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Conseil constitutionnel  Décision n° 2014-691 DC 20/03/2014
Loi ALUR Inconstitutionnalité des articles 19 et 153

 

 

I.       SUR L'ARTICLE 19 :

A.     Texte de la décision

B.      Commentaire du Conseil Constitutionnel

C.      Commentaire JPM

II.     - SUR L'ARTICLE 153 :

 

 

Par sa décision n° 2014-691 DC du 20 mars 2014 a notamment déclaré inconstitutionnels :

L’art 19 concernant « la demande d'autorisation de changement d'usage d'un local destiné à l'habitation faisant partie de la copropriété par un copropriétaire aux fins de le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage »

L’article 153 permettant l’établissement d’un acte de cession de parts de SCI par un professionnel de l'expertise comptable.

 

 

 

I.          SUR L'ARTICLE 19 :

 

A.        Texte de la décision

 

44. Considérant que l'article 19 de la loi insère dans le code de la construction et de l'habitation un article L. 631-7-1 B qui permet à l'assemblée générale des copropriétaires d'un immeuble relevant du statut de la copropriété de décider, à la majorité définie à l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965 susvisée, de soumettre à son accord préalable, à la majorité définie à l'article 24 de cette loi, « toute demande d'autorisation de changement d'usage d'un local destiné à l'habitation faisant partie de la copropriété par un copropriétaire aux fins de le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage » ; que ces dispositions ne sont toutefois pas applicables à l'autorisation temporaire mentionnée à l'article L. 631-7-1 A ;

 

45. Considérant que les députés requérants soutiennent que l'article 19 porte atteinte au droit de propriété et à la liberté contractuelle ;

 

46. Considérant qu'il appartient au législateur compétent, en application de l'article 34 de la Constitution, pour fixer les principes fondamentaux de la propriété et des droits réels, de définir les droits de la copropriété d'un immeuble bâti sans porter d'atteinte injustifiée aux droits des copropriétaires ;

 

47. Considérant que le législateur, afin de lutter contre la pénurie de logements destinés à la location, a permis à l'assemblée générale des copropriétaires d'un immeuble de décider, à la majorité des voix de tous les copropriétaires, de soumettre discrétionnairement à son accord préalable, et sans préjudice des pouvoirs conférés à l'autorité administrative par les articles L. 631-7 et suivants du code de la construction et de l'habitation, « toute demande d'autorisation de changement d'usage d'un local destiné à l'habitation faisant partie de la copropriété par un copropriétaire aux fins de le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage » ; qu'il a ainsi, dans des conditions contraires à l'article 2 de la Déclaration de 1789, permis à l'assemblée générale des copropriétaires de porter une atteinte disproportionnée aux droits de chacun des copropriétaires ;

 

48. Considérant, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre grief, que l'article 19 de la loi doit être déclaré contraire à la Constitution ;

 

 

 

B.        Commentaire du Conseil Constitutionnel

 

2. – L’autorisation de la copropriété (article 19)

L’article 19, issu d’un amendement présenté par Mme Annick Lepetit à l’Assemblée nationale, permettait à l’assemblée générale des copropriétaires de décider à la majorité des copropriétaires de soumettre à son accord toute demande d’autorisation de changement d’usage d’un local destiné à l’habitation par un copropriétaire aux fins de le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage.

Cet article 19 insérait dans le CCH un article L. 631-7-1 B ainsi rédigé : « Si l’assemblée générale des copropriétaires d’un immeuble relevant du statut de la copropriété souhaite que soit soumise à son accord préalable, à la majorité définie à l’article 24 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, toute demande d’autorisation de changement d’usage d’un local destiné à l’habitation faisant partie de la copropriété par un copropriétaire aux fins de le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage, elle le décide à la majorité de l’article 25 de la même loi.

« Ces dispositions ne s’appliquent pas à l’autorisation temporaire mentionnée à l’article L. 631-7-1 A.

« Le premier alinéa du présent article s’applique sans préjudice des éventuelles règles relatives aux modalités d’autorisation du changement d’usage d’un local qui figurent dans le règlement de copropriété de l’immeuble, défini à l’article 8 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée. »

L’article 24 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis prévoit en son premier alinéa que « les décisions de l’assemblée générale sont prises à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents ou représentés, s’il n’en est autrement ordonné par la loi » et l’article 25 énumère les décisions qui « ne sont adoptées qu’à la majorité des voix de tous les copropriétaires ».

L’assemblée générale des copropriétaires pouvait donc, en vertu des dispositions contestées, mettre en place, à la majorité des voix de tous les copropriétaires, un régime d’accord préalable à la demande d’autorisation de changement d’usage, chacune des autorisations étant alors votée à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents ou représentés en assemblée générale.

Après avoir jugé « qu’il appartient au législateur compétent, en application de l’article 34 de la Constitution, pour fixer les principes fondamentaux de la propriété et des droits réels, de définir les droits de la copropriété d’un immeuble bâti sans porter d’atteinte injustifiée aux droits des copropriétaires » (cons. 46), le Conseil a déclaré contraires à la Constitution les dispositions de l’article 19.

L’objectif poursuivi par le législateur avec cette disposition était identique à celui poursuivi par l’article 16 de la loi déférée : lutter contre la pénurie des logements destinés à la location. Toutefois, la voie empruntée posait un problème au regard des atteintes aux droits des copropriétaires. Le Conseil constitutionnel a relevé qu’en adoptant les dispositions contestées, « il a permis à l’assemblée générale des copropriétaires d’un immeuble de décider, à la majorité des voix de tous les copropriétaires, de soumettre discrétionnairement à son accord préalable, et sans préjudice des pouvoirs conférés à l’autorité administrative par les articles L. 631-7 et suivants du code de la construction et de l’habitation, "toute demande d’autorisation de changement d’usage d’un local destiné à l’habitation faisant partie de la copropriété aux fins de le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage" ». Le Conseil a jugé que le législateur a ainsi « dans des conditions contraires à l’article 2 de la Déclaration de 1789, permis à l’assemblée générale des copropriétaires de porter une atteinte disproportionnée aux droits de chacun des copropriétaires » (cons. 47).

 

C.        Commentaire jpm

La proposition présentée pouvait avoir un intérêt pratique. Mais elle était affectée par des vices fondamentaux.

Cet article 19 insérait dans le CCH un article L. 631-7-1 B ainsi rédigé : « Si l’assemblée générale des copropriétaires d’un immeuble relevant du statut de la copropriété souhaite que soit soumise à son accord préalable, à la majorité définie à l’article 24 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, toute demande d’autorisation de changement d’usage d’un local destiné à l’habitation faisant partie de la copropriété par un copropriétaire aux fins de le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage, elle le décide à la majorité de l’article 25 de la même loi.

« Ces dispositions ne s’appliquent pas à l’autorisation temporaire mentionnée à l’article L. 631-7-1 A.

Le premier vice était de placer dans le CCH une disposition qui devait aller dans le statut de la copropriété et donc dans la loi du 10 juillet 1965. On peut formuler le même reproche à d’autres dispositions de la loi ALUR.

Le second était une rédaction malheureuse en une phrase quasiment proustienne.

Le troisième, juridiquement primordial, était de permettre à la décision de l’article 24 une décision affectant le droit de propriété, - pour certains le droit de copropriété -, de chacun des copropriétaires.

Il était donc facile de ressortir l’article 2 de la Déclaration de 1789 :

« Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'Homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l'oppression. »

 

Or, selon des voix autorisées, il s’agissait, et il s’agit encore de lutter contre un trafic accompagné de profits abusifs. Le caractère disproportionné de l’atteinte au droit de propriété était l’écueil à éviter. Il fallait au moins le réduire par la nécessité d’une majorité qualifiée et, mieux encore, caractériser la gêne apportée à la collectivité.

 

Il reste que le rejet final de l’amendement laisse subsister les clauses restrictives existant dans un grand nombre de règlements de copropriété. Mais la bévue des auteurs de l’amendement compliquera certainement la tâche des avocats des syndicats de copropriétaires à l’occasion des litiges qui ne manqueront pas d’apparaître.

 

 

II.         - SUR L'ARTICLE 153 :

 

74. Considérant que l'article 153 complète l'article 1861 du code civil pour imposer que la cession de la majorité des parts sociales d'une société civile immobilière remplissant certaines conditions soit constatée par un acte reçu en la forme authentique ou par un acte sous seing privé contresigné par un avocat ou par un professionnel de l'expertise comptable ;

 

75. Considérant que, selon les sénateurs requérants, ces dispositions, en confondant l'acte sous seing privé contresigné par un avocat et celui contresigné par un professionnel de l'expertise comptable, méconnaissent l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi et portent atteinte à la sécurité juridique ; qu'en renvoyant aux conditions prévues au chapitre Ier bis du titre II de la loi du 31 décembre 1971, applicable aux avocats, pour définir l'acte sous seing privé contresigné par un professionnel de l'expertise comptable, le législateur aurait également méconnu l'étendue de sa compétence ;

 

76. Considérant que l'article 153 a été introduit par amendement en première lecture à l'Assemblée nationale ; qu'il modifie des dispositions relatives aux actes qui doivent être accomplis par des officiers publics ou des membres des professions réglementées ; que ces dispositions ne présentent pas de lien avec les dispositions du projet de loi initial ; qu'elles ont donc été adoptées selon une procédure contraire à la Constitution ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les griefs soulevés par les sénateurs requérants, l'article 153 doit être déclaré contraire à la Constitution ;

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

22/10/2014