043608

 

 

Mutation de lot (ancien régime)

Prise en charges de travaux décidés non exécutés par le vendeur (clause de l’acte)

Prélèvement par le syndic sur le solde revenant au vendeur

Prélèvement illégal ; clause étrangère au syndicat des copropriétaires

Point évoqué : la clause est-elle une stipulation pour autrui ?

 

 

 

Cassation civile 3 16 septembre 2003

Cassation partielle

Tribunal d’instance de Puteaux 2002-04-02

N° de pourvoi : 02-16348

 

 

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :

 

Attendu qu’ayant relevé qu’il ressortait de l’examen des pièces versées au débat que le montant du fond de roulement avait été restitué à M. X... par imputation sur son compte, le Tribunal a ainsi précisé au vu de quels documents, en l’occurrence le compte individuel de copropriétaire, il avait fondé sa décision ;

 

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

 

Sur le troisième moyen, ci-après annexé :

 

Attendu qu’ayant relevé que, pour obtenir ce qu’il considérait comme une restitution de son dû sur son compte de copropriété, M. X... devait assigner le syndicat des copropriétaires et non pas le syndic, Cabinet Office locations transactions, en son nom personnel, le Tribunal, qui a condamné le copropriétaire à payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts à ce syndic, a légalement justifié sa décision et caractérisé la faute de M. X... en retenant qu’il avait engagé une procédure irréfléchie sinon abusive ;

 

Mais sur le premier moyen :

 

Vu l’article 1165 du Code civil ;

 

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d’instance de Puteaux, 2 avril 2002), que M. X..., ayant vendu le 26 juillet 2000 les lots dont il était titulaire dans un immeuble en copropriété, a assigné le syndicat des copropriétaires en remboursement d’une somme qu’il prétend avoir été indûment retenue sur le prix de vente au titre de sa quote-part sur des travaux de réfection de canalisation votés lors de l’assemblée générale du 29 juin 2000 ;

 

Attendu que pour débouter M. X... de sa demande, le jugement retient que l’acte de cession de propriété établi entre ce vendeur et son acquéreur comporte une clause selon laquelle “le vendeur réglera au syndic au moyen des fonds provenant des présentes, la quote-part des charges de copropriété due au jour de l’entrée en jouissance de l’acquéreur, en ce compris le coût des travaux de copropriété décidés avant ce jour exécutés ou non ou en cours d’exécution”, et que M. X... ne peut sérieusement contester l’existence de cette clause librement insérée dans un acte consensuel signé par lui-même ;

 

Qu’en statuant ainsi, en justifiant le prélèvement litigieux opéré par le syndicat par les stipulations d’un contrat auquel ce syndicat n’était pas partie, le Tribunal a violé le texte susvisé ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a débouté M. X... de sa demande de remboursement de la provision retenue sur le montant des travaux votés le 29 juin 2000, le jugement rendu le 2 avril 2002, entre les parties, par le tribunal d’instance de Puteaux ;

 

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

 

 

 

 

Commentaires

 

 

A propos de la vente d’un lot de copropriété, on proclame habituellement que les conventions établies entre le vendeur et l’acquéreur sont inopposables au syndicat des copropriétaires. Depuis longtemps les praticiens ont souvent considéré que ces clauses pouvaient lui profiter et qu’à tout le moins les syndics pouvaient participer à leur mise en œuvre quand le notaire leur en a précisé le contenu .

La vente a été signée le 26 juillet 2000. Elle est antérieure à la promulgation de la loi du 13 décembre 2000.

 

Sur le premier moyen : M. X, vendeur, demande au syndicat la restitution d’une somme qu’il prétend avoir été indûment retenue sur le prix de vente au titre de sa quote-part sur des travaux de réfection de canalisation votés lors de l’assemblée générale du 29 juin 2000.

C’est donc le notaire qui a effectué cette retenue, sans doute à la vue des indications données par le syndic, relatives aux travaux votés par l’assemblée du 29 juin 2000, soit un mois avant la signature de la vente.

Conformément à l’usage, le notaire a provoqué un accord des parties au sujet de la prise en charge des travaux. L’acte comporte une clause selon laquelle « le vendeur réglera au syndic au moyen des fonds provenant des présentes, la quote-part des charges de copropriété due au jour de l’entrée en jouissance de l’acquéreur, en ce compris le coût des travaux de copropriété décidés avant ce jour exécutés ou non ou en cours d’exécution ».

On peut penser qu’il a procédé lui-même à la mise en œuvre de cet accord en adressant le règlement stipulé au syndic. Il est fort vraisemblable que le rôle de ce dernier a été purement passif dans cette affaire.

 

On peut comprendre que le Tribunal d’instance ait jugé « que M. X... ne peut sérieusement contester l’existence de cette clause librement insérée dans un acte consensuel signé par lui-même ; »

 

A cela, la Cour de cassation répond « qu’en statuant ainsi, en justifiant le prélèvement litigieux opéré par le syndicat par les stipulations d’un contrat auquel ce syndicat n’était pas partie, le Tribunal a violé le texte susvisé ; »

 

Or nous avons vu qu’il n’y a certainement pas eu de prélèvement litigieux opéré par le syndic. Mais le plus important est de se demander si, dans un tel cas de figure, le syndicat est réellement étranger à la convention, ou si, du moins, il ne peut pas se prévaloir d’une clause favorable.

 

On sait que le syndicat des copropriétaires n’est pas représenté lors de la vente d’un lot bien que l’acquéreur soit réputé avoir adhéré au règlement de copropriété au cours de la « cérémonie ». Mais on est fort tenté de dire que la clause sus-indiquée est une stipulation pour autrui au sens de l’article 1121 du Code civil. Dans ce cas l’article 1165 permet que la stipulation puisse profiter au tiers. Nous n’entrerons pas dans les controverses souvent subtiles concernant la stipulation pour autrui.

De cet arrêt on peut retenir un enseignement qui reste d’actualité : la jurisprudence a toujours veillé à priver les clauses de l’acte de tout effet à l’égard du syndicat. Les dispositions nouvelles de l’article 6-2 du décret du 17 mars 1967 ne pouvaient que renforcer cette position, puisqu’elles règlent les rapports financiers des parties avec le syndicat avec une relative brutalité.

 

La réforme récente a eu pour heureux effet la disparition du compte prorata temporis. Désormais les syndics doivent s’en tenir à la stricte application de l’article D 6-2 . Ajoutons qu’il reste aux notaires le soin de protéger les acquéreurs contre certaines mauvaises surprises.

 

Il n’en reste pas moins que la pratique subsiste d’un paiement effectué par le notaire, pour le compte du vendeur, par prélèvement sur le prix de la vente, au titre de travaux décidés avant la vente et non encore effectués. La solution apportée par la Cour de cassation reste donc actuelle. Elle n’est pas satisfaisante.

Un tel paiement ne peut être effectué par le notaire qu’avec l’accord du vendeur.

 

La situation est différente si c’est bien le syndic qui débite le compte du vendeur. Après la réforme récente il ne lui appartient pas de mette en œuvre la clause portée à sa connaissance. Conformément aux nouveaux textes, il devra appeler les fonds nécessaires auprès de l’acquéreur et celui ci devra se faire rembourser par son vendeur.

 

 

 

 

 

Mise à jour

05/04/2008