Travaux communs

Accès nécessaire à une partie privative

Pouvoir du Juge des référés d’imposer le libre accès (oui)

Conditions : urgence et nécessité technique de l’accès

Questions évoquées :

Travaux non visés par l’article L 9

Distinction entre la maintenance  préventive et les réparations

 

 

CA Aix en Provence  1e C  16 janvier 2007

P.. c/ SDC Palais Phidias à Nice

 

 

Il est parfois nécessaire de pénétrer dans une partie privative pour effectuer des vérifications ou des travaux sur une partie commune ou un élément d’équipement commun.

Le statut de la copropriété ne comporte à ce sujet qu’une disposition particulière. Il s’agit de l’article L 9 ainsi rédigé, après modification par l’article 60 de la loi n°2006-1772 du 30 décembre 2006 :

« Toutefois, si les circonstances l'exigent et à condition que l'affectation, la consistance ou la jouissance des parties privatives comprises dans son lot n'en soient pas altérées de manière durable, aucun des copropriétaires ou de leurs ayants droit ne peut faire obstacle à l'exécution, même à l'intérieur de ses parties privatives, des travaux régulièrement et expressément décidés par l'assemblée générale en vertu des e, g, h, et i de l'article 25, du d de l'article 26 et des articles 26-1 et 30.

« Les travaux entraînant un accès aux parties privatives doivent être notifiés aux copropriétaires au moins huit jours avant le début de leur réalisation, sauf impératif de sécurité ou de conservation des biens.

« Les copropriétaires qui subissent un préjudice par suite de l'exécution des travaux, en raison soit d'une diminution définitive de la valeur de leur lot, soit d'un trouble de jouissance grave, même s'il est temporaire, soit de dégradations, ont droit à une indemnité.

« Cette indemnité, qui est à la charge de l'ensemble des copropriétaires, est répartie, s'agissant des travaux décidés dans les conditions prévues par les e, g, h et i de l'article 25, par le d de l'article 26 et par l'article 30, en proportion de la participation de chacun au coût des travaux. »

 

Ce texte ne vise que le cas d’exécution de travaux décidés par l'assemblée générale en vertu des e, g, h, et i de l'article 25, du d de l'article 26 et des articles 26-1 et 30.

Or la nécessité de l’accès se présente souvent pour des interventions de gestion courante n’exigeant aucune décision de l’assemblée générale. Il peut s’agir par exemple de la réparation d’une canalisation commune fuyarde sur une portion traversant une partie privative.

Il faut d’emblée distinguer ce cas, où la nécessité est évidente, d’un autre dans lequel l’accès à une partie privative n’est pas nécessaire  mais peut faciliter l’exécution de travaux communs. Nous évoquerons ce cas plus loin.

 

La jurisprudence admet couramment le recours du syndicat à l’intervention du Juge des référés pour obtenir l’accès lorsque le copropriétaire concerné, ou son locataire, s’y oppose. Le Juge statue alors en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par les articles 808 et 809 du NCPC :

Article 808 : Dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de grande instance peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

Article 809 : Le président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

 

Cette voie judiciaire est la seule susceptible d’être utilisée, comme le montrent différents arrêts de jurisprudence :

 

CA Paris 23e B 28/05/1993 Loyers et copropriété 1993 n° 414 : la décision de l’assemblée générale enjoignant un copropriétaire à laisser libre accès pour l’exécution de travaux dont l’urgence est incontestable est nulle

CA Paris 23e A 19/01/2000 Loyers et copropriété 2000 n° 158 : autorisation d’accès pour la dépose d’un carrelage de balcon, la réfection de l’étanchéité et la repose du carrelage [1]

CA Paris 14e B 12/10/2001 Loyers et copropriété 2002 n° 79 : dans le cas de travaux nécessaires et urgents, non visés par l’article L 9, les formalités prévues par ce texte (notification et délai) ne sont pas imposées au syndic ;

CA Aix en Provence 1e C 08/01/2007 Loyers et copropriété 2007 n° 112 : autorisation d’accès pour réparation de l’antenne collective de télévision. Mais, s’agissant du même syndicat, le Juge avait refusé précédemment l’accès pour des opérations d’entretien préventif. Cette solution est peu cohérente puisque l’entretien préventif a pour objet d’évier les pannes qui, en l’espèce, sont effectivement survenues.

 

 

L’arrêt de la Cour d’appel d’Aix en Provence du 16 janvier 2007, relaté, montre un exemple particulièrement significatif des agissements de certains copropriétaires puisqu’en l’occurrence il s’agissait de remédier à une insuffisance du chauffage collectif dans une partie privative.

Le copropriétaire bailleur était en litige depuis longtemps, pour des raisons diverses, avec le syndicat. Sa locataire se plaignait d’une insuffisance de chauffage. L’entrepreneur chauffagiste songeait à l’occlusion d’une canalisation par des boues. Il était nécessaire de constater la situation exacte et de faire les travaux nécessaires.

L’arrêt rappelle les multiples démarches effectuées par le syndic pour la fixation d’un rendez-vous. Finalement le syndic avait saisi le Président du TGI aux fins d’obtenir une ordonnance imposant au copropriétaire de donner accès.

Il approuve ensuite ce Magistrat d’avoir « exactement retenu qu’il avait le pouvoir de faire droit à la demande du syndicat des copropriétaires qui justifiait de l’urgence et de la nécessité d’accéder à l’appartement de M. P.. pour vérifier l’installation collective du chauffage.

 

 

La situation est totalement différente lorsque le syndicat, devant effectuer des travaux importants et programmés, adopte une solution technique exigeant le passage par une partie privative parce qu’elle est plus facile et moins coûteuse. Dans ce cas, la jurisprudence, en cas d’opposition du propriétaire concerné, impose au syndicat d’adopter une autre solution, même si elle est beaucoup plus coûteuse.

 

 

 

 

 

Mise à jour

11/07/2007

 

 

 



[1] En l’espèce, la dépose et la repose du carrelage sont laissées à la charge du syndicat compte tenu des dispositions du règlement de copropriété