Recouvrement des charges

Autorisation au syndic de pratiquer saisie immobilière

Autorisation anticipée à toutes fins utiles Possibilité (non)

 

 

Cassation civile 3e 15 février 2006                                                                          Cassation.

Cour d’appel de Basse-Terre, 06-09-2004

N° de pourvoi : 04-20261

 

 

Sur le moyen unique :

Vu l’article 55 du décret du 17 mars 1967 ;

 

Attendu que le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l’assemblée générale ; qu’une telle autorisation n’est pas nécessaire pour la mise en oeuvre des voies d’exécution forcée à l’exception de la saisie en vue de la vente d’un lot ;

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Basse-Terre, 6 septembre 2004), que Mme Y... Z... X..., propriétaire de lots dans un groupe d’immeubles en copropriété, a été condamnée par arrêt du 21 février 2000 à payer au syndicat des copropriétaires un arriéré de charges ; que le syndic a poursuivi l’exécution de cet arrêt par une saisie immobilière de ses lots ;

 

Attendu que pour dire que le syndic était autorisé à mettre en oeuvre cette voie d’exécution, l’arrêt retient que par une décision de l’assemblée générale du 13 novembre 1998, les copropriétaires ont donné pouvoir à ce syndic d’engager la procédure de saisie immobilière à l’encontre des copropriétaires débiteurs qui ne se seraient pas acquittés de leurs charges suite aux condamnations rendues et qu’à la date de cette assemblée, cette copropriétaire était débitrice de charges ;

 

Qu’en statuant ainsi, alors qu’une assemblée générale ne peut, par anticipation et par une décision générale pouvant s’appliquer à toute condamnation, autoriser un syndic à engager une procédure de saisie immobilière contre un copropriétaire non désigné, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 6 septembre 2004, entre les parties, par la cour d’appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Basse-Terre, autrement composée ;

 

Condamne le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier Nettlé bay beach club aux dépens ;

 

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier Nettlé bay beach club à payer à Mme Y... Z... X... la somme de 2 000 euros ;

 

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande du syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier Nettlé bay beach club ;

 

 

 

Commentaires :

 

Il est de jurisprudence constante que l’autorisation d’agit en justice prévue par l’article D 55 ne peut être donnée au syndic que pour un litige né et constitué. Cette position est admissible pour les litiges importants. On ne peut laisser au syndic, qui n’est pas propriétaire de l’action, la possibilité d’engager une action judiciaire qui pourrait ensuite s’avérer téméraire.

De toute manière, lorsque l’opportunité de l’action s’avère évidente, ou lorsqu’elle présente une certaine urgence, le syndic peut engager l’action, de préférence après consultation du conseil syndical, et solliciter ensuite la ratification de son initiative.

La solution est néanmoins paralysante quand il s’agit d’actions de caractère disciplinaire tendant à faire respecter le règlement de copropriété, par exemple. On ne peut envisager la convocation d’une assemblée de copropriétaires pour chaque infraction commise dans une copropriété importante.

 

La question se présente ici à propos d’une autorisation de procéder à la saisie immobilière des lots appartenant à des copropriétaires débiteurs de charges. Elle avait été donnée par anticipation et dans l’éventualité de la survenance d’une telle situation, sans viser aucun copropriétaire déterminé.

La saisie immobilière du lot d’un copropriétaire est une mesure d’une particulière gravité pour le débiteur et l’on peut admettre qu’il faille y réfléchir à deux fois.

Elle peut aussi présenter des risques pour le syndicat créancier lui-même. Si les garanties du syndicat n’ont pas été exploitées correctement, il peut se trouver en position défavorable face à un ou plusieurs créanciers inscrits. Les copropriétaires doivent être aussi avertis du risque qu’encourt le syndicat de se retrouver acquéreur forcé du lot vendu faut d’enchérisseur.

Il est donc normal que l’assemblée puisse débattre des avantages et des risques de la saisie immobilière. Au demeurant elle doit fixer le montant de la mise à prix. Enfin, après la réforme récente du régime des voies d’exécution, l’assemblée pourra être appelée à délibérer sur l’opportunité d’une «  vente judiciaire à l’amiable ».

 

Notons encore que désormais, en vertu de l’article 10 de l’arrêté du 15 mars 2005, la décision prise par l’assemblée de faire procéder à la saisie immobilière du lot a pour effet d’obliger le syndic a constater une dépréciation du compte du tiers copropriétaire par l’inscription d’une provision dans le compte 491. L’assemblée peut être invitée à se prononcer sur le montant de cette provision car, en cas de perte définitive, la somme en question devra être répartie comme charge commune.

 

Il est donc bien certain qu’en ce qui concerne le recours à la procédure de saisie immobilière, l’assemblée générale ne peut, en l’absence d’un procédure en cours, que rappeler au syndic l’obligation qu’il a de procéder ponctuellement au recouvrement des charges impayées et faire connaître que, le cas échéant, elle n’hésitera pas à décider le recours à l’exécution par voie de saisie immobilière.

Il n’est pas même certain qu’elle puisse prendre une décision relative à la saisie d’un lot déterminé avant d’avoir obtenu une décision judiciaire passée en force de chose jugée à l’encontre du propriétaire de ce lot. Notons toutefois l’avis contraire de la Cour d’appel de Versailles qui permet à l’assemblée de prendre la décision avant l’obtention d’un titre exécutoire [1] Mais le syndic ne peut faire délivrer le commandement aux fins de saisie immobilière qu’après obtention de ce titre.

 

 

 

 

Mise à jour

17/08/2007

 

 

 



[1] CA Versailles 4e B 18/06/2001 Administrer novembre 2001 p. 38 note Bouyeure