Responsabilité du fait de l’ascenseur (art. 1384 alinéa 1 C. civ.)

Chute provoquée par le décalage de la cabine

Garde collective de l’ascenseur (propriétaire et entreprise d’entretien) (non)

Propriétaire seul gardien de l’ascenseur (oui)

Recours du propriétaire contre l’entreprise (non)

 

CA Aix en Provence 10e chambre civile 17 mai 2005

 

La Société SOGIMA est propriétaire d’un immeuble ;

Mme B. est locataire d’un appartement dans cet immeuble

L’immeuble est doté d’un ascenseur entretenu par la société OTIS

 

Madame B. a fait une chute en sortant de la cabine de l’ascenseur ; il résulte de nombreuses attestations que le jour de l’accident l’ascenseur présentait au niveau du rez-de-chaussée, un décalage de dix à quinze centimètres. La Cour d’appel, après le Tribunal de grande instance, retient que l’ascenseur, « de par son dynamisme propre, a donc bien joué un rôle actif dans la survenance de ce dommage ».

 

Mme B. a assigné la Société SOGIMA et la société OTIS sur le fondement de l’article 1384 du Code civil. Elle a invoqué la théorie juridique de la distinction entre la garde de la structure et la garde du comportement d’une chose, en vertu de laquelle les deux sociétés étaient, au moment de l’accident, toutes deux gardiennes de l’ascenseur.

Le Tribunal a accueilli cette argumentation et retenu la responsabilité solidaire des deux sociétés.

 

La Cour d’appel infirme le jugement sur ce point. Elle juge « que la garde collective d’une chose n’est possible que lorsque plusieurs personnes exercent ensemble et indistinctement des pouvoirs d’usage, de direction et de contrôle sur cette chose, accomplissant des actes connexes et inséparables sans qu’aucune d’elles n’ait un pouvoir prépondérant de direction de contrôle ».

Or, le jour de l’accident, la société OTIS n’effectuait pas d’intervention sur l’appareil. La société SOGIMA était donc seule gardienne à ce moment.

Par ailleurs aucune faute n’est reprochée à la victime

 

Sur le recours de la société SOGIMA contre la société OTIS, celle-ci demande l’infirmation du jugement qui l’a condamnée à supporter à concurrence de 50 % les indemnités allouées à la victime.

La Cour d’appel infirme également sur ce point. Elle juge que la société SOGIMA ne rapporte pas la preuve d’un manquement d’OTIS à ses obligations contractuelles. En particulier « elle ne justifie pas avoir averti OTIS, préalablement à l’accident, d’un dénivelé au niveau du rez-de-chaussée ni lui avoir demandé d’y remédier ». Il est établi qu’OTIS a effectué toutes les visites imposées par le contrat d’entretien.

En conséquence, l’appel en garantie est rejeté.

 

 

 

commentaires

 

On ne peut qu’approuver les termes de l’arrêt rendu par la Cour d’appel d’Aix.

Le rejet de l’argumentation fondée sur la garde collective est parfaitement motivé. On peut ajouter qu’il ne pouvait y avoir dans ce cas transfert de la garde puisque la société OTIS n’effectuait aucune intervention au moment de l’accident.

On peut noter que la Cour a noté que les visites d’entretien avaient été effectuées ponctuellement. La solution aurait-elle été différente s’il en avait été autrement ? On aurait, sans doute, assisté un débat technique au sujet d’un lien éventuel entre l’irrégularité ou l’absence de visite et le décalage de la cabine.

Il en résulte qu’aucun manquement à ses obligations contractuelles n’est imputable à OTIS.

Il faut remarquer que la question du contrôle quotidien du bon fonctionnement de l’appareil par le propriétaire n’est pas évoquée ici. C’était traditionnellement une obligation quotidienne du propriétaire dont l’exécution était confiée au concierge. On la retrouve dans les recommandations de sécurité formulées par M. Quignard, Expert près la Cour de cassation, dans son « Guide pratique : ascenseur et sécurité » [1] . La note d’instructions à destination des concierges, qu’il suggère, mentionne en 1- Mesures préventives : « Vérifier fréquemment qu’il n’existe pas une dénivellation importante aux paliers ».

On constate ici un inconvénient majeur de la disparition progressive des concierges car on ne voit pas comment cette prescription pourrait être respectée dans un immeuble dépourvu de concierge. Il en résulte un accroissement notable de certains risques.

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

18/11/2007

 

 

 



[1] Quignard Guide pratique : ascenseur et sécurité Ed. Eyrolles Paris 2005 page 150