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Universimmo et l’affaire Urbania

 

 

On a pu trouver depuis quelques semaines dans le site Universimmo.com les commentaires les plus pertinents sur l’affaire Urbania. La collaboration à ces travaux de Bernard  Terrasse, Directeur du Département des Professions Réglementées Immobilières de la Bred Banque Populaire, conforte leur valeur.

La dernière livraison nous semble appeler quelques réserves qui s’insèrent tout naturellement dans un débat complexe, sans porter la moindre atteinte à la qualité des observations précédentes.

http://www.universimmo.com/actu/uniactu00x.asp?Article_Code=593

 

Les auteurs, sans nier le caractère critiquable d’opérations financières qui ont abouti au désastre que l’on connaît, font observer que le silence des textes ne permet pas de les considérer comme illégales.

Ils estiment par ailleurs que la généralisation du compte bancaire séparé ne permettrait d’éviter aux copropriétaires le renouvellement d’opérations de même type.

Pour eux, c’est avant tout la qualité des contrôles auxquels sont normalement soumis les administrateurs de biens qui peut assurer la sécurité financière des syndicats de copropriétaires. Il est évident que ces contrôles présentent un intérêt majeur mais nous ne partageons pas leurs avis relatifs à la légalité des opérations qui ont été effectuées et à l’insuffisance des garanties apportées par les comptes bancaires séparés.

 

 

Ils fournissent en premier lieu une indication précise : le montant des fonds des mandants non représentés (trésoreries des copropriétés gérées et loyers et dépôts de garantie encaissés pour des propriétaires bailleurs non présentes en banque) s'élève à 340 millions […] « dont 196 pour la seule Société Générale, 60 pour Monte Paschi Banque, 62 pour Banque Française et 20 pour Fortis. »

Elle exige une précision importante : le défaut de représentation des fonds ne peut concerner globalement que l’administrateur de biens dans ses relations avec ses mandants. Il serait de 340 millions d’euros. Point c’est tout.

Le montant de 196 millions correspond  à une perte de la Société générale dans des tractations avec Urbania qui  sont en principe juridiquement inopposables aux mandants. Il en va de même pour les autres banques.

On ne peut pas confondre le montant global de l’insuffisance de représentation des fonds avec le cumul des créances des banques, même s’il y a identité mathématique des montants.

 

L’intérêt majeur de l’étude présentée par Universimmo est de faire valoir qu’il n’existe aucune illégalité dans le mécanisme qui a abouti à la déconfiture d’Urbania et aux pertes enregistrées par les banques qui ont accepté le risque d’une telle aventure.

Les auteurs indiquent que « rien dans la loi "Hoguet" du 2 janvier 1970 et son décret d'application du 20 juillet 1972, même modifiés à quelques reprises, ne fixe les caractéristiques des comptes bancaires sur lesquels les administrateurs de biens déposent les loyers perçus au nom de leurs clients propriétaires bailleurs, et les syndics l'argent avancé par leurs clients copropriétaires à leur copropriété pour sa gestion ».

Il est vrai que la loi et le décret sont muets à propos des comptes bancaires susceptibles d’être utilisés par les administrateurs de biens pour la gestion des fonds appartenant à leurs mandants.

Il est bien certain que l’article 55 du décret de 1972 ne concerne que les agents immobiliers.

Il est certain encore que l'article 70 n’impose l’ouverture d’un compte spécial pour les fonds de mandants détenus par un administrateur de biens qu’en cas de retrait de la garantie financière par l'organisme qui la délivrait jusque là.

M. Terrasse précise à et égard

« dans la pratique, la plupart des professionnels ouvrent des comptes bancaires dédiés à cette activité. Mais ce n'est que la conséquence des obligations réglementaires provenant de deux sources :

- des règlements intérieurs des sociétés de cautionnement mutuel qui délivrent les dites garanties.

- des recommandations du Conseil National de la Comptabilité qui demande aux experts-comptables, de créer un compte de régie qui doit avoir sa contrepartie dans un compte bancaire.

 

Il faut néanmoins rappeler que le plan comptable propre à une branche professionnelle présente un caractère contraignant pour les professionnels de la branche.

Dans sa version approuvée le 21 décembre 1983 par le Conseil national de la comptabilité, l’avant-propos rédigé par M. Roland Pierre mentionnait :

« Les comptes financiers attachés aux clients sont rattachés aux comptes 54  « Régies d’avances et accréditifs » conformément au plan comptable général.

« Il est indispensable de séparer la trésorerie des clients de celle du Cabinet dont les capitaux propres doivent suffire à assurer les investissements et les dépenses d’exploitation de l’administrateur de biens. »

On retrouvait la mise en œuvre de ce principe dans l’annexe 2 énonçant les comptes créés pour les besoins de la profession.

 

S’agissant d’un administrateur de biens gérant les fonds de mandants par compte(s) dit(s) unique(s), le bilan doit comporter en reflet (au vrai sens comptable du terme) les positions des mandants en 41 et les soldes des comptes financiers affectés aux mandants en 54.

Très grossièrement, si le montant total des mandants créditeurs est de 4 150 000 € au crédit des comptes 41, on doit retrouver ce même montant total au débit des comptes 54. Nous admettons ici qu’il n’existe aucun mandant débiteur. Dans la pratique, la présentation est plus complexe car il faut distinguer les mandants « gestion locative » des mandants « copropriétés ». Il existe généralement des comptes bancaires « uniques » distincts pour chacune de ces catégories.

Si l’expert comptable ne retrouve que 3 900 000 € au débit des comptes 54, il doit bien entendu rechercher la différence de 250 000 €.

 

 

Même si l’on peut regretter le silence des textes, il faut admettre qu’il existe un encadrement assez strict de l’activité des administrateurs de biens.

M. Terrasse ajoute à juste titre que « certains administrateurs de biens ont réussi à s'y soustraire dès lors qu'un banquier, un expert-comptable et un garant ne les obligent pas à respecter une certaine orthodoxie professionnelle et créent ainsi une confusion entre leur trésorerie propre et celle détenue pour compte de tiers. »

 

On le suit plus difficilement quand il affirme : « C'est ce qui est peut être arrivé au sein du groupe Urbania. ». On ne peut pas comparer les montages fantaisistes réalisés par certains syndics avec des agences bancaires de quartier à une opération aussi gigantesque que l’opération Urbania. Mais il y a la dessus une instruction pénale en cours. Il n’y a donc pas lieu d’en dire plus.

 

Il reste vrai, comme l’affirment les auteurs, que «  la protection de l'argent des clients repose essentiellement sur deux sécurités :

- la vigilance de l'organisme qui délivre la garantie financière obligatoire, qui en général impose de ne pas mélanger les fonds des clients avec la trésorerie propre de l'administrateur, et de veiller à la "représentation des fonds", c'est à dire la disponibilité sous une forme sécurisée et liquide de fonds à hauteur des comptes créditeurs des clients,

- celle de la banque qui, dans un devoir de conseil et de prudence, lorsqu'elle autorise des placements de ces fonds, dont elle sait qu'ils appartiennent aux clients, doit au moins savoir sur quels supports ces placements sont effectués, sinon veiller à ce que ces placements ne soient pas risqués...

 

sous une réserve importante : Il n’appartient pas à la banque d’autoriser des placements de ces fonds, dont elle sait qu'ils appartiennent aux clients. L’article 35-1 du décret de 1967 (inséré par le décret du 27 mai 2004) réserve présentement aux assemblées générales le droit de décider de tels placements. Il ne s’agit que de la confirmation par le législateur d’une règle ancienne.

 

 

L’étude comporte de surprenantes réserves relatives à la sécurité qu’apporte un compte bancaire séparé.

 

Elle évoque à juste titre les errements des banques relatifs à la différence de nature bancaire d'un vrai compte séparé au nom d'un syndicat de copropriétaires et d'un compte individualisé ouvert pour une copropriété au nom du syndic. On retrouve encore de tels errements à propos des formalités d’ouverture d’un compte séparé. Certaines banques exigent par exemple une attestation de non-contestation de la décision d’assemblée ayant désigné le syndic ! D’autres banques prétendent assimiler un compte séparé de syndicat de copropriétaires à un compte d’entreprise !

Il n’est pas difficile maintenant pour une copropriété de s'assurer qu'elle dispose d'un compte séparé. Dès lors qu’un compte bancaire est immatriculé au nom du syndicat, sa titularité est établie sans possibilité de contestation. La présence à la suite du nom et de l’adresse du syndic ne vaut que pour la domiciliation. Une précaution reste néanmoins d’exiger la mention « chez » comme suit

SDC 18 rue des Fleurs Paris
chez Cabinet X… 4 rue de la Marne 75021 Paris

 

Dès lors que le Cabinet X… n’a pas été dispensé par une décision d’assemblée générale de l’obligation d’ouverture d’un compte séparé, le syndicat peut se prévaloir de sa qualité de compte séparé à l’encontre de la banque aussi bien qu’à l’encontre de toute personne prétendant appréhender les fonds ou le maniement du compte bancaire, à quelque titre que ce soit.

Peu importe à cet égard que le syndic ait, de fait, ouvert un sous-compte de son compte unique avec la complicité de la banque. On peut parler de complicité car le banquier, pour ouvrir un nouveau sous-compte, doit se faire présenter le procès-verbal de l’assemblée ayant accordé la dispense nécessaire au syndic. On admet seulement qu’il s’agit d’une complicité par omission fautive.

 

Nous rappelons sur ces points l’arrêt déterminant rendu par la Cour de cassation le 9 avril 2008 (n° 07-12268), cassant un arrêt de la 23e chambre B de la Cour d’appel de Paris du 07/12/2008. Voir l’arrêt

 

 

L’étude précise que « le vrai risque des clients est dans une déconfiture de l'administrateur de biens, et par voie de conséquence une désorganisation des services qui les laisserait notamment sans arrêtés de comptes à jour : dans ce cas, il est difficile de mettre en oeuvre la garantie financière dans la mesure où il faut pour cela être en mesure de prouver sa créance, justement par des comptes à jour. »

Cela est particulièrement vrai dans le cas de gestion des fonds par compte unique. Dans le cas de gestion par compte séparé, le syndicat peut, sans coup férir, obtenir directement copie de ses relevés mensuels. C’est un point important. Il peut même appréhender directement ses fonds en cas de révocation du syndic sur le fondement de la déconfiture. Il suffit au nouveau syndic de présenter le procès-verbal de l’assemblée comportant mention de sa désignation.

Dans cette attente, il est même possible d’obtenir le placement sous séquestre du compte jusqu’à désignation d’un nouveau syndic.

On doit toutefois admettre la possibilité d’erreurs de traitement comptable préjudiciables au syndicat, et même la possibilité d’un détournement de fonds. C’est une hypothèse rarement constatée.

 

 

Pour conclure, il faut insister sur l’importance du contrôle que doivent exercer les conseils syndicaux.

Nombreux sont les conseils syndicaux qui feraient mieux de s’y impliquer plus, quitte à laisser le syndic s’occuper plus activement de la gestion courante qui relève de sa compétence.

 

 

 

 

 

Mise à jour

21/10/2010