Honoraires du syndic en cas de mutation de lot

Question N° : 84388  de M. Perrut Bernard

 

Ministère interrogé : emploi, cohésion sociale et logement

Ministère attributaire : emploi, cohésion sociale et logement

 

Réponse publiée au JO le : 06/06/2006 page : 5943

 

 

Texte de la QUESTION :

 

 

M. Bernard Perrut appelle l'attention de M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement sur les pratiques de certaines régies d'immeubles, par ailleurs syndic de copropriétés, qui à l'occasion de ventes de lots dans ces copropriétés prélèvent des frais dits « de mutation » qui semblent de montants disproportionnés, pour ne pas dire indus, tant auprès du vendeur que du nouvel acquéreur. Ces sommes baptisées « frais de mutation » et qui trouvent leur origine dans le seul changement de nom du propriétaire du lot cédé peuvent se monter à 350 euros pour le vendeur et à 150 euros pour l'acheteur : s'agissant particulièrement de l'acheteur qui n'est pas partie au contrat du syndic prévoyant ces frais, il lui demande quelle force obligataire il estime qu'ils peuvent avoir vis-à-vis d'une personne qui à la qualité de tiers vis-à-vis de la régie jusqu'après la vente et dès lors que ces frais ne sont pas stipulés comme une condition de ladite vente en l'absence par ailleurs de prestations particulières. Ces pratiques apparaissent d'autant plus contestables qu'elles viennent se cumuler avec celles consistant à ne pas établir de compte de sortie pour le vendeur et donc à éluder la restitution à celui-ci du solde créditeur de son compte de copropriété, établissements de compte qui, seuls pourraient le cas échéant justifier d'une prestation facturable. Il lui demande quelles mesures il entend prendre pour mettre un terme à ces dérives récurrentes qui n'ont à l'évidence pas de cause juridique et qui par le biais du droit d'opposition auprès du notaire conduisent, profitant de l'euphorie d'une aliénation, à spolier les parties à la vente.

 

 

Texte de la REPONSE :

 

 

En matière contractuelle, le principe est qu'un tiers ne peut se voir opposer les termes d'un contrat auquel il n'a pas été partie. Le « contrat de syndic » est une convention de mandat qui lie le syndic au syndicat de la copropriété et non pas le syndic à chacun des copropriétaires. Le syndic ne peut, au nom de son mandat, même si celui-ci prévoit la perception d'honoraires au titre des frais dits de « mutation », faire supporter une telle rémunération ni au vendeur ni à l'acquéreur d'un lot. Par contre, rien n'empêche un syndic, après autorisation de l'assemblée générale, de proposer à chaque copropriétaire des contrats personnels prévoyant la mise de ces honoraires de « mutation de lot » à la charge du seul vendeur et en ne les faisant donc plus figurer dans le contrat le liant au syndicat des copropriétaires.

 

 

COMMENTAIRES

 

La question et la réponse sont aussi navrantes l’une que l’autre.

M. Bernard Perrut, auteur de la question, écrit : « Ces sommes baptisées « frais de mutation » et qui trouvent leur origine dans le seul changement de nom du propriétaire du lot cédé ». Il s’est donc borné à reproduire un projet de question sans effectuer la moindre vérification quant à la réalité de ce qu’il avançait.

On peut sans doute critiquer les prétentions abusives de certains syndics, mais on ne peut nier l’importance des prestations assurées par les syndics à l’occasion d’une vente de lot et la responsabilité qui en découle.

C’est, au contraire, l’absence de prestations significatives qui justifie le rejet de toute prétention à faire supporter des frais de même type à l’acquéreur. Il est vrai qu’en vertu même de l’article 5 3° du décret du 17 mars 1967, l’acquéreur est destinataire privilégiée d’informations fournies par le syndic dans l’état daté. A ce titre les parties peuvent, à l’initiative du notaire rédacteur, convenir d’un partage des frais d’établissement de cet état.

Les autres allégations de M. Perrut, - éluder la restitution [au vendeur] du solde créditeur de son compte de copropriété -, sont de même nature.

 

De son côté, le Ministre rappelle que « le contrat de syndic est une convention de mandat qui lie le syndic au syndicat de la copropriété et non pas le syndic à chacun des copropriétaires. Le syndic ne peut, au nom de son mandat, même si celui-ci prévoit la perception d'honoraires au titre des frais dits de « mutation », faire supporter une telle rémunération ».

Bien entendu le contrat d’exploitation de chauffage présente les mêmes caractéristiques. Pourquoi donc les copropriétaires sont-ils tenus par la loi de contribuer à son paiement ? Parce que la facture est établie au nom du syndicat des copropriétaires qui a pour fonction de la payer, d’une part, et d’en répartir le coût entre les copropriétaires, chacun pour sa quote-part. Cette dépense devient une charge après approbation des comptes par l’assemblée générale.

 

Le Ministre fait observer que « rien n'empêche un syndic, après autorisation de l'assemblée générale, de proposer à chaque copropriétaire des contrats personnels prévoyant la mise de ces honoraires de « mutation de lot » à la charge du seul vendeur ». Cette suggestion laisse apparaître une profonde méconnaissance des difficultés pratiques de la copropriété. Il est bien évident qu’un important pourcentage des copropriétaires s’abstiendrait de souscrire à la proposition, ne serait-ce que par nonchalance. Il en résulterait en outre un alourdissement des tâches et du volume des archives dans les immeubles importants, pour s’en tenir à des observations de niveau modeste.

 

La bonne solution au problème évoqué est simple : c’est en qualité de mandataire du syndicat que le syndic établit l’état daté. Il est rémunéré directement par le syndicat dans les conditions prévues par le contrat de syndic. Comme il s’agit d’une dépense faite dans le seul intérêt du copropriétaire vendeur, elle est imputée immédiatement à celui-ci. Cette imputation individuelle est désormais admise, sous réserve de sa promulgation, par la modification de l’article 10-1 de la loi de 1965 opérée par la loi ENL. L’imputation immédiate est parfaitement conforme à la théorie de la « répartition immédiate des charges » établie par la Cour de cassation.

On peut noter seulement que, tant pour ces honoraires de mutation, que pour ceux de recouvrement, le nouveau texte ne fait aucune référence au contrat de syndic pour la fixation des montants et ne fixe pas la date d’exigibilité du paiement.

En l’état, la réforme ENL affirme la légitimité de la rémunération du syndic et son imputabilité au vendeur, mais présente des failles qui risquent de provoquer de nouvelles contestations.

 

 

 

 

 

Mise à jour

15/06/2006