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Pilori des syndics : qui est l’indigne ?

 

 

 

Le recours systématique des journalistes en panne d’inspiration aux activités des syndics professionnels de copropriété devrait alerter les instances supérieures de la profession et des grandes écoles qui lui sont dédiées. Il faut songer à conserver à la « carte » sa noblesse. C’est en ce seul sens qu’il est ici question d’indignité.

Le plus généralement, on se contente de reproduire un communiqué de l’une des associations dites de défense en occultant les mentions pouvant être considérées comme positives pour les syndics ; On l’a vu récemment à propos d’un communiqué de la CLCV qui reconnaissait une amélioration de la présentation des contrats de syndics tout en critiquant certains d’entre eux. Dans certaines revues les titres sont demeurés nauséeux.

 

La presse régionale tient son rang parmi les crieurs de « haro ». Nous reproduisons l’article de Barbara Gorrand en date du 5 novembre 2012 dans l’Indépendant (journal perpignanais) :

 

 

Perpignan  Syndics de copropriété : un univers impitoyable

Depuis trois ans l'interphone ne marche pas, la rambarde de l'escalier est branlante, nous sommes restés plusieurs mois sans lumière dans les parties communes, nous avons une auréole au plafond suite à la tempête de 2009, ce n'est toujours pas repeint… Quand on appelle, on nous dit : 'Oui, oui, nous allons nous en occuper'. Mais au final, rien n'est fait ! Sinon pour nous envoyer des régularisations de frais chaque année ! Les syndics, c'est du business et rien d'autre".

 

Julien est amer. Pire, ce locataire d'une petite résidence moderne à Saint-Estève a fini par déposer son préavis. 'Victime' d'une faille de la loi Scellier : des propriétaires issus de toute la France ont acheté pour défiscaliser, et ont confié la gestion des appartements à un syndic… toulousain ! Effectivement, cela fait un peu loin pour une gestion quotidienne de la vie d'une copropriété. "Une dérive similaire au système bancaire" Si ce cas est un peu extrême, il tend à se répandre avec la 'bancarisation' de cette profession.

 

Un phénomène que connaît bien Serge Pioli, une trentaine d'années d'implication dans les conseils syndicaux à son actif, partout en France, au gré de sa carrière. Dernièrement, à l'issue de son dernier mandat, il ne s'est pas représenté. "Parce que le système s'est trop perverti. Cette profession a amorcé une dérive similaire au système bancaire, en plaçant les fonds récoltés de façon maximale, avant de payer. Comme avec EDF qui exige une facturation le 15 de chaque mois, mais que certains syndics ne payent que le 16 pour ne pas perdre les intérêts sur la quinzaine de la somme placée. EDF applique donc systématiquement une pénalité de 50 € pour 'incident de paiement'… En quelques années, ce métier est devenu double : à 70 % il s'agit d'appeler des fonds et de les placer, et à 30 % de gérer la copropriété".

 

Une course aux bénéfices que dénonce ce fonctionnaire à la retraite en s'appuyant sur son vécu. Citant pêle-mêle l'intéressement de 1,5 à 3,5 % que prennent les syndics sur la surveillance des travaux, "qui fait que plus le patrimoine s'abîme, plus il faut faire des travaux sur lesquels le syndic se paye", les assemblées générales "organisées tous les 1 an et 3 mois, comme ça tous les 4 ans ils ont gagné 1 an", ou le fait de devoir saisir le TGI (avec intervention obligatoire d'un avocat) pour contester une décision prise en AG : "Du coup, personne ne le fait".

 

Lucide, il ne dédouane pas pour autant les copropriétaires, responsables en partie de cet état de fait : "Lors des AG, les deux tiers des copropriétaires ne viennent pas. Certains sont de simples bailleurs, d'autres vivent loin, d'autres encore sont trop âgés, et la majorité s'en fout. Tout simplement. Mais le système étant perverti, c'est aux citoyens de prendre les bonnes décisions, et de replacer les syndics dans leur rôle de service". L'Arc veille. L'Association des responsables de copropriété - qui fait partie de l'union nationale des Arc, Unarc, siégeant à ce titre à la commission nationale relative à la copropriété - est une "association de bénévoles à but non lucratif, dont la stratégie est de former les copropriétaires afin qu'ils deviennent des interlocuteurs crédibles du syndic", selon la définition qu'en donne Michel Sourgens, président de l'Arc-Roussillon. "Les syndics, c'est un domaine très compliqué, assez opaque, régi par la loi de 1965. Du coup, les copropriétaires ont du mal à entrer dedans, et se contentent souvent de voter sans vraiment s'y intéresser. Ce qui revient à donner un chèque en blanc aux syndics pour faire ce qu'ils veulent !"

 

Et Michel Sourgens parle d'expérience. Président de conseil syndical à Paris depuis 22 ans, il s'est installé à la pointe sud de Canet-en-Roussillon il y a 12 ans. Et n'a donc pas tardé à créer une antenne de l'Arc dans les P.-O. "Il y a énormément de problèmes dans les copropriétés, avec de gros cabinets de syndic qui détiennent plus de 40 % du parc, et ont tendance à marcher sur les pieds des copropriétaires. Il faut dire aussi que la majorité de ces groupes sont rachetés par des banques, et maintenant des fonds de pension américains, et ce qu'on leur demande c'est de la rentabilité. Nos associations sont donc des références du fonctionnement des copropriétés, et nous agissons à leur demande", détaille son confrère Claude Felouzat, président de l'Arc Auvergne-Centre. Et la tâche est loin d'être facile, car comme aiment à le répéter ces experts, "la copropriété est le lieu de conflits d'intérêts égoïstes divergents"…

Les fameux frais de photocopie

Dans la ligne de mire de l'Arc, les charges et autres honoraires de syndics. "Nous avons développé l'outil d'analyse OSCAR, qui se base sur des chiffres que nous comparons avec le journal Le Particulier. Et l'Unarc a publié une grande enquête en avril 2012, deux ans après l'arrêté Novelli (dont sont extraits les chiffres ci-dessus, NDLR). 92 % des contrats contrôlés ne reprennent pas l'intégralité des 44 tâches de gestion courante listées par l'arrêté, et facturent donc ces tâches en supplément du forfait administratif.

 

Par exemple, un certain groupe a créé une société d'archivage, à qui ils font sous-traiter ce qui est pourtant une tâche de la gestion courante en répercutant la facture sur les copropriétaires !". Au rayon des frais qui coûtent cher, la ligne 'photocopies' peut faire sourire… "Mais un syndic, par exemple, nous a facturé 50 000 photocopies ; à 0,22 € la photocopie, quand on sait que souvent les sociétés spécialisées facturent 0,08 € la photocopie, cela fait une sacrée marge !".

 

 

Madame Gorrand a le mérite de ne pas se borner à la reproduction d’un communiqué comme indiqué plus haut.

Elle prend ici un cas très particulier : celui d'une petite résidence moderne à Saint-Estève construite dans le cadre de la loi de défiscalisation Scellier. Des propriétaires issus de toute la France ont acheté pour défiscaliser, et ont confié la gestion des appartements à un syndic… toulousain ! On connaît bien ce genre de difficultés généré par des législateurs inexpérimentés.

On pouvait espérer que certains journalistes spécialisés allaient proposer des solutions pratiques pour remédier aux inconvénients de ce mécanisme. Déception ! Pas de suggestions ! On tape sur le syndic. En l’espèce il s’agit peut-être du promoteur qui a souhaité conserver la gestion. Il serait plus logique d’avoir un syndic perpignanais mais il serait quand confronté à une majorité de copropriétaires bailleurs se désintéressant curieusement de leur investissement.

 

On passe ensuite aux litanies.

La première est le placement des fonds : « En quelques années, ce métier est devenu double : à 70 % il s'agit d'appeler des fonds et de les placer, et à 30 % de gérer la copropriété". »

Pas question pour nous de contourner l’écueil. L’affaire Urbania a montré une perversion certaine du monde immobilier. Mais le remède existe depuis longtemps : l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 pose  le principe du dépôt des fonds syndicaux sur un compte bancaire séparé ouvert au nom du syndicat des copropriétaires. Dès lors la gestion est transparente. Le cas échéant, il est facile pour le conseil syndical de déceler l’existence de prélèvements abusifs.

L’article 18 contient hélas une disposition dérogatoire permettant aux syndics d’être dispensés de l’obligation d’ouvrir un compte séparé. La presse a-t-elle mené campagne contre cette disposition comme elle sait parfois le faire  ? NON ! Les copropriétaires ont-ils été invités à votre contre le projet de résolution tendant à cette dispense ? NON. Madame TAUBIRA, nouvelle Garde des Sceaux, a-t-elle l’intention de remédier au laxisme de ses prédécesseurs ? NON apparemment. Elle a d’autres soucis !

 

Autre litanie : « l'intéressement de 1,5 à 3,5 % que prennent les syndics sur la surveillance des travaux, qui fait que plus le patrimoine s'abîme, plus il faut faire des travaux sur lesquels le syndic se paye ». Une journaliste ne peut pas connaître les pratiques et jargons de toutes les activités dont elle traite. Elle doit néanmoins recueillir un minimum d’informations et solliciter, si besoin est, l’assistance de spécialistes.

Son informateur est ici « Serge Pioli, une trentaine d'années d'implication dans les conseils syndicaux à son actif, partout en France, au gré de sa carrière ». Et encore : « Une course aux bénéfices que dénonce ce fonctionnaire à la retraite en s'appuyant sur son vécu. »  L’intéressement incriminé ferait que plus le patrimoine s’abîme, plus il faut faire de travaux. Cette phrase est absurde ou dénuée de sens comme on voudra.

Un « vécu » mal compris et assimilé, semble-t-il ! La rémunération de cet honorable fonctionnaire était-elle un « intéressement » ou la contrepartie de son travail ?

Le syndic, représentant légal du syndicat des copropriétaires, est-il, oui ou non, chargé de l’entretien et la conservation de l’immeuble ? Avec trente années d’expérience, cet ancien conseiller syndical ignorerait-il qu’un syndic professionnel perçoit légalement des honoraires pour les prestations qu’il apporte à la réalisation de travaux exceptionnels ? Et aussi que sa responsabilité est engagée quand il ne respecte pas cette obligation, serait-ce contre l’avis seul conseil syndical ?

 

On est un peu mieux avec Michel Sourgens, président de l’ARC-Roussillon et Claude Felouzat, président de l'Arc Auvergne-Centre. Ils tombent d’accord pour reconnaître que « la copropriété est le lieu de conflits d'intérêts égoïstes divergents ». C’est une évidence… Encore faudrait-il ajouter que parfois elle au cœur d’intérêts égoïstes convergents.

On peut sourire avec  « Nous avons développé l'outil d'analyse OSCAR, qui se base sur des chiffres que nous comparons avec le journal Le Particulier ». Il s’agit d’établir des tableaux de coûts des charges par catégories d’immeubles. Il y a belle lurette que le Professeur Mouillart s’est attelé à cette tâche mais les « praticiens consuméristes » semblent en désaccord avec les techniques universitaires. À la vérité, le contrôle fin de l’évolution des charges ne présente d’intérêt qu’à propos d’un immeuble déterminé et sur une durée significative. Les comparaisons globales sont dépourvues de fiabilité.

 

Quant aux frais de photocopies ? Il existe, il est vrai, des écarts entre les différents syndics. Ils se réduisent. La Poste est présentement à 0,20 € . Vous savez comme moi qu’au marché, il y a aussi des écarts sur les poireaux, les maquereaux et le « mouton sous la mère ». Les projets de bordereaux de coûts des syndics sont faits pour être discutés. Il faut tirer des enseignements de la malheureuse réforme du régime des honoraires pour travaux. Le principal résultat a été une augmentation sensible des pourcentages proposés et finalement acceptés par les assemblées dans 70 % des cas. Pis encore : la Cour d’appel de Grenoble a finalement jugé que le syndic pouvait faire figurer ses desiderata dans le contrat de syndic en précisant qu’une acceptation de l’assemblée demeurait nécessaire.

 

 

Madame Gorrand aurait pu traiter des points plus importants et faire des propositions :

Ne pas accepter la dispense d’ouverture du compte séparé, bien sur

Ne pas accepter d’honoraires sur les placements du syndicat

Recommander l’ouverture d’un livret A au nom du syndicat, défiscalisé à hauteur de 76 500 €

Recommander au conseil syndical le contrôle de la ponctualité des paiements à trente jours pour les fournisseurs

Exiger la présentation de l’annexe comptable n° 1 après répartition effective et non plus fictive

Réduire le nombre et le volume des documents à joindre à la convocation (remplacement des 5 annexes par une balance unique, réduction du volume des contrats de syndic mais aussi des devis). Tout cela devrait réduire les coûts de photocopies

Etc…, etc …

 

Si j’étais rédacteur en chef d’un journal, je veillerais à l’utilité réelle d’un article sur les syndics de copropriété.

 

Il reste aussi beaucoup à faire pour le bon fonctionnement des copropriétés. On ne saurait le nier.

Mieux vaudrait coopérer en ce sens qu’imiter les « amuseurs » de la télévision, même ceux qui ont un brin de talent.

 

 

 

 

Mise à jour

05/11/2012