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Responsabilité du syndicat

Troubles de voisinage liés à la construction de l’immeuble

Privation d’ensoleillement Art. 544 Code civil

Qualité de propriétaire du syndicat (oui)

Responsabilité (oui)

 

 

Cour d’appel de Nîmes chambre civile 1e A   13 novembre 2007

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Nîmes du 19 octobre 2004

N° de RG: 04/04912

 

 

APPELANTE :

SYNDICAT DE COPROPRIETE LE JARDIN DES CLASSIQUES

 

INTIMÉS :

Monsieur Manuel X...

 

Madame Carmen Z... veuve X...

 

Madame Rosa A... épouse X...

 

Monsieur José X...

 

SA ELIGE PARTICIPATIONS, anciennement CIPA

 

 

 

ARRÊT :

 

Courant 1999, la société anonyme ELIGE PARTICIPATIONS a fait édifier, à LES ANGLES (Gard), un immeuble à usage de logement en copropriété sur une parcelle qui jouxte celle appartenant aux consorts X... ; les lots vendus, cet immeuble a été constitué en copropriété LE JARDIN DES CLASSIQUES.

Se plaignant de troubles anormaux de voisinage, les consorts X... ont fait assigner le syndicat de copropriété LE JARDIN DES CLASSIQUES et la SA ELIGE PARTICIPATIONS devant le tribunal de grande instance de NÎMES qui, par jugement du 19 octobre 2004, a :

-déclaré la Société anonyme ELIGE PARTICIPATIONS, en sa qualité d’auteur du trouble, et le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence LE JARDIN des CLASSIQUES, en sa qualité de propriétaire de l’ouvrage, cause du trouble, responsables solidairement du trouble anormal de voisinage causé à Mme Carmen D...veuve X... et consistant à la fois dans un trouble de jouissance et une diminution de la valeur vénale de sa villa et à M. Manuel X..., à M. José X... et à Mme Rosaria X... épouse A..., consistant en une diminution de la valeur vénale de leur villa

-dit n’y avoir lieu à ordonner une mesure d’expertise, pour apprécier la diminution de la valeur vénale de l’immeuble

-condamné en conséquence solidairement la Société ELIGE PARTICIPATIONS et le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence LE JARDIN des CLASSIQUES pris en la personne de son syndic, le Cabinet Michel Y..., à régler à :

* Mme veuve X... la somme de 5 000 € en réparation de son trouble de jouissance et,

* aux Consorts X..., qui se la répartiront en fonction de leurs quota de propriété, celle de 15 000 €, en compensation de la diminution de la valeur vénale de leur villa.

-condamné la société ELIGE aux entiers dépens.

 

La SA ELIGE PARTICIPATIONS et le syndicat de copropriété LE JARDIN DES CLASSIQUES ont relevé appel de ce jugement.

Par conclusions du 14 décembre 2005 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et de ses moyens, le syndicat de copropriété LE JARDIN DES CLASSIQUES demande à la cour de :

 

VU l’absence de qualité de propriétaire du Syndicat de Copropriété LE JARDIN DES CLASSIQUES,

REJETER l’ensemble des demandes des consorts X...,

A TITRE SUBSIDIAIRE,

VU l’absence de preuve de la qualité de propriétaires des Consorts X...,

VU l’absence de preuve du caractère anormal des troubles allégués,

REJETER l’ensemble des demandes des Consorts X...,

 

EN TOUTE HYPOTHÈSE,

DIRE ET JUGER que seule la SNC ELIGE est à l’origine du trouble invoqué par les requérants et doit subir condamnation.

CONDAMNER les Consorts X... à payer au Syndicat de Copropriété LE JARDIN DES CLASSIQUES, la somme de 500 euros au titre des dispositions de l’Article 700 du N. C. P. C.,

CONDAMNER les Consorts X... aux entiers dépens.

 

Par conclusions du 27 janvier 2006 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens, Monsieur Manuel X..., Madame Carmen D...veuve X..., Madame Rosa X... née A... et Monsieur José X... demandent à la cour de :

Vu l’article 544 du Code civil ;

Vu les articles 1382 et suivants du Code civil,

Vu le jugement du 19 octobre 2004,

CONFIRMER en son principe la décision rendue par le tribunal de grande instance de NÎMES,

CONDAMNER solidairement la S. A. ELIGE PARTICIPATIONS et le syndicat des copropriétaires de la copropriété LE JARDIN DES CLASSIQUES à payer à Monsieur X... une somme de 15. 000 Euros au titre du préjudice de jouissance ;

CONDAMNER solidairement la S. A. ELIGE PARTICIPATIONS et le syndicat des copropriétaires de la copropriété LE JARDIN DES CLASSIQUES au paiement de la somme de 50. 000 euros au titre de la perte de la valeur vénale et à défaut SURSEOIR à statuer en ce qui concerne la demande au titre de la moins value de la propriété ;

ORDONNER une expertise afin d’apprécier la moins-value occasionnée à la propriété X... ;

 

A TITRE SUBSIDIAIRE :

CONFIRMER la décision du tribunal de grande instance de Nîmes avec allocation de la somme supplémentaire de 2000 € au titre de l’article 700 du N. C. P. C. outre les entiers dépens de 1ère instance et d’appel.

 

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

CONDAMNER solidairement la S. A. ELIGE PARTICIPATIONS et le syndicat des copropriétaires de la copropriété LE JARDIN DES CLASSIQUES à la somme de 2. 000 euros au titre de l’article 700 du N. C. P. C. outre les dépens.

 

Par conclusions du 28 mars 2006 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et de ses moyens, la SA ELIGE PARTICIPATIONS demande à la cour de :

Infirmer la décision déférée ;

Dire et juger irrecevable l’action des Consorts X... faute d’intérêt actuel et / ou faute de qualité ;

A titre subsidiaire,

Dire et juger mal fondée leur action ;

Reconventionnellement les condamner à verser à la Société ELIGE PARTICIPATIONS la somme de 2 000 € en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Les condamner aux entiers dépens.

La mise en état a été clôturée par ordonnance du 7 septembre 2007.

 

SUR QUOI, LA COUR :

Attendu que les consorts X... produisent l’attestation de propriété établie à la suite du décès de Monsieur Baltasar X..., laissant pour lui succéder son épouse Carmen D...propriétaire pour moitié, et leurs trois enfants.

Attendu que certes c’est chacun des copropriétaires qui est propriétaire d’une quote-part indivise de l’ensemble immobilier formant la copropriété ; que cependant la loi n 65-557 du 10 juillet 1965 organise la représentation de la collectivité des copropriétaires par le syndicat des copropriétaires dont la personnalité morale autorise les tiers à agir contre lui au titre de la responsabilité de la copropriété ; que le moyen spécieux tiré de ce que le syndicat n’est pas propriétaire ne peut être accueilli.

Attendu que sur le fondement de l’article 544 du Code civil, le propriétaire du fonds répond, sans qu’il y ait lieu de rechercher l’existence d’une faute, du trouble causé à autrui dès lors qu’il dépasse les inconvénients normaux de voisinage ; qu’il appartient à celui qui, sans commettre aucune faute, exerce conformément aux autorisations administratives son droit de construire, d’apprécier l’équilibre économique de son entreprise en tenant compte des inconvénients anormaux qui en sont la conséquence pour le voisinage, et dont la réparation fait objectivement partie des charges de l’opération de construction ; que dès lors, peu importe que les troubles causés aux tiers proviennent de la construction à un moment où le syndicat des copropriétaires n’avait pas encore d’existence légale et que le constructeur ne soit plus le propriétaire du bien au temps de l’exercice des recours des voisins ; que c’est par une exacte application de l’article 544 susvisé que le tribunal a retenu la responsabilité de plein droit du propriétaire actuel et du constructeur auteur du dommage.

Attendu qu’il n’est pas contesté que les bâtiments visibles sur les clichés photographiques versés aux débats sont bien ceux appartenant aux parties ; qu’il appartenait au premier juge, sans omettre l’influence des effets de cadrage et de perspective inhérents à la prise de vue, d’exercer lui-même son pouvoir d’appréciation sur la gêne visuelle et la privation d’ensoleillement ; que s’agissant d’un quartier alors caractérisé par un habitat discontinu, la construction d’un immeuble de plus de 13 mètres de hauteur au faîtage au voisinage immédiat d’un pavillon, précisément en limite de propriété, à l’Ouest de la parcelle X... entraîne une privation d’ensoleillement dépassant les inconvénients normaux de voisinage, affectant tant l’agrément que la valeur du bien concerné.

Attendu que s’agissant d’un secteur ne présentant pas un cachet exceptionnel et qui bénéficie par ailleurs des avantages de l’urbanisation, le tribunal a fait une juste appréciation des préjudices, pour lesquels il a judicieusement distingué, s’agissant d’une propriété démembrée, ceux affectant l’occupation et ceux affectant la nu propriété.

Attendu que le jugement entrepris doit être confirmé en toutes ses dispositions ; que le syndicat de copropriété LE JARDIN DES CLASSIQUES et la SA ELIGE PARTICIPATIONS qui succombent doivent supporter les dépens ; que pour défendre sur leur appel, les consorts X... ont dû exposer des frais non compris dans les dépens, au titre desquels il doit leur être alloué la somme de 2000,00 €.

 

PAR CES MOTIFS, la Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière civile, en dernier ressort,

En la forme, reçoit le syndicat de copropriété LE JARDIN DES CLASSIQUES et la SA ELIGE PARTICIPATIONS en leur appel et le dit mal fondé.

Confirme le jugement déféré ; y ajoutant :

Condamne in solidum le syndicat de copropriété LE JARDIN DES CLASSIQUES et la SA ELIGE PARTICIPATIONS à payer à Monsieur Manuel X..., Madame Carmen D...veuve X..., Madame Rosa X... née A... et Monsieur José X... ensemble la somme de 2000,00 € en application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, au titre des frais exposés en appel.

Condamne in solidum le syndicat de copropriété LE JARDIN DES CLASSIQUES et la SA ELIGE PARTICIPATIONS aux dépens et alloue à la SCP CURAT-JARRICOT le bénéfice des dispositions de l’article 699 du nouveau Code de procédure civile.

 

 

commentaires

 

Le résumé figurant au pied de l’arrêt (Légifrance) est ainsi rédigé :

« Le jugement ayant retenu la responsabilité de plein droit du propriétaire actuel et du constructeur auteur de dommage doit être confirmé, en ce que le tribunal a fait une exacte application de l’article 544 du Code civil, sur le fondement duquel le propriétaire du fonds répond, sans qu’il y ait lieu de rechercher l’existence d’une faute, du trouble causé à autrui dès lors qu’il dépasse les inconvénients normaux du voisinage. Par conséquent, il importe peu que les troubles causés aux tiers proviennent de la construction à un moment où le syndicat des copropriétaires n’avait pas encore d’existence légale et que le constructeur ne soit plus le propriétaire du bien au temps de l’exercice des recours des voisins. »

 

La Cour d’appel de Nîmes s’exprime en effet comme suit dans l’arrêt :

« Attendu que certes c’est chacun des copropriétaires qui est propriétaire d’une quote-part indivise de l’ensemble immobilier formant la copropriété ; que cependant la loi n 65-557 du 10 juillet 1965 organise la représentation de la collectivité des copropriétaires par le syndicat des copropriétaires dont la personnalité morale autorise les tiers à agir contre lui au titre de la responsabilité de la copropriété ; que le moyen spécieux tiré de ce que le syndicat n’est pas propriétaire ne peut être accueilli. »

 

Le Tribunal pouvait donc « exercer lui-même son pouvoir d’appréciation sur la gêne visuelle et la privation d’ensoleillement ; que s’agissant d’un quartier alors caractérisé par un habitat discontinu, la construction d’un immeuble de plus de 13 mètres de hauteur au faîtage au voisinage immédiat d’un pavillon, précisément en limite de propriété, à l’Ouest de la parcelle X... entraîne une privation d’ensoleillement dépassant les inconvénients normaux de voisinage, affectant tant l’agrément que la valeur du bien concerné. »

C’est donc en vertu de l’article 544 du Code civil que la Cour d’appel, approuvant les premiers juges, entre en condamnation à l’encontre du syndicat des copropriétaires, in solidum avec le « promoteur » de la construction.

S’agissant du « promoteur », La Cour fait valoir justement « qu’il appartient à celui qui, sans commettre aucune faute, exerce conformément aux autorisations administratives son droit de construire, d’apprécier l’équilibre économique de son entreprise en tenant compte des inconvénients anormaux qui en sont la conséquence pour le voisinage, et dont la réparation fait objectivement partie des charges de l’opération de construction »

 

Le « considérant » suivant est plus contestable : « que dès lors, peu importe que les troubles causés aux tiers proviennent de la construction à un moment où le syndicat des copropriétaires n’avait pas encore d’existence légale et que le constructeur ne soit plus le propriétaire du bien au temps de l’exercice des recours des voisins ; que c’est par une exacte application de l’article 544 susvisé que le tribunal a retenu la responsabilité de plein droit du propriétaire actuel et du constructeur auteur du dommage ».

En effet, du point de vue économique, c’est le « promoteur » seul qui a tiré bénéfice de l’abus du droit de construire et ce sont les copropriétaires acquéreurs qui ont versé les sommes constituant ce profit abusif. Il y a donc double peine.

 

Il existe au moins un arrêt de la Cour de cassation (Cass. civ. 3e 24-01-1973 n° 72-10585) ayant retenu le responsabilité du syndicat en cas de copropriétaire. En cette espèce toulousaine, le propriétaire d’une villa avec jardin, à la limite duquel avait été édifié la copropriété Résidence Cristal, comportant 450 logements. Il se plaignait de dégradations de ses clôtures par les véhicules circulant dans la copropriété, jet d’objet et détritus par les ouvertures de l’immeuble voisins, etc

La Cour de cassation approuvant la Cour d’appel a jugé que le syndicat de la copropriété « Résidence Cristal » devrait, en s qualité de propriétaire du fonds d’où provenaient les inconvénients anormaux constatées, répondre des dommages dont Cazals demandait réparation.

 

La situation était un peu différente !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

13/06/2011