Recouvrement des charges

État étranger copropriétaire

Logement du personnel diplomatique

Immunité d’exécution (non)

 

 

Cassation  civile 1    25 janvier 2005

Rejet.

N° de pourvoi : 03-18176

(Cour d’appel de Versailles, 23/01/2003)

 

 

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

 

Attendu que la République démocratique du Congo a acquis des biens immobiliers en France pour loger son personnel diplomatique ;

 

que par jugement définitif du 13 janvier 1998, la République démocratique du Congo a été condamnée à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble Résidence Antony Châtenay (le syndicat) la somme de 147 773, 46 francs en principal, représentant le montant de charges impayées ; qu’au cours de la procédure de saisie-exécution diligentée par le syndicat, cet État a demandé la nullité du commandement de saisie-immobilière en opposant le bénéfice de l’immunité d’exécution des États étrangers ;

 

Attendu que la République démocratique du Congo fait grief à l’arrêt attaqué (Versailles, 23 janvier 2003) d’avoir rejeté cette demande alors, selon le moyen :

 

1 / qu’en énonçant qu’il n’était pas établi que l’acquisition et la jouissance, par l’État congolais, des lots de copropriété en cause aient eu pour finalité d’assurer sa mission de service public ou la satisfaction de besoins liés à celle-ci, ni qu’elles relèveraient d’un quelconque acte de souveraineté ou de l’essence de la mission des agents diplomatiques occupant lesdits biens, la cour d’appel a violé l’article 1er de la loi du 9 juillet 1991 ensemble les principes du droit international régissant les immunités des États étrangers ;

 

2 / que l’activité pour un État étranger, à loger les agents dont il a besoin pour garantir le bon fonctionnement de sa représentation politique, administrative et militaire en France, et assurer, ainsi, l’efficacité et l’utilité de ses relations diplomatiques, ne constitue pas une activité économique ou commerciale relevant du droit privé et qu’en décidant le contraire, la cour d’appel a violé ces mêmes textes et principes ;

 

3 / qu’en estimant qu’en procédant à cette acquisition, l’État congolais avait renoncé, relativement aux recouvrement des charges, à son immunité d’exécution, la cour d’appel a violé l’article 1134 du Code civil et les principes sus-visés ;

 

Mais attendu que, selon les principes de droit international relatifs aux immunités, les États étrangers bénéficient, par principe, de l’immunité d’exécution ; qu’il en est autrement lorsque le bien saisi se rattache, non à l’exercice d’une activité de souveraineté, mais à une opération économique, commerciale ou civile relevant du droit privé qui donne lieu à la demande en justice ;

 

Que l’acquisition par l’État du Congo de biens immobiliers en France, fussent-ils affectés au logement de son personnel diplomatique, ne constitue pas une prérogative ou un acte de souveraineté mais seulement une opération habituelle de gestion relevant du droit privé ; qu’ayant constaté que les biens en cause n’étaient pas affectés aux services de l’Ambassade ou de ses annexes et n’étaient pas la résidence de l’ambassadeur, puis retenu que cette acquisition impliquait pour l’État du Congo le paiement des charges de copropriété de sorte que la créance du syndicat se rattachait à cette opération, la cour d’appel a, à bon droit, décidé que la République démocratique du Congo ne pouvait pas opposer son immunité d’exécution ; que le moyen, qui s’attaque à un motif surabondant en sa troisième branche, n’est pas fondé en ses deux premières ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

REJETTE le pourvoi ;

 

Laisse les dépens à la charge du Trésor ;

 

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;

 

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille cinq.

 

 

 

Commentaire :

Conformément à une jurisprudence solidement établie[1] pour le recouvrement des loyers comme pour celui des charges copropriété, la Cour de cassation rappelle ici qu’un État étranger ayant acquis un lot de copropriété pour y loger son personnel diplomatique (autre que l’ambassadeur) ne peut se prévaloir ni de l’immunité de juridiction, ni de l’immunité d’exécution lorsqu’il a été condamné.

Il suffit à la juridiction saisie de vérifier et constater « que les biens en cause n’étaient pas affectés aux services de l’Ambassade ou de ses annexes et n’étaient pas la résidence de l’ambassadeur » pour écarter le privilège de l’immunité.

 

Quel est le sort de la créance du syndicat des copropriétaires lorsque, dans le cas contraire, l’État étranger peut se prévaloir de l’immunité ? Nous sommes alors en présence d’un cas de responsabilité sans faute de l’État du fait des conventions internationales. La créance du syndicat sera payée par l’État..

 

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

20/09/2005

 

 



[1] Voir notamment Cass civ 1e 06/06/1990 Bull 1990, I, n° 141, p. 100