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Théorie de la répartition immédiate des charges

 

 

I.          exposÉ de la thÉorie

La théorie de la répartition immédiate des charges a été formulée par la Cour de cassation dans un arrêt du 10 mai 1968 [1] dans le cas particulier d’un créancier impayé du syndicat agissant contre les copropriétaires, chacun pour sa quote-part dans la dépense, pour obtenir le paiement de sa créance.

Elle est fondée sur la constatation que le syndicat, entre les fournisseurs et partenaires divers de la copropriété, d'une part et les copropriétaires d'autre part, n'est qu'un simple répartiteur de charges et collecteur de fonds.

Il faut donc considérer que dès son enregistrement par le syndic, chaque dépense est idéalement répartie entre les copropriétaires, chacun pour sa quote-part, et portée au débit de leur compte comme charge immédiatement liquide et exigible.

La pratique du regroupement périodique des dépenses en vue de leur répartition est un mécanisme propre à la communauté immobilière qui ne saurait faire obstacle au droit d’un créancier de rechercher les débiteurs finaux [2] de la charge. Souvent placée au rang des fictions juridiques, elle exprime pourtant une réalité incontestable si l’on se place au point de vue des créanciers..

 

Tout fournisseur impayé du syndicat peut demander paiement à chaque copropriétaire, dans la limite de sa quote-part. Il peut s'agir d'une action oblique, fondée sur la carence du syndicat. La Cour de Cassation a jugé que la contribution de chaque copropriétaire aux charges constitue le soutien de l'obligation du syndicat et correspond automatiquement à une créance de celui ci sur chacun des copropriétaires [3]. Elle s'était exprimée en termes identiques dès 1968  

Nonobstant l'oblicité ici incontestable [4] de l'action, la doctrine fait souvent état de l'action directe du fournisseur. Madame KISCHINEWSKI-BROQUISSE a analysé les incertitudes prétoriennes et doctrinales en la matière [5]. Elle fait remarquer que l'action oblique soumet le créancier au concours des autres créanciers. Ajoutons que le copropriétaire peut alors invoquer les exceptions opposables au syndicat, dont celle résultant du paiement déjà effectué au syndic  d’un appel de fonds spécifiquement effectué pour le préfinancement de la dépense concernée.

D’une autre manière, l'octroi judiciaire d'un délai de paiement à un copropriétaire débiteur a une incidence directe sur la trésorerie syndicale. Il se trouve opposable de fait aux créanciers du syndicat qui ne pourront être payés au terme convenu alors qu'ils ne sont pas parties à l'instance en recouvrement. On s'interroge sur le sort qui serait réservé à l'action dite directe du créancier à l'encontre du bénéficiaire du délai ou à sa tierce opposition à l'encontre du jugement l'ayant accordé.

Madame KISCHINEWSKI-BROQUISSE rejette la théorie de la répartition immédiate et la possibilité d'une action directe d'un fournisseur contre les copropriétaires. La personnalité morale du syndicat la rend impossible. Elle fait valoir que la Cour de Cassation ne pouvait y faire référence en 1968 [6]. C'est faire abstraction de l'arrêt du 30 octobre 1984, qui reprend la même motivation. M. GIVERDON, favorable à la recevabilité de l'action directe, n'en constate pas moins les incertitudes que nous avons relevées [7]. Il reconnaît aussi le caractère exceptionnel de l'action directe et la nécessité de la fonder sur un texte légal.

Il n'entre pas dans le cadre de cette étude de discuter les arguments favorables ou non à une telle conception. On se bornera à remarquer

en droit que l'objection tirée de la personnalité morale du syndicat doit être écartée. L'objet du syndicat, qui est par nature dépourvu de tout patrimoine propre, est limité à la gestion d'une indivision complexe. Il détermine la porosité de l'écran interposé entre les copropriétaires et l'environnement syndical et laisse subsister une transparence juridique relative dont les manifestations sont nombreuses. Le syndicat est un débiteur intermédiaire apparent [8].

en fait que la puissance des systèmes informatiques permet d'apprécier à tout moment, en dehors d'un traitement global, le montant exact de la quote-part des charges régulièrement enregistrées afférente à un lot déterminé, en vue de l'établissement d'une note d'information. Le résultat de cette opération peut être ajouté au montant dû sur les comptes répartis et diffusés.

La théorie de la répartition immédiate des charges est donc parfaitement conforme à la structure juridique du statut de la copropriété qui impose néanmoins la subsidiarité de l'action directe des créanciers.

II.         applications pratiques

Il ne s’agit pas d’une simple distraction de l’esprit.

La théorie de la répartition immédiate des charges est le fondement de « l’action directe » dont dispose tout créancier impayé du syndicat à l’égard des copropriétaires, pris chacun pour sa quote-part de la créance.

Nous avons placé l’expression action directe entre guillemets parce qu’il y a controverse au sujet de la nature de l’action, - réellement directe ou classiquement oblique -, qui n’est pas dépourvue d’intérêt pratique.

Si l’action est directe au sens juridique du terme, les copropriétaires (débiteurs en second) ne peuvent opposer au fournisseur impayé les exceptions opposables au syndicat. Ils doivent le payer même s’ils ont déjà payé un appel de fonds effectué par le syndic et spécifiquement affecté au financement de la facture litigieuse.

Si l’action est oblique, ils peuvent opposer les exceptions opposables au syndicat.

 

On peut, sur le même fondement, tenter de justifier la déchéance du terme évoquée par l’article L 19-2 nouveau. Rappelons qu’un copropriétaire débiteur d’une provision prévue à l’article L 14-1 (provisions sur charges courantes) peut être condamné par le juge des référés à payer non seulement cette provision mais également les autres provisions sur charges courantes non encore échues. Elles deviennent ainsi « immédiatement exigibles ».

Il faut toutefois remarquer que la situation juridique n’est pas identique à la précédente. Cette disposition doit être considérée comme une sanction et une mesure préventive contre tout nouveau retard de paiement qui rendrait nécessaire une nouvelle procédure. Il s’agit d’un mécanisme interne au syndicat.

Au contraire le mécanisme de « l’action directe » du créancier impayé contre les copropriétaires profite à un tiers cocontractant du syndicat et s’appuie clairement sur la transparence juridique du syndicat des copropriétaires.

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

10/10/2010

 



[1] Cass Civ 3 10/05/68 D 69 45 Note GIVERDON  RL 68 408

[2] ou finals, selon les goûts.

[3] Cass Civ 3  30/10/84 RTDC 85 418 Note GIVERDON  Rep Defr 85 I 390 note SOULEAU  Adm Avril 85

[4] par le choix du demandeur qui invoquait la carence du syndicat, visée par la Cour de Cassation

[5] La Copropriété n° 309

[6] Explicitement reconnue par la Loi de 1965

[7] La Copropriété 4e ed. n° 330

[8] Il est aussi un créancier apparent. Cf nos observations relatives à l'opposabilité aux partenaires syndicaux des délais de paiement accordés aux copropriétaires.