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Conseil constitutionnel Décision n° 2014-429 QPC du 21 novembre 2014 Droit de
présentation des notaires Le Conseil constitutionnel a été
saisi le 10 septembre 2014 par le Conseil d'État (décision n° 381108 du 10
septembre 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la
Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M.
Pierre T., relative à la conformité aux droits et libertés que la
Constitution garantit de l'article 91 de la loi du 28 avril 1816 sur les
finances. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7
novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu la loi du 28 avril 1816 modifiée
sur les finances ; Vu l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au
statut du notariat, notamment ses articles 1er et 1er bis ; Vu la loi n° 2012-387 du 22 mars
2012 relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches
administratives, notamment son article 29 ; Vu le règlement du 4 février 2010
sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions
prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour
le requérant par Me Jean de Calbiac, avocat au
barreau de Paris, enregistrées les 1er et 16 octobre 2014 ; Vu les observations en intervention
produites pour le Conseil supérieur du notariat par le cabinet Veil Jourde,
avocat au barreau de Paris, enregistrées le 2 octobre 2014 ; Vu les observations produites par
le Premier ministre, enregistrées le 2 octobre 2014 ; Vu les pièces produites et jointes
au dossier ; Me Jean de Calbiac pour le requérant,
Me Emmanuel Glaser, avocat au barreau de Paris, pour la partie intervenante
et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à
l'audience publique du 12 novembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes de
l'article 91 de la loi du 28 avril 1816 susvisée : « Les avocats à la Cour de
cassation, notaires, greffiers, huissiers, courtiers, commissaires-priseurs
pourront présenter à l'agrément de Sa Majesté des successeurs, pourvu qu'ils
réunissent les qualités exigées par les lois. Cette faculté n'aura pas lieu
pour les titulaires destitués. Les successeurs présentés à l'agrément, en
application du présent alinéa, peuvent être des personnes physiques ou des
sociétés civiles professionnelles. « Il sera statué par une loi particulière,
sur l'exécution de cette disposition, et sur les moyens d'en faire jouir les
héritiers et ayants-cause desdits officiers. « Cette faculté de présenter des
successeurs ne déroge point, au surplus, au droit de Sa Majesté de réduire le
nombre desdits fonctionnaires, notamment celui des notaires, dans les cas
prévus par la loi du 25 ventôse an XI sur le notariat » ; 2. Considérant que, selon le
requérant, les notaires exercent une fonction qui est au nombre des «
dignités, places et emplois publics » au sens de l'article 6 de la
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; qu'en permettant à
tout notaire titulaire d'un office de présenter son successeur à l'agrément
du garde des sceaux, ministre de la justice, les dispositions contestées
méconnaîtraient le principe d'égale admissibilité aux « dignités, places et
emplois publics » ; qu'en outre, le requérant fait valoir que ces
dispositions méconnaissent le principe d'égalité devant la commande publique
garanti par les articles 6 et 14 de la Déclaration de 1789 ; 3. Considérant que la question
prioritaire de constitutionnalité porte sur le mot « notaires » figurant dans
la première phrase du premier alinéa de l'article 91 de la loi du 28 avril
1816 ; 4. Considérant que, selon l'article
6 de la Déclaration de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit
qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les citoyens étant égaux à ses
yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics,
selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et
de leurs talents » ; 5. Considérant que le premier
alinéa de l'article 91 de la loi du 28 avril 1816 permet aux notaires titulaires
d'un office de présenter à l'agrément du garde des sceaux, ministre de la
justice, des successeurs « pourvu qu'ils réunissent les qualités exigées par
les lois » ; qu'en vertu du même alinéa, cette faculté n'a pas lieu pour les
titulaires destitués ; 6. Considérant que l'article 1er de
l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée dispose : « Les notaires sont les
officiers publics, établis pour recevoir tous les actes et contrats auxquels
les parties doivent ou veulent faire donner le caractère d'authenticité
attaché aux actes de l'autorité publique, et pour en assurer la date, en
conserver le dépôt, en délivrer des grosses et expéditions » ; 7. Considérant que l'article 1er
bis de cette même ordonnance précise les modalités d'exercice de la profession
de notaire ; qu'il prévoit, en particulier, que « le notaire peut exercer sa
profession soit à titre individuel, soit dans le cadre d'une société civile
professionnelle ou d'une société d'exercice libéral, soit en qualité de
salarié d'une personne physique ou morale titulaire d'un office notarial » ; qu'ainsi, les notaires exercent une
profession réglementée dans un cadre libéral au sens du paragraphe I de
l'article 29 de la loi du 22 mars 2012 susvisée ; 8. Considérant qu'il résulte de ce
qui précède que, s'ils participent à l'exercice de l'autorité publique et ont
ainsi la qualité d'officier public nommé par le garde des sceaux, les
notaires titulaires d'un office n'occupent pas des « dignités, places et
emplois publics » au sens de l'article 6 de la Déclaration de 1789 ; que, par
suite, le grief tiré de ce que le droit reconnu au notaire de présenter son
successeur à l'agrément du garde des sceaux méconnaîtrait le principe d'égal
accès aux dignités, places et emplois publics est inopérant ; 9. Considérant que la nomination
d'un notaire ne constitue pas une commande publique ; que, dès lors, le grief
tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la commande publique
est également inopérant ; que, par suite, le mot « notaires » figurant dans
la première phrase du premier alinéa de l'article 91 de la loi du 28 avril
1816, qui n'est contraire à aucun autre droit ou liberté que la Constitution
garantit, doit être déclaré conforme à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Le mot « notaires »
figurant dans la première phrase du premier alinéa de l'article 91 de la loi
du 28 avril 1816 modifiée sur les finances est conforme à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et
notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7
novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil
constitutionnel dans sa séance du 20 novembre 2014, où siégeaient : M.
Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE,
Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT
MARC et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 21 novembre 2014. |
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