00043608

 

CHARTE

 

Ne sont autorisées que
 1) les reproductions et copies réservées à l’usage privé, non commercial du copiste à l’exclusion de toute utilisation collective

2) les analyses et courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration

3) l’insertion d’extraits dans un ouvrage de formation

associées, pour 2) et 3) à la citation du site

 

 

 

 

Vente d’un immeuble par une commune

Clause de domanialité publique affectant des « portiques »

Division ultérieure de la propriété de l’immeuble

Constitution des « portiques » en partie privative d’un lot

Atteinte à la clause de domanialité (oui)

 

 

 

Cassation civile 1e 25 février 2009

Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 21 février 2007

N° de pourvoi: 07-15772

Cassation

 

 

 

Donne acte à Mmes X... de leur reprise d’instance ;

 

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

 

Vu les articles L. 1311-1 du code général de la propriété des personnes publiques (Note JPM : Il semble s’agir en réalité de l’article L 3111-1) et L. 1311-1 du code général des collectivités territoriales ;

 

Attendu que le 7 mai 1881, la commune de Sospel a vendu par adjudication, un bien immobilier, dénommé “Casino”, place Saint-Nicolas, l’article 5 du cahier des charges de l’adjudication prévoyant que les portiques de ce bien resteraient toujours du domaine public ; qu’en 1975, cet immeuble a été divisé et une copropriété créée ; que M. X..., copropriétaire, invoquant l’inaccessibilité de ses lots et une atteinte à la destination de l’immeuble, a assigné la commune de Sospel, les époux Y..., occupants des portiques, les consorts Z..., propriétaires de locaux donnés à bail aux époux Y..., afin d’obtenir la condamnation sous astreinte de la commune, à faire cesser toute activité commerciale et à restituer le passage public par la suppression des installations, ainsi que l’indemnisation de son préjudice ;

 

Attendu que pour condamner la commune à faire cesser l’occupation des portiques et à faire supprimer l’installation électrique, l’arrêt retient qu’il résulte de documents d’un maître d’œuvre de 1988 et d’un procès-verbal d’assemblée générale de copropriété de la même année, notifié à la commune, qui ne l’a pas contesté, acceptant par là-même sa qualité de copropriétaire, que ces portiques constituent la partie privative d’un lot dont la commune est propriétaire ; que les règles essentielles du régime de la copropriété telles que fixées par la loi du 10 juillet 1965 sont incompatibles tant avec le régime de la domanialité publique qu’avec les caractères des ouvrages publics, que les portiques appartenant à la commune se trouvant dans un immeuble soumis au régime de la copropriété n’appartiennent pas au domaine public et ne peuvent être regardés comme constituant un ouvrage public, quand bien même ils seraient destinés à satisfaire les besoins d’un service public, les règles de la copropriété devant prévaloir;

 

Qu’en statuant ainsi après avoir relevé qu’il résultait de l’article 5 du cahier des charges de l’adjudication que les portiques resteraient toujours du domaine public, ce dont il résultait qu’il s’agissait d’un bien appartenant au domaine public avant la division de l’immeuble par lots, alors que les biens du domaine public sont imprescriptibles et inaliénables et qu’un règlement de copropriété ne peut soustraire au domaine public d’une commune un ouvrage public préexistant à la copropriété, la cour d’appel a violé les articles susvisés ;

 

 

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

 

 

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 21 février 2007, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée ;

 

Condamne les défendeurs aux dépens ;

 

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

 

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

 

 

 

Commentaires :

 

Il est désormais admis qu’une personne de droit public propriétaire d’un lot de copropriété est une copropriétaire comme les autres, privée de toute prérogative spécifiquement liée à sa qualité (Voir 1/2.3.1  La copropriété et le droit public).

De nombreuses prérogatives liées à la domanialité publique sont contraires aux principes généraux du statut de la copropriété. On se bornera ici à citer la faculté qu’a une personne publique de modifier librement l’affectation d’un bien du domaine public ou d’effectuer à son gré des travaux.

Le Conseil d’Etat, par un arrêt du 11 février 1994 [1] a pris en considération ces difficultés pour juger que les dispositions du statut de la copropriété « sont incompatibles tant avec le régime de la domanialité publique qu’avec les caractères des ouvrages publics ». Depuis les décisions rendues à ce sujet l’ont été dans le même sens.

 

Mais cette règle s’applique au cas d’un lot acquis par une personne dans une immeuble en copropriété pour les besoins d’un service public : une Trésorerie par exemple.

Elle  reste contestée pour les ouvrages publics répondant aux trois conditions traditionnelles

Être un bien immobilier

Être un ouvrage de l’homme et non de la nature

Être affecté à l’intérêt général : usage du public ou affectation aux besoins d’un service public.

 

Reste le régime particulier des monuments et vestiges historiques, trop négligé par les spécialistes de la copropriété, alors qu’il est traité par les fiscalistes.

Rappelons simplement que, pour bénéficier des avantages fiscaux liés au régime des Monuments historiques, la copropriété doit accepter le classement par Arrêté préfectoral, soit pour l’inscription sur l’inventaire supplémentaire des monuments historiques, soit en tant que monument historique.

L’assemblée générale de la copropriété doit organiser le droit de visite qui est obligatoire pour obtenir la défiscalisation. Celle-ci est égale à 100% si l’immeuble est ouvert à la visite et à 50% dans le cas contraire et ce, au titre des déductions des revenus y compris les intérêts d’emprunt sur le revenu global du propriétaire. Selon Me Brane, la décision peut être prise à la majorité simple de l’article L 24.

Le droit de visite doit être au moins de 100 jours par an, dont les dimanches et jours fériés au cours des mois d’avril à octobre inclus avec 80 jours au moins durant les mois de juin à septembre.

L’éminent auteur rappelle que certaines administrations fiscales opposent aux contribuables un arrêt du Conseil d’Etat du 19 mars 2003 aux termes duquel la défiscalisation ne serait pas possible sur une copropriété ou plus exactement sur des parties communes de celle-ci.

En cette espèce, le contribuable voulait organiser une visite des parties communes dont il n’avait pas la pleine disposition sans modification du règlement de copropriété. Il ne justifiait pas d’une Assemblée Générale de la copropriété réglementant le droit de visite et encore moins d’une éventuelle convention notariée de servitude avec la Ville pour fixer le droit de visite et éventuellement transmettre dans le domaine public la cour commune et ses éléments architecturaux.

Selon Me Brane cette convention notariée instituant une servitude n’est pas nécessaire, non plus que la transmission dans le domaine public, mais elle est néanmoins conseillée pour éviter toutes difficultés d’interprétation de l’Arrêt du Conseil d’Etat sus-visé du 19 mars 2003.

A l’argumentation des administrations fiscales qui prétendent que le contribuable ne serait pas propriétaire des parties communes qui ne constitueraient donc pas un immeuble soumis en tant que tel à la Loi sur les monuments historiques, il faut alors répondre que le contribuable dispose bien de droits indivis sur les parties communes d’un immeuble en copropriété par les tantièmes de copropriété dont il est propriétaire. Les tantièmes de copropriété sont des biens immeubles.

 

Ces indications nous rappellent que la présence de monuments ou vestiges historiques au sein d’une copropriété pose des problèmes souvent complexes.

 

En l’espèce, le 7 mai 1881, la commune de Sospel a vendu par adjudication, un bien immobilier, dénommé “Casino”, place Saint-Nicolas, l’article 5 du cahier des charges de l’adjudication prévoyant que les portiques de ce bien resteraient toujours du domaine public ; en 1975, cet immeuble a été divisé et une copropriété créée.

La commune a concédé l’exploitation commerciale des portiques. Une terrasse de buvette gêne l’accès à l’immeuble. Cette gêne est à l’origine de l’instance.

 

La Cour d’appel a condamné la commune de SOSPEL à faire cesser l’occupation des portiques par les époux BEYE ou leurs successeurs et à faire supprimer 1’installation électrique aménagée sous ceux-ci, sous astreinte de 200,00 € par jour de retard passé un délai de un mois à compter du présent arrêt, en retenant l’argumentation suivante : 

 

Il a été produit deux documents émanant de Raymond A..., maître d’oeuvre, le 16 janvier 1988 et déterminant la consistance de 12 lots, leur propriétaire et les tantièmes de copropriété qui y sont attachés. Dans ces documents, la commune de SOSPEL est mentionnée comme propriétaire du lot 1, correspondant aux portiques, auquel sont affectés 97 millièmes de copropriété.

Le 4 août 1988 l’assemblée générale des copropriétaires a confirmé son approbation du descriptif et des millièmes de copropriété établis par M. A.... La commune de SOSPEL avait régulièrement été convoquée à cette assemblée mais elle était absente. Le procès-verbal de cette assemblée lui a été notifié en même temps que celui de l’assemblée du 11 juin 1993 et la commune de SOSPEL n’a formé aucune contestation des décisions de ces deux assemblées générales, acceptant par là même sa qualité de copropriétaire telle que définie suivant l’assemblée du 04 août 1988.

En l’état de ces éléments, les portiques doivent être considérés comme constituant la partie privative d’un lot de l’immeuble sis 7 place Saint Nicolas qui comporte également des locaux à usage commercial et à usage d’habitation appartenant à des personnes privées. En application de l’article 1 de la loi du 10 juillet 1965, cet immeuble étant divisé en lots, le statut de la copropriété lui est applicable.

Les règles essentielles du régime de la copropriété telles qu’elles sont fixées par la loi du 10 juillet 1965 sont incompatibles tant avec le régime de la domanialité publique qu’avec les caractères des ouvrages publics. Les portiques appartenant à la commune de SOSPEL se trouvant dans un immeuble soumis au régime de la copropriété n’appartiennent pas au domaine public et ne peuvent être regardés comme constituant un ouvrage public, quand bien même ils seraient destinés à satisfaire les besoins d’un service public. Ce sont donc les règles de la copropriété qui doivent prévaloir ;

 

La Cour de cassation juge au contraire « Qu’en statuant ainsi après avoir relevé qu’il résultait de l’article 5 du cahier des charges de l’adjudication que les portiques resteraient toujours du domaine public, ce dont il résultait qu’il s’agissait d’un bien appartenant au domaine public avant la division de l’immeuble par lots, alors que les biens du domaine public sont imprescriptibles et inaliénables et qu’un règlement de copropriété ne peut soustraire au domaine public d’une commune un ouvrage public préexistant à la copropriété, la cour d’appel a violé les articles susvisés (articles L. 1311-1 du code général de la propriété des personnes publiques (Note JPM : Il semble s’agir en réalité de l’article L 3111-1) et L. 1311-1 du code général des collectivités territoriales) ;

 

L’article L1311-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi conçu :

« Conformément aux dispositions de l'article L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques, les propriétés qui relèvent du domaine public des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements sont inaliénables et imprescriptibles.

« Toutefois, les propriétés qui relèvent de ce domaine peuvent être cédées dans les conditions fixées à l'article L. 3112-1 du code général de la propriété des personnes publiques ou échangées dans les conditions fixées aux articles L. 3112-2 et L. 3112-3 du même code. »

 

Article L3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques est ainsi conçu :

« Les biens des personnes publiques mentionnées à l'article L. 1, qui relèvent du domaine public, sont inaliénables et imprescriptibles. »

 

L’article 5 du cahier des charges de l’adjudication était sans nul doute déterminant. L’état descriptif de division et le règlement de copropriété ne pouvait pas l’emporter sur une disposition aussi claire du cahier des charges.

 

 

 

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

 

 

Moyens produits par la SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky, avocat aux Conseils pour la commune de Sospel.

 

 

PREMIER MOYEN DE CASSATION

 

 

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR fait application du statut de la copropriété aux portiques intégrés à l’immeuble sis 7, place saint Nicolas à SOSPEL et appartenant à la commune de SOSPEL et d’AVOIR condamné la commune de SOSPEL à faire cesser l’occupation des portiques par les époux BEYE ou leurs successeurs et à faire supprimer 1’installation électrique aménagée sous ceux-ci, sous astreinte de 200,00 Euros par jour de retard passé un délai de un mois à compter du présent arrêt ;

 

 

AUX MOTIFS QU’il résulte de l’article 5 du cahier des charges de l’adjudication de l’immeuble du CASINO appartenant à la commune de SOSPEL en date du 21 janvier 1881 que les portiques resteraient toujours du domaine public, la réparation du plafond et l’entretien du pavé étant à la charge de l’adjudicataire. Les plans dressés le 15 novembre 1878 et annexés au projet d’aliénation de l’immeuble font apparaître que cette aliénation concernait l’immeuble situé au 7 place saint Nicolas et que l’ensemble des portiques litigieux faisait partie de cet immeuble. Au vu du plan cadastral, cet immeuble correspondait à la parcelle cadastrée K 42, l’immeuble situé au 5 place Saint Nicolas correspondant à la parcelle K 41. Ces deux parcelles ont été regroupées et figurent désormais au cadastre sous la référence K 464. Le titre de propriété de Amar X... en date du 24 mars 1982 fait apparaître que, concernant la parcelle K 41, un état descriptif de division de l’immeuble a été établi le 15 décembre 1975 et modifié le jour même de l’acte de vente. Aucun de ces deux états n’a été communiqué à la Cour, si bien qu’il est impossible de déterminer si les immeubles situés au 5 et au 7 place Saint Nicolas constituent une copropriété ou deux. Par ailleurs, il convient de noter qu’aucune division de l’immeuble n’était antérieurement intervenue, alors que celui-ci avait fait l’objet de deux partages les 14 avril 1931 et 12 janvier 1967. Il est produit deux documents émanant de Raymond A..., maître d’oeuvre, le 16 janvier 1988 et déterminant la consistance de 12 lots, leur propriétaire et les tantièmes de copropriété qui y sont attachés. Dans ces documents, la commune de SOSPEL est mentionnée comme propriétaire du lot 1, correspondant aux portiques, auquel sont affectés 97 millièmes de copropriété. Le 4 août 1988 l’assemblée générale des copropriétaires a confirmé son approbation du descriptif et des millièmes de copropriété établis par M. A.... La commune de SOSPEL avait régulièrement été convoquée à cette assemblée mais elle était absente. Le procès-verbal de cette assemblée lui a été notifié en même temps que celui de l’assemblée du 11 juin 1993 et la commune de SOSPEL n’a formé aucune contestation des décisions de ces deux assemblées générales, acceptant par là même sa qualité de copropriétaire telle que définie suivant l’assemblée du 04 août 1988. En outre, en l’état de ces éléments, les portiques doivent être considérés comme constituant la partie privative d’un lot de l’immeuble sis 7 place Saint Nicolas qui comporte également des locaux à usage commercial et à usage d’habitation appartenant à des personnes privées. En application de l’article 1 de la loi du 10 juillet 1965, cet immeuble étant divisé en lots, le statut de la copropriété lui est applicable. Les règles essentielles du régime de la copropriété telles qu’elles sont fixées par la loi du 10 juillet 1965 sont incompatibles tant avec le régime de la domanialité publique qu’avec les caractères des ouvrages publics. Les portiques appartenant à la commune de SOSPEL se trouvant dans un immeuble soumis au régime de la copropriété n’appartiennent pas au domaine public et ne peuvent être regardés comme constituant un ouvrage public, quand bien même ils seraient destinés à satisfaire les besoins d’un service public. Ce sont donc les règles de la copropriété qui doivent prévaloir ;

 

 

ALORS, D’UNE PART, QUE les biens du domaine public des collectivités territoriales sont inaliénables et imprescriptibles et destinés à l’usage du public ; par nature, ces biens publics échappent aux dispositions de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, qui ne sont applicables qu’aux immeubles faisant l’objet de droits de propriété privatifs ; qu’en l’espèce, dès lors qu’elle constatait elle-même qu’en vertu du cahier des charges de l’adjudication en date du 21 janvier 1881 les portiques de l’immeuble Casino appartenant à la commune de SOSPEL resteraient toujours du domaine public et qu’ils étaient bien « destinés à satisfaire les besoins d’un service public », la cour d’appel ne pouvait soumettre lesdits « portiques appartenant à la commune de SOSPEL » au régime de la copropriété au prétexte qu’un procès verbal d’assemblée générale de copropriété, alors non contesté, avait désigné la commune comme copropriétaire ; qu’en statuant comme elle l’a fait, par un motif impuissant, en l’absence de procédure de déclassement du bien appartenant au domaine public, à soustraire le domaine public de la commune des règles qui le protègent dans l’intérêt général, la cour d’appel a violé, ensemble, les articles 1er et suivants de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 et L 1311-1 du code général des collectivités territoriales ;

 

 

ALORS, D’AUTRE PART, QUE les termes d’un procès verbal d’assemblée générale ne peut valoir titre de propriété et ne peut produire d’effets qu’entre les copropriétaires privés ; qu’en l’espèce, après avoir constaté que les portiques appartenaient à la commune de SOSPEL, que l’acte d’adjudication de 1881 déclarait qu’ils « resteraient toujours du domaine public », qu’ils étaient toujours restés affectés à un usage public et commercial depuis 1885, la cour d’appel ne pouvait énoncer qu’ils constituaient la partie privative d’un lot de l’immeuble du 7, place saint Nicolas et étaient soumis au régime de la copropriété, au prétexte qu’un procès verbal d’assemblée générale de copropriété en avait stipulé ainsi et que la commune, après en avoir reçu notification, ne l’avait pas contesté quand un tel procès verbal était sans effet sur les droits de la collectivité publique, et ne pouvait ni déterminer le régime juridique des portiques ni régir la propriété des biens du domaine public de la collectivité territoriale, la cour d’appel a violé derechef les articles 42 et suivants de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 par fausse application et L 1311-1 du code général des collectivités territoriales.

 

 

SECOND MOYEN DE CASSATION

 

 

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la commune de SOSPEL à faire cesser l’occupation des portiques par les époux Y... ou leurs successeurs et à faire supprimer 1’installation électrique aménagée sous ceux-ci, sous astreinte de 200,00 Euros par jour de retard passé un délai de un mois à compter du présent arrêt ;

 

AUX MOTIFS QU’il résulte de l’article 5 du cahier des charges de l’adjudication de l’immeuble du CASINO appartenant à la COMMUNE DE SOSPEL en date du 21 janvier 1881 que les portiques resteraient toujours du domaine public, la réparation du plafond et l’entretien du pavé étant à la charge de l’adjudicataire. Les plans dressés le 15 novembre 1878 et annexés au projet d’aliénation de l’immeuble font apparaître que cette aliénation concernait l’immeuble situé au 7 place saint Nicolas et que l’ensemble des portiques litigieux faisait partie de cet immeuble. Au vu du plan cadastral, cet immeuble correspondait à la parcelle cadastrée K 42, l’immeuble situé au 5 place Saint Nicolas correspondant à la parcelle K 41. Ces deux parcelles ont été regroupées et figurent désormais au cadastre sous la référence K 464. Le titre de propriété de Amar X... en date du 24 mars 1982 fait apparaître que, concernant la parcelle K 41, un état descriptif de division de l’immeuble a été établi le 15 décembre 1975 et modifié le jour même de l’acte de vente. Aucun de ces deux états n’a été communiqué à la Cour, si bien qu’il est impossible de déterminer si les immeubles situés au 5 et au 7 place Saint Nicolas constituent une copropriété ou deux. Par ailleurs, il convient de noter qu’aucune division de l’immeuble n’était antérieurement intervenue, alors que celui-ci avait fait l’objet de deux partages les 14 avril 1931 et 12 janvier 1967. Il est produit deux documents émanant de Raymond A..., maître d’oeuvre, le 16 janvier 1988 et déterminant la consistance de 12 lots, leur propriétaire et les tantièmes de copropriété qui y sont attachés. Dans ces documents, la commune de SOSPEL est mentionnée comme propriétaire du lot 1, correspondant aux portiques, auquel sont affectés 97 millièmes de copropriété. Le 4 août 1988 l’assemblée générale des copropriétaires a confirmé son approbation du descriptif et des millièmes de copropriété établis par M. A.... La commune de SOSPEL avait régulièrement été convoquée à cette assemblée mais elle était absente. Le procès-verbal de cette assemblée lui a été notifié en même temps que celui de l’assemblée du 11 juin 1993 et la COMMUNE DE SOSPEL n’a formé aucune contestation des décisions de ces deux assemblées générales, acceptant par là même sa qualité de copropriétaire telle que définie suivant l’assemblée du 04 août 1988. En outre, en l’état de ces éléments, les portiques doivent être considérés comme constituant la partie privative d’un lot de l’immeuble sis 7 place Saint Nicolas qui comporte également des locaux à usage commercial et à usage d’habitation appartenant à des personnes privées. En application de l’article 1 de la loi du 10 juillet 1965, cet immeuble étant divisé en lots, le statut de la copropriété lui est applicable. Les règles essentielles du régime de la copropriété telles qu’elles sont fixées par la loi du 10 juillet 1965 sont incompatibles tant avec le régime de la domanialité publique qu’avec les caractères des ouvrages publics. Les portiques appartenant à la commune de SOSPEL se trouvant dans un immeuble soumis au régime de la copropriété n’appartiennent pas au domaine public et ne peuvent être regardés comme constituant un ouvrage public, quand bien même ils seraient destinés à satisfaire les besoins d’un service public. Ce sont donc les règles de la copropriété qui doivent prévaloir.

 

Sur les troubles allégués et les responsabilités : En application de l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965, chaque copropriétaire use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble. Les époux Y... sont propriétaires d’un local commercial situé au rez-de-chaussée de l’immeuble situé 5 place Saint Nicolas dans lequel ils exploitent un commerce de restauration. Ils ont également loué le local appartenant aux consorts Z... situé au rez-de-chaussée de l’immeuble situé au 7 place saint Nicolas où est exploité un commerce de tabac - presse. Si le cahier des charges du 7 mars 1881 indique que les portiques resteront du domaine public, il ne précise aucunement que leur destination est le passage du public. En l’absence de production du règlement de copropriété de l’immeuble en cause, il est impossible de déterminer quelle destination a été affectée aux portiques litigieux ou aux locaux du rez-de-chaussée occupés par les époux Y.... Amar X... n’est donc pas fondé à invoquer le fait que l’occupation des portiques porte atteinte à la destination de l’immeuble. Il en est de même relativement aux manquements à la réglementation relative aux monuments historiques faute d’éléments suffisants. Suivant contrat en date des 23 et 24 mars 2000, la commune de SOSPEL a concédé à Alioune Y... “la terrasse sise Place saint Nicolas d’une superficie de 25 m2”. Il n’est toutefois pas précisé la localisation exacte de cette terrasse et, notamment, le fait qu’elle soit située sous les portiques en cause, alors qu’il résulte d’une photographie produite par les consorts Z... que des tables et des chaises sont installées sur la Place saint Nicolas même. Par ailleurs, il n’est produit aucun contrat relatif à l’installation de présentoirs sous les portiques à l’extérieur du commerce de tabac - presse. Il n’est donc pas justifié du fait que les époux Y... occupent régulièrement les portiques en cause. Amar X... a fait établir trois procès-verbaux d’huissier en date des 18 mai 2000, 3 avril 2003 et 28 septembre 2005 dont il apparaît qu’une installation électrique peu fiable, voire dangereuse, a été aménagée sous les portiques, que seul un étroit couloir au droit de la porte d’entrée de l’immeuble était laissé libre mais qu’il était toutefois fermé par la fontaine de la place, que l’accès à l’immeuble était rendu difficile par la pose de jardinières et par l’alignement des présentoirs du commerce de tabac - presse. Or il est constant que l’accès aux étages de l’immeuble en cause ne peut s’effectuer qu’en passant par les portiques litigieux et qu’il doit pouvoir se faire de façon libre et commode. Tel n’est pas le cas en l’espèce où l’occupation des portiques par les époux Y... crée une gêne manifestement excessive pour accéder à l’immeuble, gêne constitutive d’un trouble anormal de voisinage et portant atteinte aux droits des autres copropriétaires de l’immeuble, la commune de SOSPEL, qui a toléré l’occupation de son lot par les époux Y..., est responsable vis à vis des autres copropriétaires, et donc de Amar X..., des agissements fautifs de ceux-ci, elle sera donc condamnée à faire cesser l’occupation des portiques par les époux Y... ou leurs successeurs et à faire supprimer l’installation électrique aménagée sous ceux-ci. Une astreinte de 200,00 Euros par jour de retard passé un délai de 1 mois à compter du présent arrêt sera fixé pour garantir l’exécution de la décision. Les troubles imputés aux époux Y... résultent de l’occupation des portiques et non de l’activité exercée dans les locaux du rez-de-chaussée. En conséquence, la responsabilité des consorts Z..., bailleurs du local commercial situé au rez-de-chaussée du 7 place Saint Nicolas, ne saurait être recherchée et ils seront mis hors de cause.

 

 

ALORS, D’UNE PART, QU’aux termes de l’article L 112-16 code de la construction et de l’habitation « les dommages causés aux occupants d’un bâtiment par des nuisances dues à des activités agricoles, industrielles, artisanales ou commerciales n’entraînent pas droit à réparation lorsque les activités en cause préexistent à la délivrance du permis de construire, à l’acquisition ou à la prise à bail du bâtiment » ; qu’en l’espèce, dès lors qu’il est constant qu’en vertu de l’acte d’adjudication du 21 janvier 1881 les portiques de l’immeuble Casino appartenant à la commune de SOSPEL sont restés dans le domaine public, que les juges du fond ont constaté qu’ils étaient destinés à satisfaire les besoins d’un service public (arrêt p 7, alinéa 3), que depuis 1885 le rez-de-chaussée de l’ensemble immobilier de la place saint Nicolas faisait l’objet d’une exploitation commerciale (jugement p 5, alinéa 8) et que, suivant contrat en date des 23 mars et 24 mars 2000, la commune de SOSPEL en avait concédé l’occupation à Monsieur Y..., la cour d’appel ne pouvait affirmer que leur occupation par les époux Y... avait été tolérée par la commune sur son lot, et qu’elle constituait un trouble anormal de voisinage pour Monsieur X... et les autres copropriétaires, sans violer, ensemble, les articles L 1311-1 du code général des collectivités territoriales, 1er et suivants de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 et L112-16 du code de la construction et de l’habitation et la théorie des troubles anormaux de voisinage ;

 

ALORS, D’AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, QUE le juge judiciaire est incompétent pour se prononcer sur les conditions d’une occupation du domaine public communal autorisée par une commune à des concessionnaires en vertu d’un contrat de concession non contesté; qu’en l’espèce, dès lors qu’elle a elle-même constaté qu’en vertu de l’acte d’adjudication du 21 janvier 1881 les portiques de l’immeuble Casino appartenant à la commune de SOSPEL sont restés dans le domaine public, que depuis cette date ils ont toujours satisfait les besoins d’un service public et fait l’objet d’une exploitation commerciale et que, suivant contrat des 23 et 24 mars 2000, la commune de SOSPEL en avait concédé l’occupation à Monsieur Y..., la cour d’appel ne pouvait affirmer que leur occupation par les époux Y... était fautive au motif qu’il n’est pas justifié qu’ils occupent régulièrement les portiques en cause, ni condamner la commune de SOSPEL à faire cesser cette occupation et à faire supprimer l’installation électrique, sans excéder ses pouvoirs et violer la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 Fructidor an III, et le principe de la séparation des pouvoirs.

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

30/06/2009

 

 

 

 

 



[1]  CE 11/02/1994 AJDA 1994 n° 7-8 note Dufau  RDI 1994 426 note Auby et Maugüé