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Réunion de tous les lots en une seule main

Disparition de plein droit de la copropriété (oui)

Vente simultanée des fractions

Application de la loi carrez  (non)

 

 

 

 

Cassation civile 3e  28 janvier 2009

Cour d’appel de Versailles du 16 juin 2006

N° de pourvoi: 06-19650

 

 

 

Donne acte à Mme X... du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre l’agence immobilière Crefimo ;

 

Sur le moyen unique :

 

Vu l’article 1er de la loi du 10 juillet 1965 ;

 

Attendu que la présente loi régit tout immeuble bâti ou groupe d’immeubles bâtis dont la propriété est répartie, entre plusieurs personnes, par lots comprenant chacun une partie privative et une quote-part de parties communes ;

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 16 juin 2006), que par acte du 23 mars 2000, Mme X... a consenti aux époux Y... une promesse unilatérale de vente portant sur deux pavillons mitoyens ; que l’acte authentique signé le 16 juin 2000 a mentionné la superficie conformément à l’article 46 modifié de la loi du 10 juillet 1965 soit 100, 98 m2 pour le lot n° 1 et 57, 24 m2 pour le lot n° 2 ; que contestant la superficie des lots vendus, M. Y... a assigné Mme X... en réduction du prix de vente ;

 

Attendu que pour accueillir la demande, l’arrêt retient qu’il est ainsi établi que “ l’ensemble immobilier “ objet de la vente est bien soumis au statut de la copropriété depuis 1979, qu’aucune modification n’a été effectuée malgré les transmissions du bien entre les mains d’une seule personne à partir de 1984 ; qu’il importe peu que les règles relatives à la gestion d’un immeuble en copropriété n’aient pas été respectées par les propriétaires successifs, cette situation n’étant pas de nature à faire disparaître purement et simplement la copropriété ;

 

Qu’en statuant ainsi, alors que la réunion de tous les lots entre les mains d’un même propriétaire avait entraîné de plein droit la disparition de la copropriété, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 16 juin 2006, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles, autrement composée ;

 

Condamne M. Y... aux dépens ;

 

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros, rejette la demande de M. Y... ;

 

 

 

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par Me Carbonnier, avocat aux Conseils pour Mme X....

 

 

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné Madame Régine X... à payer à Monsieur Y... la somme de 47. 299, 47, outre intérêts,

 

[Rappel des motifs retenus par l’arrêt d’appel attaqué]

 

AUX MOTIFS QUE “ selon l’article 46 de la loi susvisée, toute promesse unilatérale de vente ou d’achat, tout contrat réalisant ou constatant la vente d’un lot ou d’une fraction de lot mentionne la superficie de la partie privative de ce lot ou de cette fraction de lot. La nullité de l’acte peut être invoquée sur le fondement de l’absence de toute mention de superficie. La promesse unilatérale de vente signée le 23 mars 2000 porte sur un bien immobilier en copropriété composé de deux lots : lot n° 1 : un pavillon élevé sur sous-sol... l’accès au premier étage se fait par l’escalier commun aux lots 1 et 2, avec les cinquante / centièmes des parties communes générales,- lot n° 2 : un pavillon élevé sur terre-plein l’accès au premier étage se fait par l’escalier commun aux lots 1 et 2, avec les cinquante / centièmes des parties communes générales. Suit une nouvelle description des lots pour tenir compte des travaux effectués.

Cet acte mentionne expressément l’application de la loi du 18 décembre 1996 et attire l’attention des contractants sur la possibilité pour le bénéficiaire d’agir en réduction du prix de vente si la superficie réelle est inférieure de plus d’un vingtième à celle exprimée à l’acte. Il reproduit intégralement les dispositions de l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965 modifiée.

Enfin, il précise que l’ensemble immobilier a fait l’objet d’un état descriptif de division et d’un règlement de copropriété établi par acte authentique reçu par Maître A..., notaire à ASNIERES, le 8 février 1979 dont une copie authentique a été publiée au 2eme bureau des hypothèques de NANTERRE le 6 avril 1979, volume 2652 numéro 13.

L’acte authentique de vente du 16 juin 2000, reprend une description identique des biens vendus et mentionne à nouveau l’application de la loi du 18 décembre 1996 et l’existence d’un règlement de copropriété établi le 8 février 1979. Il indique que le vendeur a fourni la superficie de la partie privative des biens vendus à savoir lot n° 1 : 100, 98 m2, lot n° 2 : 57, 24 m2, que le vendeur déclare cette superficie sous sa propre responsabilité ayant été informé de l’intérêt de faire appel à un professionnel. Certes, en page 17 de l’acte authentique, il est mentionné que l’acquéreur... prendra les biens vendus dans l’état où ils se trouveront le jour de l’entrée en jouissance sans aucune garantie de la part du vendeur en raison... de la surface du terrain sur lequel l’immeuble est édifié... la différence en plus ou en moins s’il en existe entre la contenance indiquée et celle réelle devant faire le profit ou la perte de l’acquéreur sans aucun recours contre le vendeur mais cette disposition ne concerne pas la surface des biens vendus entrant dans le champ d’application des dispositions de la loi Carrez, ce qui est clairement indiqué. Régine X... ne peut se retrancher derrière cette clause pour exclure l’application de la loi Carrez.

Il est ainsi établi que l’ensemble immobilier objet de la vente est bien soumis au statut de la copropriété depuis 1979, qu’aucune modification n’a été effectuée malgré les transmissions successives du bien entre les mains d’une seule personne à partir de 1984, que les parties ont expressément entendu se soumettre aux dispositions de la loi du 18 décembre 1996 lors de la vente litigieuse, que le vendeur a été parfaitement informé des conséquences de l’application de cette loi et a vendu le bien objet d’un règlement de copropriété avec toutes les conséquences de ce statut.

Il importe peu que les règles relatives à la gestion d’un immeuble en copropriété n’aient pas été respectées par les propriétaires successifs, cette situation n’étant pas de nature à faire disparaître purement et simplement la copropriété. C’est à bon droit que les premiers juges ont considéré que les dispositions de l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965 modifiée sont applicables.

Il ressort du rapport d’expertise de monsieur Z... que le sous-sol existant sous une seule construction (lot n° 1) est accessible de l’extérieur par un escalier et de l’intérieur par une porte, que ce sous-sol déterré d’une cinquantaine de centimètres et éclairé par des ouvertures hautes côté façade, est aménagé en une salle principale avec faux plafond et une salle d’eau, que bien que la pièce soit isolée et d’une hauteur de près de deux mètres, elle reste une cave aménagée dont la surface ne doit pas être prise en compte pour le calcul de la superficie du bien vendu.

Régine X... a fait procéder à un aménagement du sous-sol pour rendre celui-ci plus utilisable mais il ne s’agit que d’un agencement qui ne modifie pas la nature de la pièce qui reste une cave et ne peut être considérée comme pièce à vivre n’étant déterrée que d’une cinquantaine de centimètres et ne comportant pas de fenêtres autres que des ouvertures hautes côté façade. Les photographies jointes au rapport confirment qu’il s’agit d’une cave en excellent état qui permet d’entreposer des meubles et objets. Les attestations versées aux débats par le vendeur selon bordereau du 28 mars 2006, après plus de quatre années de procédure, qui émanent de proches, sont insuffisantes pour remettre en cause les conclusions de l’expert. L’expert a justement chiffré la superficie privative des deux lots réunis à 129 m2. La superficie réelle est inférieure de plus d’un vingtième à celle exprimée dans l’acte de vente ce qui justifie la demande de l’acquéreur de voir réduire le prix de vente proportionnellement à la moindre mesure. Pour le calcul de la réduction du prix, seul doit être pris en compte le prix de vente des biens immobiliers soit 256. 114, 35 euros. Les premiers juges ont justement fixé à 47. 299, 47 euros le montant de la réduction du prix de vente, le demandeur pouvant modifier le quantum de ses réclamations en cours de procédure contrairement à ce que soutient Régine X.... Les intérêts ont été à bon droit fixés au taux légal à compter de l’assignation et ils se capitaliseront conformément à l’article 1154 du code civil “ (arrêt, p. 5 à 7),

 

[Argumentation du demandeur au pourvoi]

 

ALORS, D’UNE PART, QUE le statut de la copropriété régi par la loi du 10 juillet 1965 n’est applicable qu’aux immeubles bâtis dont la propriété est répartie entre plusieurs personnes ;

 

Qu’en l’espèce, il résulte des constatations souveraines des juges du fond que Madame Régine X... était propriétaire de l’ensemble d’un pavillon, qui dans le passé avait été placé sous le régime de la copropriété ; qu’elle a vendu aux époux Y... la totalité des lots représentant ledit pavillon ;

 

Que prétendant que l’acte de vente comportait une inexactitude quant à la mention de la superficie, Monsieur Y... a engagé une action en diminution du prix sur le fondement des dispositions de l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965 ;

 

Qu’en accueillant cette demande, alors que le statut de la copropriété n’était pas applicable au pavillon susvisé, la Cour d’appel a violé l’article 1er de la loi du 10 juillet 1965 ;

 

ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU’en cas de vente en bloc de l’ensemble des lots composant une copropriété, la mention de la superficie de chacun de ces lots n’a pas à figurer dans la promesse unilatérale de vente ou d’achat ou dans le contrat réalisant ou constatant la vente de ces lots ; que l’éventuelle inexactitude de la mention de la superficie dans un de ces actes ne saurait donc ouvrir à l’acquéreur une action en diminution du prix ;

 

Qu’en l’espèce, il est constant que Madame Régine X... était propriétaire d’un pavillon situé à Asnières, artificiellement maintenu sous le régime de la copropriété ; qu’elle a vendu aux époux Y... la totalité des lots représentant ledit pavillon ;

 

Que prétendant que l’acte de vente comportait une inexactitude quant à la mention de la superficie, Monsieur Y... a engagé une action en diminution du prix ;

 

Qu’en accueillant cette demande, alors que la vente portait sur la totalité des lots composant la copropriété et non sur un lot isolé, la Cour d’appel a violé l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965 ;

 

ALORS, AU SURPLUS, QUE pour l’application de l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa rédaction issue de la loi du 18 décembre 1996, et des articles 4-1 et 4-2 du décret du 17 mars 1967, issus du décret du 23 mai 1997, la superficie devant figurer sur l’acte de vente est la superficie du ou des lots de copropriété vendus, tels qu’ils se présentent matériellement au moment de la vente ;

 

Qu’en l’espèce, il est constant que Monsieur Y... a, à de nombreuses reprises et avec l’aide de différents professionnels ayant procédé au mesurage des pièces, visité les lieux avant d’en faire acquisition et n’a donc pas pu ne pas se rendre compte que la grande pièce semi-enterrée avait été aménagée et meublée, avec une salle d’eau ;

 

Qu’il s’ensuivait que cette pièce devait entrer en ligne de compte dans le calcul de la superficie de la partie privative des lots de copropriété ;

 

Qu’en jugeant le contraire, la Cour d’appel a violé les textes susvisés ;

 

ALORS, ENFIN, QUE ne constitue pas une cave au sens de l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965, la pièce, qui bien que semi-enterrée, est pourvue de fenêtres, d’une hauteur supérieure à 1, 80 mètre, avec salle d’eau ;

 

Qu’en l’espèce, il est constant que, bien que semi-enterrée, la pièce litigieuse, aménagée en une salle principale avec faux plafond et une salle d’eau, était accessible à la fois de l’extérieur et de l’intérieur, pourvue de fenêtres et isolée et d’une hauteur de près de deux mètres ;

 

Qu’en considérant que cette pièce constituait une cave qui ne devait pas être pris en compte, dans une promesse unilatérale de vente ou un contrat réalisant la vente d’un lot de copropriété, pour la détermination de la superficie de la partie privative, la Cour d’appel a violé l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965, ensemble les articles 4-1 et 4-2 du décret du 17 mars 1967.

 

Commentaire :

 

 

 

L’arrêt de cassation est lapidaire.

Il confirme, en tant que de besoin, que la réunion de tous les lots entre les mains d’un même propriétaire entraîne de plein droit la disparition de la copropriété. Le nouveau propriétaire ne peut « maintenir artificiellement l’état de copropriété ».

Dès lors, la vente consentie aux époux Y… n’était pas une vente de lots de copropriété. Elle n’était pas soumise aux dispositions de l’article 46 puisque la loi Carrez, - de manière inexplicable -, ne vise que les lots de copropriété.

On peut seulement se demander pourquoi le notaire a rédigé son acte comme il l’a fait, semblant ignorer les effets radicaux de la réunion de tous les lots en une seule main. Il était nécessaire, nous semble-t-il, de rappeler la division initiale de la propriété de l’immeuble, puis les effets de la réunion de ces lots en une seule main.

 

Sortant du cadre strict de l’espèce, on peut noter qu’un marchand de biens, après avoir acheté les six lots d’un petit immeuble, peut les revendre à différentes personnes sans obligation de justifier la surface des lots s’il peut prendre la précaution de régulariser simultanément les six ventes, ce qui n’est pas une hypothèse d’école. La condition de simultanéité est impérative car, après une première vente, il y aurait à nouveau division de la propriété de l’immeuble et application du statut de la copropriété.

 

Sur les modalités d’application de l’article 46 et des articles 4-1 et 4-2 du décret du 17 mars 1967, que la Cour de cassation a négligées, bornons nous à constater que les acquéreurs, qui ont bénéficié de larges possibilités de visite préalable du bien mis en vente, détournaient le texte de son objet véritable qui est la protection des acquéreurs contre les abus manifestes de certains vendeurs ou de leurs agents.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

22/02/2009