

 

Rejette la demande de Monsieur Jean-Marie X... et de la Société Mutuelle d’Assurance du Corps de Santé Français (MACSF) tendant à se voir garantis par le Syndicat des copropriétaires du 11 de la rue Fénelon, dans le dixième arrondissement de Paris, des condamnations prononcées à leur encontre ;

 

Condamne in solidum Monsieur Jean-Marie X... et la Société MACSF à verser :

 

- à Monsieur Jérôme Z... une provision complémentaire de 40.000 euros à valoir sur l’indemnisation de son préjudice corporel ainsi qu’une somme complémentaire de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

 

- à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Paris une provision de 97.755,95 euros à valoir sur sa créance définitive,

 

- au Syndicat des copropriétaires du 11 de la rue Fénelon à Paris 10ème représenté par son syndic en exercice, à la Société SWISSLIFE Assurances de biens et à la CPAM de Paris une somme de 1.000 euros au profit de chacun en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

 

Déboute Monsieur Jean-Marie X... et la Société MACSF de leur demande au titre de leurs frais non répétibles ;

 

Condamne Monsieur Jean-Marie X... et la Société MACSF aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

 

 

 

Commentaires et observations pratiques :

 

 

Compte tenu des arguments qui lui ont été présentés, la Cour d’appel a rendu une décision juridiquement incontestable.

Elle heurte néanmoins le bon sens élémentaire.

 

Il est, dans la pratique, absurde que les garde corps et d’autres éléments des balcons soient déclarés parties privatives dans les règlements de copropriété, et plus absurde encore que les copropriétaires aient la responsabilité de leur entretien.

D’une part, les garde-corps et les autres parties des balcons sont des éléments constitutifs de la façade qui est partie commune.

D’autre part, ces éléments sont le plus souvent inaccessibles aux copropriétaires. Ils n’ont pas la possibilité de constater notamment la dégradation des points d’accrochage des garde-corps. En cas de nécessité, la réparation d’un unique garde-corps ou, a fortiori, d’une sous-face de balcon au 6e étage peut exiger l’installation d’un échafaudage !

En l’espèce, l’expert a relevé : « que les soudures de scellement étaient corrodées à cœur, avec des peintures successives sur les parties corrodées ». Le copropriétaire ne pouvait pas s’en rendre compte et il aurait fallu vérifier si les « peinture successives » avaient été réalisées par le copropriétaire ou par le syndicat dans le cadre d’un ravalement portant sur l’ensemble de la façade, comme c’est le cas fréquemment.

Il est donc évident qu’à l’occasion de chaque ravalement périodique, le syndicat, sur les conseils du syndic, se doit de faire procéder à la vérification de l’état des balcons et des garde-corps et de faire exécuter toutes les réparations nécessaires. En l’état des textes, il est possible d’en laisser la charge financière aux copropriétaires des lots intéressés. Dans la pratique, il est toujours  préférable de faire masse de tous les frais de ravalement et de les répartir au prorata dans tantièmes généraux. C’est à ce prix que la sécurité publique et celle des occupants de l’immeuble sont pleinement assurée. Tel est bien le but de l’opération.

Toujours en l’état des textes, les décisions nécessaires peuvent, - et doivent, à notre -, être prises par l’assemblée générale.

 

Les gestionnaires d'immeubles s'engagent à sensibiliser l'ensemble des propriétaires et copropriétaires des immeubles dont ils ont la charge à la nécessité de faire prévaloir la pérennité de leur patrimoine sur des considérations économiques à court terme.

 

Rappelons à cet égard l’existence du Protocole sur le ravalement de la Ville de Paris qui, dans sa dernière version du 10 novembre 2000,  énonce notamment :

« - Le ravalement ne se réduit pas à un simple rajeunissement d'aspect. Pour intervenir correctement et garantir la pérennité des travaux accomplis, il importe de bien connaître le bâtiment et de comprendre le caractère de sa façade et des éléments qui la constituent.

Si l'opération de ravalement ou d'entretien ne peut être l'occasion d'une remise en cause d'une construction ou de son évolution, elle doit cependant inciter chacun à prendre conscience de l'intérêt qui s'attache à mettre en œuvre tout ce qui peut concourir à l'amélioration du bâtiment concerné. »

 

« - Dans l'établissement de son diagnostic, l'architecte et/ou le maître d'œuvre spécialisé prend en compte la qualité architecturale et le caractère d'authenticité des façades et des autres éléments de l'immeuble à remettre en état, qu'il s'agisse de parties privatives (volets, persiennes, fenêtres, …) ou de parties communes. »

 

« - Tous les travaux d'entretien ne relèvent pas du contrôle de l'administration ; pour être menés à bien, beaucoup nécessitent seulement le respect d'un certain nombre de "bons usages".

Pour favoriser l'exécution des travaux nécessaires ou indispensables à la pérennité de l'immeuble, le syndic sensibilisera la copropriété à son devoir d'entretien et à l'intérêt de valoriser son patrimoine, en l'encourageant à constituer une provision pour faciliter le vote des travaux en assemblée générale. »

 

Il s’agissait ici d’un immeuble parisien qui entrait donc dans le champ d’application du Protocole. Si le syndic de l’époque appartenait à l’une des organisations signataires, le copropriétaire déclaré responsable aurait pu étoffer son argumentation. Au demeurant ce document remarquable aurait pu être invoqué même dans le cas contraire.

La Cour d’appel aurait eu l’occasion de statuer sur le périmètre de l’obligation de conseil du syndic.

 

 

 

 

Mise à jour

01/02/2009