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La copropriété en 2013 ? Priorité à la réhabilitation du statut de la
copropriété et à la promotion de la loi de 1965 Le projet de loi n° 1074, fixant le statut de la
copropriété des immeubles bâtis, a été présenté le 2 juillet 1964 au nom de
M. Georges POMPIDOU, Premier Ministre, par Messieurs Jean FOYER, Garde des
Sceaux, Ministre de la Justice, Louis JACQUINOT, Ministre d’État chargé des
Territoires d’Outremer et Jacques MAZIOL, Ministre de la Construction. Le projet a été remanié à l’occasion des travaux
parlementaires auxquels ont participé très activement les rapporteurs des
Commissions des Lois : Messieurs Zimmermann à l’Assemblée Nationale et
Joseph Voyant au Sénat, ainsi que le Garde des Sceaux lui-même. Pour autant
les principes généraux énoncés dans l’exposé des motifs n’ont subi aucune
atteinte. Cet exposé rappelle que le cadre juridique de la
construction immobilière moderne demeurait celui défini au titre I de la loi
du 28 juin 1938, savoir les sociétés « ayant pour objet soit la
construction soit l’acquisition d’immeubles en vue de leur division par
fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en
jouissance. Il rappelle l’importance de la notion de lot.
Celui-ci comprend les parties privatives plus une quote-part de droits sur
les parties communes. On peut lire dans l’exposé des motifs : « en
réalité la quote-part des droits sur les parties communes constitue surtout
le passif de chaque lot, puisque c’est elle qui, aux termes de l’article [6]
est la base de répartition des dépenses ». Un actif et un passif ?
Le lot est bien une sorte d’universalité. On voit ainsi disparaître la controverse
futile entre les tenants de la conception unitaire du lot et ceux de la
conception dualiste. Cinquante ans après, force
est de constater avec surprise que ce projet comportait une sorte de
gros-œuvre virtuel progressivement révélé par les avatars les plus
divers : réformes législatives, errements jurisprudentiels, travaux
doctrinaux. Selon les cas, des modifications, - opportunes -, se sont
spontanément agrégées au statut tandis que d’autres, - malfaisantes -, ont
provoqué un véritable rejet du greffon. On trouve un bon exemple de ce rejet à
propos du courant de jurisprudence qui, pour un temps, avait abandonné la
notion de délai-couperet pour celui de deux mois prévu par l’article 42
alinéa 2 au sujet de l’action en contestation des décisions de l’assemblée.
Pour un oui ou pour un non le contestataire pouvait agir plusieurs années
après la date de l’assemblée ! La Cour de cassation a finalement rétabli
l’article 42 alinéa 2 dans la plénitude de son effectivité. Rejet plus significatif encore pour l’affligeant arrêté Novelli du 19 mars 2010 modifiant l’arrêté du 2 décembre 1986 relatif aux mesures de publicité des prix applicables dans certains secteurs professionnels. Il prétendait présenter une liste exhaustive des prestations de gestion courante. Les auteurs avaient cru devoir substituer un galimatias déplorable au jargon de notre secteur d’activité. Un mois plus tard, le décret n° 2010-391 du 20 avril 2010 modifiait l’article 33 du décret du 17 mars 1967 pour annuler les dispositions de l’arrêté Novelli relatives à la gestion des archives. Pour le surplus, les organisations professionnelles et les associations consuméristes sont tombées d’accord pour le fustiger. Citons enfin le cas de l’article 18-1 A,
créé par la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 précisant que les honoraires
« spécifiques » pouvant revenir au syndic à l’occasion de travaux
relevant de l’article 14-2 de la loi « sont votés lors de la même
assemblée générale que les travaux concernés,
aux mêmes règles de majorité ». Si l’on s’en tient à la lettre de ce
texte, il se borne à légaliser la pratique habituelle des syndics
professionnels. Une clause du « contrat de syndic » précisait les
modalités de calcul de ces honoraires, en fonction d’un pourcentage précisé
sur le coût total des travaux. Cette clause fixait un plafond de rémunération
mais celle-ci pouvait faire l’objet d’une négociation en vue d’une réduction. L’objet réel de la réforme
exigée par les associations de consommateurs, sur la base d’un projet mal rédigé,
était d’interdire l’insertion d’une tarification dans le « contrat de
syndic » et de s’en tenir à un débat en cours d’assemblée pour
fixer sa rémunération, au mépris des
dispositions du Code civil relatives au prix comme à celles de la réglementation
imposant la publicité des prix. La réforme a tourné à la
confusion de ses auteurs. Les syndics ont majoré leurs propositions qui sont
admises par l’assemblée sans réelle discussion. Elle a donc provoqué une
augmentation sensible de la rémunération des syndics. Pis encore ! Par arrêt du 5
mars 2012 la Cour d’appel de Grenoble, statuant sur les clauses prétendument
abusives d’un contrat de syndic, a jugé que celui-ci peut insérer dans son
contrat une clause mentionnant les modalités de rémunération qu’il souhaite,
dès lors qu’elle est indicative et non contraignante. On pourrait citer encore bien d’autres exemples de ces
rejets. Au contraire, la loi du 10 juillet
1965 s’ouvre aimablement à la modernisation du droit privé, a
fortiori quand cette « modernisation » se présente comme la
réhabilitation d’institutions juridiques anciennes voire même antiques. En l’absence de parties communes, les ensembles
immobiliers en volumes ne sont pas régis par
la loi du 10 juillet 1965. De nos jours on sourit un peu à la
vue de colonnes et descentes d’eau qui, dans ces ensembles sont privatives
dans la hauteur de chaque étage comme au bon vieux temps de l’article 664 du
Code civil. La vérité technique est qu’il s’agit bien de parties communes. On admet désormais que, dans les copropriétés
classiques, les fractions divises ne sont rien d’autre que des volumes
d’espace définis par le bâti. La Cour de cassation est allée
plus loin encore en jugeant que les lots correspondant à des emplacements
extérieurs de stationnement ne peuvent comporter en guise de partie privative
un droit exclusif de jouissance sur le sol partie commune (Cass.
civ. 3e 02/12/2009 Voir l’arrêt).
La partie privative ne peut être que la propriété du volume d’espace
supérieur à la parcelle commune constituant l’assiette du lot. C’est le droit de superficie qui nous vient de la plus haute
antiquité. Les techniques modernes permettent la détermination des
coordonnées géodésiques de tout point dans l’espace, et donc de tout volume
géométrique. Un volume d’espace ainsi défini est donc un bien immobilier
comme une maison. Il est désormais concevable de
définir la partie privative d’un lot par ses coordonnées dans l’espace et
d’affirmer que la ruine de l’immeuble ne s’accompagne pas forcément de la
disparition du lot. Le droit de copropriété acquiert ainsi la réelle
perpétuité qui lui manquait jusqu’à présent. Depuis près d’un siècle on parle quotidiennement des
conventions collectives du travail sans bien savoir ni ce qu’est leur nature
juridique exacte, ni que d’autres branches du droit connaissent également les
conventions collectives. Il est vrai que le Code civil ne fait aucun distinction
entre contrat et convention. Le contrat constate
l’accord de volontés réciproques : Dupont veut vendre ;
Durand veut acheter. La convention
constate l’accord de volontés convergentes : Dupont, Durand et
Dubois veulent constituer une association ou une société avec un objet social
clairement défini. On parle de l’effet relatif du contrat dans la mesure ou
il ne crée de droit et d’obligation qu’à l’égard de Dupont et Durand. La plupart des conventions sont collectives dans la
mesure où leurs dispositions ont vocation à devenir automatiquement
opposables dans l’avenir à des personnes n’ayant pas participé à
l’élaboration des actes fondateurs et sans même que ces personnes aient été
invitées à y adhérer. Ainsi en cas d’embauche : le nouveau salarié est
soumis de plein droit à la convention collective de la branche. Mais aussi en
cas d’acquisition d’un lot de copropriété : l’acquéreur est soumis de
plein droit au règlement de copropriété de l’immeuble sans que l’acte
d’acquisition fasse mention d’une quelconque adhésion. A cette nouvelle conception de la convention on peut
associer la notion d’acte juridique collectif qui apparaît enfin dans le
projet de réforme du Code civil. En 1960, le Doyen Marty, présentant la thèse de doctorat de Gabriel Roujou de Boubée consacrée à l’acte juridique collectif, rappelait l’existence en droit public des catégories de « l’union » ou de « l’acte collectif » et constatait déjà que « les juristes français de droit privé s’étaient peu préoccupés de ces notions ». Dans le projet de réforme, les décisions prises par une
assemblée générale sont des actes juridiques collectifs qui doivent être
distingués des actes unilatéraux et synallagmatiques (Voir le
projet). Les juristes spécialisés
n’éprouvent aucune difficulté à intégrer ces évolutions importantes du droit
privé français dans le statut de la copropriété. On pourrait penser que leurs
places y avaient été soigneusement réservées ! On peut ainsi proclamer que le
statut de la copropriété est en position fort avancée dans la modernisation
du droit français et qu’il faut rejeter les tentatives « soixante
huitardes » de faire passer la loi de 1965 pour un texte obsolète,
symbole des oppressions sociales de l’Ancien Régime. Le statut de la copropriété est
également en position fort avancée dans le domaine des pratiques comptables
pour les personnes morales. Le syndicat des copropriétaires est une personne morale.
A ce titre il est doté d’un patrimoine, mais sa personnalité morale est
relativement transparente. L’objet du syndicat est essentiellement de
« gérer » les prérogatives individuelles dont l’exercice est retiré
aux copropriétaires à raison du caractère collectif de l’institution. Le syndicat n’est pas une entreprise. Dans le temps de chaque
exercice, sa raison d’être a pour objet la fourniture des services dus aux
copropriétaires, la collecte des cotisations nécessaires au paiement des dépenses communes et la
répartition finale des charges, entre les copropriétaires. Dans le temps « long », elle a pour support
pérenne la conservation de l’immeuble. La gestion prévisionnelle impose alors
l’organisation cohérente des travaux de maintenance lourde et leur
préfinancement par la constitution de provisions. On peut considérer que les
copropriétaires doivent cotiser chaque année pour les travaux exceptionnels
quelles qu’en soient les dates d’exécution. On trouve les dispositions relatives à la comptabilité
des syndicats de copropriétaires aussi bien dans la loi du 10 juillet 1965, -
notamment l’article 14-3 -, que dans le décret et l’arrêté du 14 mars 2005. Le régime de la comptabilité des syndicats de
copropriétaires est totalement autonome, dispensé du respect des articles 1 à
5 de la loi n° 98-261 du 6 avril 1998. Le plan comptable ne comporte pas les
classes 2 et 3 affectées aux immobilisations, amortissements et stocks. La comptabilité syndicale ne fait apparaître aucun
« résultat » au sens comptable traditionnel. Le régime comptable a
pour unique objet la mise en œuvre du dispositif de contribution des
copropriétaires aux charges. Il révèle en fin d’exercice une différence entre
les provisions appelées et les dépenses engagées, soit une insuffisance, soit
un excédent. Cette différence est elle-même répartie. Il n’existe donc aucun
autre report à nouveau que ceux liés à des opérations rattachées à deux
exercices successifs ou à des comptes d’attente. Le patrimoine syndical est un patrimoine de transit ne
comportant que des créances et des dettes dont les totaux respectifs doivent
être constamment égaux. Si l’on fait abstraction de critiques justifiées
relatives à l’insuffisance du nombre des comptes et surtout à la présentation
trop complexe des documents de synthèse en fin d’exercice, on doit approuver
pleinement le particularisme de ce régime comptable. Il est parfaitement
adapté au régime de la copropriété divise. Sur ce point encore, des voix se sont élevées contre ce
particularisme. Il s’agit alors de prôner une Société de
Copropriété (SDC), immatriculée, SIRETée, avec publication des comptes,
un régime fiscal, administrée par un Conseil d’administration et son
Président, représentant légal. En sus un gestionnaire prestataire ou salarié
et l’externalisation des tâches : expert-comptable, commissaire aux comptes,
contrôleur de gestion, architectes et bureaux d’études, avocats, etc. On
peut citer des auteurs comme Cécile Barnasson et Pierre Olivier, spécialistes
de la gestion, du management et de l’informatique qui n’hésitent pas à proclamer que « la loi de 1965 tue » (sic) . Il faut bien au contraire
prendre ardemment la défense de la loi de 1965, contribuer à sa
réhabilitation en la purgeant des avanies qu’on lui a fait subir puis à sa
promotion en faisant apparaître les innovations juridiques enfin codifiées
qu’elle recelait dès sa promulgation. |
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