00043608 CHARTE Ne sont
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Expropriation d’une parcelle commune Parcelle
expropriée assiette d’un lot transitoire Indemnité correspondant à la valeur du terrain Indemnité destinée au syndicat des copropriétaires
(oui) Indemnisation du droit à construire Nécessité d’une demande distincte du promoteur Cour d’appel de
Chambéry 10 juin 2008 Décision
attaquée : TGI
Albertville 28 novembre 2006 N° de RG:
07/00008 Infirmation
partielle, APPELANT SYNDICAT DES
COPROPRIETAIRES DE L’IMMEUBLE “DOMAINE SAINT MARTIN”, dont le siège est sis
73210 AIME, pris en la personne de son représentant légal, INTIMEE SCI SAINT MARTIN,
dont le siège est sis à Villette, 73210 AIME, prise en la personne de son
gérant en exercice, Vu le jugement en
date du 28 novembre 2006 rendu contradictoirement par le tribunal de grande
instance d’Albertville qui a dit que l’indemnité d’expropriation de 72.254,50
€, actuellement consignée à l’issue d’une procédure d’expropriation par la
commune d’Aime à la Caisse des dépôts et Consignations et ce, en exécution
d’un arrêt confirmatif rendu le 10 mars 2004 par la Cour d’appel de Chambéry,
doit être versée entre les mains de la SCI Saint-Martin, qui a débouté, par
voie de conséquence, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble “Domaine
Saint-Martin” de l’ensemble de ses demandes et qui a déclaré irrecevable la
demande reconventionnelle tendant à voir judiciairement constater, avec
toutes conséquences de droit, la scission de la copropriété en condamnant le
syndicat des copropriétaires à verser à la SCI Saint-Martin la somme de 1.000
€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ; Vu l’appel
interjeté le 3 janvier 2007 par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble
“Domaine Saint-Martin”à l’encontre de ce jugement et ses dernières conclusions
en date du 5 mai 2008, auxquelles il convient de se référer pour un plus
ample exposé des faits, prétentions et moyens et par lesquelles il demande à
la Cour : - d’infirmer le
jugement déféré en toutes ses dispositions ; - de constater
qu’il est seul propriétaire du sol de l’ensemble de la parcelle B no 2298, et
en tout cas à la date où a été publiée au 1er bureau des hypothèques de
Chambéry l’ordonnance d’expropriation du 8 mars 2000 publiée le 24 février
2001 ; - de constater
qu’à la date de la saisine du juge de l’expropriation, aucun litige
n’existait et aucune action à l’encontre du syndicat des copropriétaires
n’avait été engagée pour revendiquer des droits éventuels sur une indemnité
qui aurait été perçue à tort ou sur une revendication rétroactive de partie
de parcelle ; - de constater
enfin que la SCI Saint-Martin a reconnu la justesse des réclamations du
syndicat des copropriétaires dans sa lettre du 28 mars 2001 où elle exposait
au contraire qu’elle était seule titulaire de droits à construire qui
méritaient une indemnisation distincte qu’elle n’a jamais demandée ; - de constater que
le règlement de copropriété de l’immeuble “Domaine Saint-Martin” prévoit que
le sol commun est bien intégralement une partie commune ; - de constater que
la privation du sol commun constituant une partie commune, doit revenir pour
son indemnisation uniquement au syndicat des copropriétaires ; - de constater,
dès lors, que la SCI ne peut pas être propriétaire du terrain et qu’en tout
cas, elle ne l’était pas à la date de l’ordonnance d’expropriation du 8 mars
2000, ce qui a été rappelé à la commune d’Aime dans le rapport du commissaire
enquêteur en date du 14 décembre 1999 ; - de constater que
la parcelle expropriée l’a bien été au préjudice du syndicat des copropriétaires
d’après l’état hypothécaire y figurant et au bénéfice de la commune d’Aime ; - de constater, à
titre subsidiaire, que la clause litigieuse figure à l’article 2a du
règlement de copropriété et doit être considérée comme abusive et léonine et
à tout le moins comme non écrite au visa des articles 43, 16-2 et 16-1 de la
loi du 10 juillet 1965 ; - de dire et juger
que l’indemnité actuellement consignée par la commune d’Aime à la Caisse dès
dépôts et consignations, à hauteur de 72.254,50 €, en exécution de l’arrêt du
10 mars 2004, doit revenir au syndicat des copropriétaires “Domaine
Saint-Martin” dans son intégralité ; - de condamner la
SCI “Domaine Saint-Martin” à lui verser les intérêts de retard sur 72.254,50
€ au taux de 10 % l’an, ou au taux légal majoré ou enfin au taux légal, avec
capitalisation pour chaque année entière échue et pour la première fois le 14
juin 2003, en application de l’article 1154 du Code civil ; - de condamner la
SCI “Domaine Saint-Martin” à lui régler la somme de 25.000 € à titre de
dommages et intérêts ; - de confirmer le
jugement rendu en ce qu’il a déclaré irrecevables les demandes
reconventionnelles de la SCI “Domaine Saint-Martin”, relatives à la scission
de la copropriété comme à une indemnité pour résistance abusive et ce en
raison de l’absence de lien suffisant de connexité avec la demande principale
en répartition de l’indemnité d’expropriation ; - de lui donner
acte de son accord pour signer la scission à condition de signer
parallèlement un protocole d’accord avec la SCI afin de terminer les travaux
de finition ; - de condamner la
SCI “Domaine Saint-Martin” à lui verser une indemnité de 5.000 € sur le
fondement de l’article 700 du Code de procédure civile au titre des deux
instances ; Vu les dernières
conclusions en date du 15 avril 2008, auxquelles il convient de se référer
pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens et par lesquelles
la SCI Saint-Martin (la SCI) demande principalement à la Cour de dire et
juger que l’indemnité d’expropriation de 72.254,50 €, actuellement consignée
par la commune d’Aime, doit lui revenir en totalité et de condamner le
syndicat des copropriétaires à lui verser les intérêts de retard au taux
majoré capitalisé, outre une indemnité de 6.000 € sur le fondement de
l’article 700 du Code de procédure civile ; Vu la clôture le 6
mai 2008 de la mise en état de la procédure ; MOTIFS DE LA
DÉCISION : Attendu que la
recevabilité de l’appel interjeté par le syndicat des copropriétaires de
l’immeuble “Domaine Saint-Martin” n’est ni contestée, ni contestable ; Attendu qu’il résulte
des écritures prises de part et d’autre en cause d’appel et de l’examen des
pièces soumises à la contradiction, qu’en vue d’aménager les abords de la
basilique, la commune d’Aime a décidé d’acquérir la parcelle cadastrée
section B n° 2537, d’une superficie de 1 030 m², provenant de la division
d’une ancienne parcelle cadastrée n° 2298 et dépendant d’un ensemble
immobilier en copropriété dénommé “Le Domaine de Saint-Martin” ; Que par arrêt du
10 mars 2004, la chambre des expropriations de la Cour de ce siège a confirmé
le jugement rendu le 23 janvier 2003 par la juridiction départementale de
l’expropriation en ce qu’il a dit que la commune devra payer à qui il
appartiendra, l’indemnité totale de 72.254,50 € ; Que la Cour a pris
soin d’ajouter, au visa de l’article L. 13-8 du Code de l’expropriation,
qu’il appartient aux parties de se pourvoir devant qui de droit pour qu’il
soit statué sur la contestation sérieuse qui les oppose, concernant la nature
juridique de la parcelle expropriée ainsi que les droits respectifs de la SCI
Saint-Martin et du syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier
“Domaine Saint-Martin” sur cette parcelle et sur l’indemnité globale
d’expropriation ; Attendu qu’il
résulte tant des plans produits par les parties que du règlement de
copropriété, que la parcelle expropriée n° 2537 est une partie de la parcelle
n° 2298 qui constitue l’assiette du syndicat des copropriétaires ; Que les parties
communes sont en effet définies au règlement de copropriété du 18 mars 1992
comme comprenant notamment la totalité du sol, c’est-à-dire l’ensemble du
terrain, en ce compris le sol des parties construites des cours et des
jardins ainsi que les emplacements de stationnement non privatifs ; Qu’il est en outre
précisé que les parties communes sont l’objet d’une propriété indivise entre
l’ensemble des copropriétaires ; Que même si
l’expropriation ne concerne que les lots réservés n° 500 et 600 dans leur
totalité, et non les bâtiments déjà réalisés, il convient de relever que ces
lots figurent dans l’état descriptif de division annexé au règlement de
copropriété et comprennent chacun des millièmes du sol et des parties
communes générales ; Qu’il s’ensuit que
la parcelle expropriée était la propriété du syndicat des copropriétaires
bien avant que ne soit rendue, le 8 mars 2000, l’ordonnance d’expropriation ; Qu’il importe peu
que l’article 2 a) du règlement de copropriété indique que les fractions de
terrain et des choses communes afférentes aux parties non construites
resteront la propriété pleine et entière de la SCI, dès lors que ces lots no
500 et 600 sont compris dans l’état descriptif de division, lequel n’a pas
été ultérieurement modifié lorsque la SCI a tacitement renoncé à la
construction des bâtiments prévus sur ces lots, suite aux difficultés de
commercialisation qu’elle a rencontrées sur la première tranche ; Que l’indemnité
d’expropriation doit donc revenir au syndicat des copropriétaires de
l’immeuble “Domaine Saint-Martin” ; Attendu que la
demande reconventionnelle présentée par la SCI Saint-Martin tendant à ce que
la Cour dise que la scission de la copropriété est intervenue conformément à
l’assemblée générale du 15 novembre 2000 doit être rejetée faute de lien
suffisant par rapport au prétentions originaires ; Attendu qu’il
convient de condamner la SCI Saint-Martin, qui succombe, à verser au syndicat
des copropriétaires de l’immeuble “Domaine Saint-Martin”, la somme de 2.000 €
sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et à supporter
les entiers dépens ; PAR CES MOTIFS La Cour, Statuant
publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la
loi, DECLARE recevable
l’appel interjeté par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble “Domaine
Saint-Martin” ; AU FOND REFORME le
jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a déclaré
irrecevable la demande reconventionnelle tendant à voir judiciairement
constater, avec toutes conséquences de droit, la scission de la copropriété ; STATUANT A NOUVEAU
POUR LE SURPLUS DIT que
l’indemnité d’expropriation de 72.254,50 € doit revenir au syndicat des
copropriétaires de l’immeuble “Domaine Saint-Martin” ; CONDAMNE la SCI
Saint-Martin à verser au syndicat des copropriétaires de l’immeuble “Domaine
Saint-Martin” les intérêts au taux légal capitalisés à compter du 14 juin
2003 sur cette somme de 72.254,50 € ; DEBOUTE le
syndicat des copropriétaires de l’immeuble “Domaine Saint-Martin” du surplus
de ses demandes ; CONDAMNE la SCI
Saint-Martin à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble “Domaine
Saint-Martin” la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code
de procédure civile au titre des frais de première instance et d’appel ; CONDAMNE la SCI
Saint-Martin aux dépens de première instance et d’appel et, pour ces
derniers, autorise, en tant que de besoin, la Société Civile Professionnelle
FILLARD-COCHET BARBUAT, titulaire d’un office d’avoué, à en recouvrer le
montant aux conditions et formes de l’article 699 du Code de procédure civile
; commentaires L’arrêt de la Cour
d’appel de Chambéry nous présente une mise en œuvre très judicieuse de l’un
des mécanismes les plus modernes du régime de la copropriété. Moderne ?
Oui, dans la mesure où la jurisprudence ne l’a « reçu » que très
récemment. Pour le reste, il s’agit tout simplement de la distinction à faire
entre un terrain, son dessus et son dessous. On trouve cette distinction dans
les droits les plus anciens, de même que la notion de volume d’espace en tant
que bien immobilier. La SCI Saint
Martin a réalisé un ensemble immobilier en copropriété, le Domaine Saint
Martin, comportant plusieurs bâtiments sur un tènement [1]. Après avoir construit la première
tranche, elle était demeurée propriétaire des lots 500 et 600 constitués
chacun par un droit de construire un nouveau bâtiment sur une parcelle
déterminée. Il s’agissait donc de « lots transitoires ». L’arrêt
précise que « la SCI a tacitement renoncé à la construction des
bâtiments prévus sur ces lots, suite aux difficultés de commercialisation
qu’elle a rencontrées sur la première tranche », et aussi que
« l’article 2 a) du règlement de copropriété indique que les fractions
de terrain et des choses communes afférentes aux parties non construites
resteront la propriété pleine et entière de la SCI ». Ce sont
précisément ces deux parcelles que la commune a décidé d’exproprier en vue
d’aménager les abords de la basilique romane d’Aime. Par arrêt du 10 mars
2004, la chambre des expropriations de la Cour d’appel de Chambéry a confirmé
le jugement rendu le 23 janvier 2003 par la juridiction départementale de
l’expropriation fixant à 72.254,50 € l’indemnité d’expropriation. Cette
juridiction, ayant eu connaissance du litige opposant la SCI au syndicat des
copropriétaires au sujet du sort final de cette indemnité, a eu la sagesse de
juger que « la commune devra payer à qui il appartiendra ». Les
fonds ont donc été consignés. L’arrêt ci dessus a eu pour objet de déterminer
le bénéficiaire de cette indemnité. La SCI se
présentait comme seule bénéficiaire . Elle avait obtenu satisfaction
devant le TGI d’Albertville. Elle invoquait principalement l’article 2 a) du
règlement de copropriété rappelé ci-dessus. Il est vrai que cette clause
visait bien des fractions de terrain. Il est non moins
vrai que, par ailleurs, les parties communes étaient définies au règlement de
copropriété du 18 mars 1992 comme comprenant notamment « la totalité
du sol, c’est-à-dire l’ensemble du terrain, en ce compris le sol des
parties construites des cours et des jardins ainsi que les emplacements de
stationnement non privatifs ». Il comportait
ainsi une contradiction interne. La Cour d’appel a fort justement tranché en
faveur du syndicat des copropriétaires. Devait-on parler
d’une « clause abusive et léonine » à propos de cet article 2
a ? Peut-être dans la mesure où le règlement de copropriété a été établi
par la SCI ou du moins à sa requête. Mais il semble préférable de songer à
une bévue du rédacteur effectif de l’acte. Il faut rappeler que la notion de
lot transitoire n’a été définitivement consacrée qu’en 1989 [2] . Encore maintenant, cette notion fondée
sur l’existence du droit de superficie reste mal connue. Elle est
simple : sur une parcelle de terrain peuvent coexister deux ou trois
propriétaires différents : - le propriétaire
du terrain réduit à la surface du sol naturel - le propriétaire
tréfoncier du dessous (sous-sol et tréfonds) - le propriétaire
superficiaire du dessus dont le droit de superficie porte sur le volume
d’espace supérieur considéré comme un bien immobilier dès lors qu’il peut
être défini par ses coordonnées cadastrales mais également des cotes
altimétriques [3] fixant son plafond. Le propriétaire d’un lot transitoire a le droit de construire un immeuble aussi bien dans le volume inférieur du terrain (fondations, caves et parkings) que dans son volume d’espace supérieur. Mais il n’est pas propriétaire du terrain. Dans le cas d’une « construction en copropriété », le terrain est quasiment toujours une partie commune indivise entre tous les copropriétaires. La Cour d’appel ne dit rien d’autre ici, rappelant en outre que l’expropriation ne portait que sur le terrain. Voir sur le lot transitoire Il reste néanmoins que l’expropriation d’un terrain se traduit inéluctablement par un transfert de la propriété du dessus et du dessous. Si la SCI avait réalisé la construction de la seconde tranche et conservé la propriété des nouvelles constructions, la commune aurait été dans l’obligation d’exproprier également les bâtiments et de payer l’indemnité correspondante. Faut-il alors considérer que le droit de construire non
encore exploité est dépourvue de valeur dans le cas d’une
expropriation ? Certainement pas. Dans son arrêt du 15 novembre 1989,
cité plus haut, la Cour de cassation a, bien au contraire, insisté sur la
valorisation d’un lot transitoire, - bien saisissable -, et elle a précisé en
1992 les critères à retenir pour une telle estimation [4]
Mais il est alors nécessaire que le titulaire du droit présente une
réclamation. Tel n’a pas été le cas en l’espèce. Il faut ajouter que les difficultés de commercialisation
évoquées par la SCI au sujet de la première tranche n’auraient pas plaidé en
sa faveur. Il est évident que le préjudice subi par l’exproprié est estimé en
fonction du bénéfice légitimement espéré. Une consolation pour la SCI : elle n’aura plus à
payer les charges communes générales pour deux lots dont elle ne pouvait rien
faire ! Car le propriétaire d’un lot transitoire est un copropriétaire
comme les autres. Il doit participer aux charges générales de la copropriété,
n’étant exonéré que de celles liées aux éléments d’équipement et services
communs qui sont pour ses lots sans utilité. |
Mise à jour |
[1] De nos jours, un tènement est constitué par un ensemble de parcelles contiguës
[2] Cass. civ. 3e 15/11/1989 Loyers et copropriété janvier 1990 n° 50
[3] Les cotes altimétriques (NGF) sont définies en fonction du « Niveau Général de la France ».
[4] Cass civ. 23/04/1992 Administrer janvier 1993 p. 32