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« faillite » du syndic

garant financier

allocation d’un provision ad litem au syndicat créancier (oui)

 

 

 

Cassation civile 2e  18 juin 2009

Cour d’appel de Paris du 12 mars 2008

N° de pourvoi: 08-14864

Rejet

 

 

 

Sur le moyen unique :

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 12 mars 2008), que soutenant que son ex-syndic, la société Guilbert Marchal Garcia (la société GMG), placée en liquidation judiciaire et ayant Mme X... comme liquidateur, se trouvait dans l’incapacité de représenter les fonds qui lui avaient été remis dans l’exercice de ses fonctions, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé 36-38 rue Victor Massé à Paris 9e (le syndicat) a assigné la société Les Souscripteurs des Lloyd’s de Londres (le Lloyd’s), qui assurait la garantie financière du syndic, devant un juge des référés qui a, notamment, mis à la charge du Lloyd’s le versement d’une provision ad litem au profit du syndicat ;

 

Attendu que le Lloyd’s fait grief à l’arrêt de confirmer l’ordonnance, alors, selon le moyen :

 

1°/ que la créance de dépens ne trouve son origine que dans la décision judiciaire qui statue sur ceux-ci ; qu’en conséquence, il n’entre pas dans les pouvoirs du juge des référés, saisi avant tout litige, de condamner l’une des parties, sur le fondement de l’article 809, alinéa 2, du code de procédure civile, au paiement d’une provision ad litem dont l’objet est d’anticiper la décision future des juges du fond de faire supporter à l’une ou à l’autre des parties la charge des dépens ; qu’en confirmant néanmoins la décision du juge des référés de condamner le Lloyd’s à payer au syndicat des copropriétaires une provision ad litem pour lui permettre de financer l’avance des frais de l’expertise qu’il avait sollicitée, au motif erroné que le juge des référés tirerait de l’article 809, alinéa 2, du code de procédure civile le pouvoir d’allouer une telle provision au demandeur, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

 

 

2°/ que les juges du fond ne sont pas tenus de condamner la partie succombante aux dépens et peuvent en faire supporter la totalité ou une fraction à une autre partie ; qu’ainsi tributaire du comportement procédural des parties au cours de l’instance au fond, l’obligation aux dépens ne saurait être, par anticipation, tenue pour une obligation non sérieusement contestable au sens de l’article 809, alinéa 2, du code de procédure civile ; qu’en tenant au contraire pour incontestable l’obligation du Lloyd’s de supporter les frais de l’expertise ordonnée, aux motifs inopérants que ce dernier ne contestait ni le principe de sa garantie financière au profit du syndic ni l’effectivité de la procédure collective ouverte à l’encontre de celui-ci, la cour d’appel a derechef violé le texte susvisé ;

 

 

3°/ qu’il résultait des constatations mêmes de l’ordonnance entreprise qu’eu égard à l’absence de toute pièce comptable ou bancaire retraçant les sommes reçues par le syndic et les règlements effectués par celui-ci pour le compte de la copropriété, il n’était pas possible de déterminer si la garantie financière consentie par le Lloyd’s déboucherait sur une quelconque obligation de règlement de l’assureur envers le syndicat des copropriétaires ; qu’en retenant que le Lloyd’s ne contestait ni le principe de sa garantie financière au profit du syndic ni l’effectivité de la procédure collective ouverte à l’encontre de celui-ci, la cour d’appel s’est déterminée par des motifs impropres à caractériser l’existence d’une créance certaine du syndicat des copropriétaires sur le garant ; qu’en se prononçant de la sorte, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article 809, alinéa 2, du code de procédure civile ;

 

4°/ que le juge des référés ne peut condamner l’une des parties au paiement d’une provision ad litem sans constater préalablement l’insuffisance des ressources de la partie qui en demande le bénéfice pour faire face aux charges du procès ; que, pour justifier sa décision de condamner le Lloyd’s à payer au syndicat des copropriétaires une provision ad litem pour leur permettre de financer l’avance des frais de l’expertise qu’il avait sollicitée, la cour d’appel s’est bornée à relever que l’engagement de ces frais était nécessaire pour leur permettre de mener à bien le procès au fond qu’ils envisageaient de former contre le Lloyd’s et que le syndicat des copropriétaires avait dû reconstituer sa trésorerie par un appel exceptionnel de charges, à la suite de la déconfiture de son ancien syndic ; qu’en statuant par de tels motifs, impropres à caractériser l’insuffisance des ressources du syndicat des copropriétaires pour faire face aux charges du procès, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article 809, alinéa 2, du code de procédure civile ;

 

Mais attendu que l’arrêt retient exactement que le juge des référés, saisi sur le fondement de l’article 809, alinéa 2, du code de procédure civile, a le pouvoir d’allouer toute provision, dès lors qu’elle est fondée sur une obligation non sérieusement contestable ;

 

Et attendu qu’ayant retenu, par motifs propres et adoptés, que le Lloyd’s ne contestait pas le principe de sa garantie financière due à la société GMG, ni la réalité des versements effectués auprès de celle-ci par les copropriétaires au titre des appels de charges pour 2006, pas plus que l’impossibilité dans laquelle se trouvait l’ex-syndic de représenter les fonds au moins à hauteur de la part qu’il reconnaissait devoir et relevé que l’engagement de frais d’instance par le syndicat des copropriétaires avait été rendu nécessaire par le refus de garantie opposé par le Lloyd’s, la cour d’appel a pu en déduire, par une décision motivée, que l’obligation du Lloyd’s de verser une provision ad litem n’était pas sérieusement contestable ;

 

Attendu, enfin, que l’allocation d’une provision ad litem sur le fondement de l’article 809, alinéa 2, du code de procédure civile, n’est pas subordonnée à la preuve de l’impécuniosité de la partie qui en sollicite l’attribution ;

 

 

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

REJETTE le pourvoi ;

 

Condamne la société Les Souscripteurs du Lloyd’s de Londres aux dépens ;

 

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Les Souscripteurs des Lloyd’s de Londres ; la condamne à payer au syndicat des copropriétaires du 36-38 rue Victor Masse, 75009 Paris la somme de 2 500 euros ;

 

 

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

 

 

Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Les Souscripteurs des Lloyd’s de Londres.

 

 

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné « la SAS Les souscripteurs du Lloyd’s de Londres » à payer au Syndicat des copropriétaires du 36-38 rue Victor Massé à Paris 9ème la somme de 3.000 à titre de provision ad litem et de l’AVOIR condamnée, sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, au paiement d’une somme de 2.000 au profit du Syndicat des copropriétaires du 36-38 rue Victor Massé à Paris 9ème et d’une somme de 500 au profit de Maître X..., ès-qualité de liquidateur judiciaire du cabinet GMG ;

 

AUX MOTIFS QUE les termes de l’article 771 du CPC, relatifs à la faculté qu’a le juge de la mise en état d’allouer une provision pour le procès, ne limitent nullement à l’instance en divorce son champ d’application ; que le prononcé d’une telle mesure ne relève exclusivement des attributions du juge ou du conseiller de la mise en état que postérieurement à sa désignation ; qu’il n’est pas prétendu par le LLOYD’S qu’une telle juridiction aurait été désignée ou saisie ; que le juge des référés, au regard des dispositions de l’article 809 alinéa 2 précité, a le pouvoir d’allouer toute provision, dès lors qu’elle est fondée sur l’existence d’une obligation incontestable ; que le juge des référés a, donc, le pouvoir d’allouer, parmi d’autres provisions, une provision pour le procès ;

Sur le bien fondé de la provision ad litem accordée : que le syndicat des copropriétaires ayant demandé, par voie d’assignation, que les frais de la mesure d’expertise qu’il sollicitait soient avancés par le LLOYD’S, c’est pertinemment que le premier juge a mis à la charge de ce syndicat la provision à valoir sur les frais d’expertise devant être consignée, dès lors qu’il était demandeur d’une telle mesure et que la mise en oeuvre de cette dernière devait être garantie ; que cette décision n’est l’objet d’aucun appel ; que le juge des référés a, en outre, après l’évocation, par le syndicat des copropriétaires, de cette hypothèse, accordé au syndicat des copropriétaires une provision à valoir sur les frais exposés par ce dernier pour faire face au procès ; que le premier juge, en se référant à “la nature de la contestation élevée par le LLOYD’S et à la position des parties”, a motivé, quoique de façon succincte, sa décision, sur ce point ; que l’engagement de frais, par le syndicat des copropriétaires, pour faire face à la procédure ayant donné lieu au prononcé d’une mesure d’expertise non contestée, est incontestable ; que l’engagement de tels frais, dont le montant comprend au moins celui d’une expertise judiciaire dont le prononcé n’est pas contesté, est d’évidence nécessaire pour mener à bien le procès au fond envisagé par l’intimé ; que le LLOYD’S ne conteste pas devoir sa garantie financière à GMG, ni l’obligation qu’a cette dernière de remettre au syndicat des copropriétaires les fonds qu’elle détient pour son compte, ni l’effectivité de la procédure collective dont GMG a fait l’objet, empêchant une telle remise, dont l’impossibilité n’a pas été contestée par son liquidateur ; que, de même, le LLOYD’S n’oppose aucune objection aux explications du syndicat des copropriétaires selon lesquelles il a dû reconstituer sa trésorerie tout en finançant les frais d’un procès rendu nécessaire par le refus de garantie de l’appelant , tout en assurant le paiement de factures présentées comme payées par la comptabilité transmise et selon lesquelles les copropriétaires ont du faire face à un appel exceptionnel de 40.000 pour reconstituer la trésorerie de la copropriété et continuer à payer les appels trimestriels de charges courantes ; que la somme de 3.000 mise à la charge du LLOYD’S de la provision considérée ne l’a pas été en application du contrat la liant à GMG ; que l’obligation qu’a le LLOYD’S de supporter les frais litigieux est, donc, incontestable ;

 

ET AU MOTIF ADOPTE QU’IL convient, sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile de faire droit à la demande d’expertise et eu égard à la nature de la contestation élevée par la SAS Les Souscripteurs du Lloyd’s et compte tenu de la position des parties de mettre à la charge de la SAS Les Souscripteurs du Lloyd’s une provision ad litem ;

 

1. ALORS QUE la créance de dépens ne trouve son origine que dans la décision judiciaire qui statue sur ceux-ci ; qu’en conséquence, il n’entre pas dans les pouvoirs du juge des référés, saisi avant tout litige, de condamner l’une des parties, sur le fondement de l’article 809 alinéa 2 du Code de procédure civile, au paiement d’une provision ad litem dont l’objet est d’anticiper la décision future des juges du fond de faire supporter à l’une ou à l’autre des parties la charge des dépens ; qu’en confirmant néanmoins la décision du juge des référés de condamner les Souscripteurs du Lloyd’s de Londres à payer au Syndicat des copropriétaires une provision ad litem pour lui permettre de financer l’avance des frais de l’expertise qu’il avait sollicitée, au motif erroné que le juge des référés tirerait de l’article 809 alinéa 2 du Code de procédure civile le pouvoir d’allouer une telle provision au demandeur, la Cour d’appel a violé le texte susvisé ;

 

2. ALORS, de surcroît, QUE les juges du fond ne sont pas tenus de condamner la partie succombante aux dépens et peuvent en faire supporter la totalité ou une fraction à une autre partie ; qu’ainsi tributaire du comportement procédural des parties au cours de l’instance au fond, l’obligation aux dépens ne saurait être, par anticipation, tenue pour une obligation non sérieusement contestable au sens de l’article 809, alinéa 2, du Code de procédure civile ; qu’en tenant au contraire pour incontestable l’obligation du Lloyd’s de supporter les frais de l’expertise ordonnée, aux motifs inopérants que ce dernier ne contestait ni le principe de sa garantie financière au profit du syndic ni l’effectivité de la procédure collective ouverte à l’encontre de celui-ci, la Cour d’appel a derechef violé le texte susvisé ;

 

3. ALORS, en toute hypothèse, QU’IL résultait des constatations mêmes de l’ordonnance entreprise qu’eu égard à l’absence de toute pièce comptable ou bancaire retraçant les sommes reçues par le syndic et les règlements effectués par celui-ci pour le compte de la copropriété, il n’était pas possible de déterminer si la garantie financière consentie par les Souscripteurs du Lloyd’s de Londres déboucherait sur une quelconque obligation de règlement de l’assureur envers le syndicat des copropriétaires ; qu’en retenant que le Lloyd’s ne contestait ni le principe de sa garantie financière au profit du syndic ni l’effectivité de la procédure collective ouverte à l’encontre de celui-ci, la Cour d’appel s’est déterminée par des motifs impropres à caractériser l’existence d’une créance certaine du syndicat des copropriétaires sur le garant ; qu’en se prononçant de la sorte, la Cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article 809, alinéa 2, du Code de procédure civile ;

 

4. ALORS, très subsidiairement, QUE le juge des référés ne peut condamner l’une des parties au paiement d’une provision ad litem sans constater préalablement l’insuffisance des ressources de la partie qui en demande le bénéfice pour faire face aux charges du procès ; que, pour justifier sa décision de condamner le Lloyd’s à payer au syndicat des copropriétaires une provision ad litem pour leur permettre de financer l’avance des frais de l’expertise qu’il avait sollicitée, la Cour d’appel s’est bornée à relever que l’engagement de ces frais était nécessaire pour leur permettre de mener à bien le procès au fond qu’ils envisageaient de former contre le Lloyd’s et que le syndicat des copropriétaires avait du reconstituer sa trésorerie par un appel exceptionnel de charges, à la suite de la déconfiture de son ancien syndic ; qu’en statuant par de tels motifs, impropres à caractériser l’insuffisance des ressources du syndicat des copropriétaires pour faire face aux charges du procès, la Cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article 809, alinéa 2, du Code de procédure civile.

 

 

 

Commentaire

 

Les praticiens ne peuvent que se réjouir de la décision rendue.

Les juristes ne peuvent que l’approuver.

 

Dans le passé, les garants financiers traditionnels avaient aussi soulevé des moyens abusifs à l’encontre des réclamations des victimes d’un sinistre de ce type. Aux observations d’ordre purement moral, ils répondaient que leur mission n’était pas d’assurer la protection des intérêts financiers des mandants du syndic mais exclusivement de permettre à celui-ci d’obtenir la délivrance de la carte professionnelle et d’exercer son activité dans les conditions imposées par la loi.

Les garants financiers traditionnels sont incontestablement revenus à de meilleurs principes, après avoir subi de nombreuses déconvenues judiciaires, il est vrai !

 

Le Llloyd’s est, d’une certaine manière, un nouveau venu.

Il lui est reproché, à tort ou à raison, de n’avoir pas exercé un contrôle attentif des professionnels aux quels il apportait sa garantie. Nous n’entrerons pas dans ce litige.

En l’espèce, comme dans bien d’autres, on retrouve malheureusement une situation fréquente :

- Le garant financier demande au syndicat créancier de prouver le montant de sa créance

- Cette preuve ne peut être établie qu’au moyen des livres comptables du syndicat

- C’est le syndic en détresse qui tenait et détenait la comptabilité. On ne trouve pas les documents.

- Nous faisons abstraction en l’état des erreurs pouvant être découvertes dans la comptabilité retrouvée.

 

Il est donc nécessaire de recourir à une expertise longue et complexe. Il est juste que le garant financier trop laxiste soit condamné à assurer le préfinancement du coût de l’expertise.

De plus, la Cour énonce fort bien les règles juridiques permettant l’octroi d’une provision ad litem (pour le procès) au syndicat.

 

 

 

 

 

Mise à jour

23/09/2009