http://www.copyrightdepot.com/images/Sceau1.gif

00043608

 

CHARTE

 

Ne sont autorisées que
 1) les reproductions et copies réservées à l’usage privé, non commercial du copiste à l’exclusion de toute utilisation collective

2) les analyses et courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration

3) l’insertion d’extraits dans un ouvrage de formation

associées, pour 2) et 3) à la citation du site

 

 

 

 

 

Droit de jouissance exclusif sur une partie commune

Droit de propriété (non)

 

 

Cassation civile 3e  4 mai 1995                                                                  Rejet.

Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 10-11-1992

N° de pourvoi : 93-11121

 

 

Sur le moyen unique :

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 novembre 1992), que les époux Destombes, aux droits desquels vient Mme Destombes, après le décès de son mari, ont acquis, au septième étage d’un immeuble en copropriété, un lot composé notamment d’un appartement et d’un droit de jouissance exclusive et particulière sur une partie de la terrasse, ainsi que trois autres lots comprenant un droit de jouissance sur d’autres parties de cette terrasse, avec des quotes-parts de parties communes ; que ces copropriétaires ayant procédé, sans autorisation, à divers aménagements et installations sur la terrasse, l’assemblée générale des copropriétaires a, le 25 mars 1988, autorisé le syndic à agir en justice afin d’obtenir la suppression de ces installations sur les parties communes ; que les époux Destombes ont demandé la nullité de cette décision et le syndicat le rétablissement des lieux dans leur état antérieur ;

 

Attendu que les époux Destombes font grief à l’arrêt de les débouter de leur demande et d’accueillir celle du syndicat, alors, selon le moyen, 1° qu’aux termes de l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965, chaque copropriétaire use et jouit librement des parties privatives comprises dans son lot sous réserve de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires, ni à la destination de l’immeuble ; que, selon l’article 2 du règlement de copropriété de l’immeuble Le Panoramic, constituent des parties privées les lots 153, 154 et 155 comprenant la jouissance d’une portion de la terrasse de l’immeuble ; qu’ainsi, en considérant que les époux Destombes, titulaires de ces lots, ne bénéficient que d’un droit d’usage exclusif sur une partie commune, et non des attributs du propriétaire d’une partie privative, la cour d’appel a violé les articles 1134 du Code civil et 2 et 9 de la loi du 10 juillet 1965 ; 2° que ne peuvent être considérés comme affectant l’aspect extérieur de l’immeuble au sens de l’article 25 b de la loi du 10 juillet 1965 que les ouvrages susceptibles d’être vus dans le champ de vision d’une perspective normale depuis la voie publique ou depuis l’immeuble lui-même ; qu’en se bornant à affirmer que les travaux litigieux affectaient l’aspect extérieur de l’immeuble et devaient être supprimés faute d’avoir été autorisés sans s’expliquer sur les conditions dans lesquelles les travaux étaient vus de l’extérieur, la cour d’appel a privé son arrêt de base légale au regard du texte susvisé et de l’article 30 de cette même loi ;

 

Mais attendu, d’une part, qu’ayant exactement retenu que, selon les stipulations du règlement de copropriété, la toiture-terrasse, divisée en zones de jouissance, ne perdait pas son caractère de partie commune, la cour d’appel en a justement déduit que ce droit de jouissance, même affecté d’une quote-part de parties communes correspondant aux charges que son titulaire supporte pour l’entretien et la conservation de la toiture-terrasse, ne pouvait être assimilé à un droit de propriété, ni conférer à son titulaire le droit d’édifier un ouvrage sans l’autorisation de l’assemblée générale ;

 

Attendu, d’autre part, que la cour d’appel, qui a constaté que l’ensemble des constructions et aménagements édifiés sur la toiture-terrasse, par les époux Destombes, affectait l’aspect extérieur de l’immeuble, n’avait pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée ;

 

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

REJETTE le pourvoi.

 

 

 

 

commentaires

 

Nous signalons que cette note a été rédigée en 2007.

Le présent arrêt, bien qu’il reprenne certaines solutions jurisprudentielles antérieures [1] , est à juste titre considéré comme ayant présenté pour la première fois une analyse cohérente de la notion de « droit de jouissance exclusif sur une partie commune ». Il est ainsi l’amorce d’une série de décisions qui, déniant au titulaire d’un tel droit la qualité de propriétaire, en ont logiquement déduit l’inexistence juridique d’un lot dont la partie privative serait constituée par un droit de jouissance exclusif sur une partie commune.

Admise facilement pour les cas les plus nombreux d’application à des terrasses supérieures et à des jardins, elle a fait récemment sensation en aboutissant à l’annulation d’un lot à usage d’emplacement de stationnement dont la partie privative était décrite, dans le règlement, comme un droit d’usage exclusif.  [2]  

 

En l’espèce, il s’agit d’un lot composé notamment d’un appartement et d’un droit de jouissance exclusive et particulière sur une partie de la terrasse, ainsi que trois autres lots comprenant un droit de jouissance sur d’autres parties de cette terrasse, avec des quotes-parts de parties communes. Selon l’article 2 du règlement de copropriété de l’immeuble, constituent des parties privées les lots 153, 154 et 155 comprenant la jouissance d’une portion de la terrasse de l’immeuble.

Forts de ces indications, les époux D. , se considérant comme propriétaires, ont réalisé différentes constructions sur la terrasse sans demander la moindre autorisation. Le syndicat des copropriétaires a demandé et obtenu la suppression de ces installations.

 

La Cour de cassation juge que la Cour d’appel a « exactement retenu que, selon les stipulations du règlement de copropriété, la toiture-terrasse, divisée en zones de jouissance, ne perdait pas son caractère de partie commune » et «  en a justement déduit que ce droit de jouissance, même affecté d’une quote-part de parties communes correspondant aux charges que son titulaire supporte pour l’entretien et la conservation de la toiture-terrasse, ne pouvait être assimilé à un droit de propriété ».

La Cour de cassation semble ici admettre que la terrasse soit affectée « d’une quote-part de parties communes correspondant aux charges que son titulaire supporte pour l’entretien et la conservation ». En réalité, dans le cadre strict du litige qui lui était soumis, la Cour de cassation ne pouvait s’exprimer sur un moyen qui n’était pas soulevé, et a fortiori sur une question qui ne faisait pas litige entre les parties.

Quelques fins juristes ont eu l’idée de s’engouffrer dans la brèche ainsi ouverte. La Cour de cassation a eu ainsi l’occasion de juger par la suite qu’il ne pouvait alors exister ni lot, ni quote-part des parties communes, ni quote-part de charges !

Nous sommes alors en présence d’un bouleversement complet de la division de la propriété de l’immeuble et plus encore de la répartition des charges.

 

C’est pourquoi nous suggérons aux syndics et aux conseillers syndicaux de vérifier s’il existe dans le règlement de copropriété de leur immeuble un ou plusieurs lots ne comportant comme partie privative qu’un droit de jouissance exclusif. Il nous paraît souhaitable d’étudier, dans l’affirmative, la situation et de rechercher, avec le concours d’un spécialiste, les moyens d’une remise en ordre amiable de la situation.

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

18/06/2014

 

 

 

 



[1] Cass. Civ. 19/12/1990

[2] Cass. civ. 3e 06/06/2007